Jay Ma 94 Automne
2009
Paroles de Mâ
Tout ce que notre esprit accepte, hormis Dieu, est
synonyme de souffrance.
Le bonheur et le malheur sont dans l’agrément ou
le non-agrément de quelque chose. Si vous désirez
aller au-delà de cet agrément et de ce non-agrément,
acceptez-Le. Si vous désirez aller outre, alors invoquez-Le.
Qui est souffrant ? Qu’est-ce qui est
souffrant ? Qui cause la souffrance à qui ? Où est la
souffrance ? C’est le Soi avec le Soi. Si les dents d’une personne mordent
sa propre langue, qui ressent la douleur ? Ce sont les propres organes de
cette personne qui la ressentent, son corps – le Soi en Soi.
Nous assumons notre corps pour connaître
l’expérience des plaisirs et des douleurs de ce monde. Pour aller au-delà de ce
bonheur et de cette souffrance, il faut aller chercher refuge en Lui.
Il est Celui qui élimine toutes les souffrances.
Faites appel à Lui, tout le temps. Gardez-Le dans vos
méditations, priez-Le. Offrez-Lui votre obéissance et
ouvrez-Lui totalement votre coeur. Tout en Lui est bénédiction, paix et
béatitude. Il est Le Coeur des coeurs. Il est l’Atma
(l’Âme Suprême).
Quoi que Dieu fasse, Il le fait pour le bien. De
même que le médecin pratique une incision dans le furoncle et en extrait la
substance purulente pour soigner le mal, Dieu, Lui, vous donne la souffrance,
vous lave et vous sèche puis vous prend dans Son étreinte. Dieu corrige toutes
les fautes et dit : « Donne-moi toutes tes impuretés et reçois
l’immortalité en retour ». Il envoie la souffrance et la détresse à Ses
adorateurs pour faire grandir leur ardeur et accroître leur aspiration. Dieu
accepte leur dévotion lorsqu’elle passe par les larmes et la souffrance.
La souffrance ne disparaît que lorsque Dieu est
réalisé. Il n’y a aucune autre façon de Le réaliser qu’en pratiquant le japa de Son nom, en méditant sur Son nom, en le
vénérant et chantant Sa gloire (Naam Kirtan). La compagnie de personnes élevées
spirituellement (satsang), la lecture de
livres spirituels sont une aide sur cette voie. Très souvent ce corps dit une
chose : « vishay (la vie par
les sens) mane (signifie) vish
(poison) hoi (devient) ». Le plaisir que
procurent les sens conduit lentement vers la mort – « poison lent ».
C’est pour cela que vous devez passer autant de temps que possible avec Lui.
Pour trouver une protection contre ces trois
sources d’oppression (afflictions) il faut avoir recours à l’aide d’un autre
type d‘oppression (taap). C’est par
l’oppression qu’on peut combattre l’oppression.
C’est ce qu’on appelle tapasya (‘austérité’,
littéralement, ‘ chaleur’ ; ‘ dessèchement’). C’est avec tapasya qu’on peut vaincre l’oppression. Tout comme
on ressent la souffrance en affrontant l’oppression de ce monde, on peut
connaître la même souffrance au début, lorsqu’on prend le nom de Dieu. Mais ce
n’est qu’en passant par cette souffrance qu’on se libère de l’oppression. C’est
pour cela que l’effort est indispensable, la pratique est indispensable et
l’action est indispensable. Les oiseaux par exemple, ou les animaux en général,
n’ont aucun intérêt à se débarrasser de la souffrance de cette façon, pour la
réalisation de Dieu à tout jamais plein de grâce et de félicité.
Cela n’est valable que pour les êtres humains.
Dialogues avec Mâ
Extraits du livre de Jean-Claude Marol :
La Saturée de joie (éditions Dervy)
Garder le silence ou pas?
Et le jeu commença!
Elle dit, mutine :
S’il y avait la moindre conscience de moi, je pourrais dire je suis.
Comme ce n’est pas le cas, vous pouvez dire ce que vous voulez!
Cela laisse le champ ouvert! Tentons l’aventure de dire un peu!
Celle qui en Inde fut nommée Mâ Anandamayî, et qui ces dernières décennies, traça tant de
sillages dans tant de coeurs, dit aussi, simplement:
Soyez plein de vie partout ou vous allez, et rien ni personne ne vous sera
étranger.
Nous n’évoquerons pas dans ces pages une étrangère! Je forme le voeu que ce
livre nous aide a rencontrer un ‘être plein de vie’, infiniment proche. Pour
nous avancer vers ce Très Proche, le geste à faire est un moindre geste!
Les approches par lesquelles les humains tentent de réaliser le Soi sont
d’une infinie variété; et chaque variété comporte d’innombrables aspects. Tous
ces modes de recherche m’apparurent comme des parties de moi-même.
L’oiseau en vol
Q.: Vos réponses sont tellement en accord avec nos Ecritures que vous
n’avez pas étudiées…comment est-ce possible?
Ma répondit :
Il y a le grand livre de la vie. Si on s’y plonge profondément, toutes les
vérités expliquées par les écritures, sont la, prêtes à se révéler!
Elle se disait parfois udha pakhi (oiseau en vol) qui se perche ici ou là de façon
imprévisible. Elle dira un jour, alors qu’on venait de lui faire la remarque:
-Mâ, parfois vous semblez porter une grande
attention a quelqu’un; d’autres fois, vous ne nous accordez pas même un regard.
-je ne me comporte d’aucune façon particulière vis-à-vis de qui que ce
soit. Il ne s’agit absolument pas de comportement.
-Alors à qui parlez-vous?
-Ce corps, c’est ainsi, ne parle à personne, ne va chez personne, ne mange
la nourriture de personne …. Pour ce corps il n’y a qu’Un. Il n’y a pas même la
possibilité d’un second. Je ne vais nulle part, je suis toujours ici. Il n’y a
ni allées, ni venues. Tout est Dieu.
En notre temps, déchiré par tant de fanatismes, où nous sommes arc-boutés
sur tant de “quant-à-soi”, écoutons-la nous dire, et cela paraîtra
contradictoire avec les mots qui précèdent – à nous d’étendre ce qui est
déguisé par le langage :
Ici, dans ce corps est une relation avec tout un chacun.
Ici, pas d’abris, de demeure séparée.
Si vous voulez parler de demeure, il n’y en a qu’une, et elle est sans
limite!
Où est le
nom ; où est la forme ?
Il est certes nécessaire de rétablir le balancier d’une spiritualité
généralement « patriarcale », en saluant le versant féminin (entre
autres sous son jour maternel). Mais ultimement une vraie vision du Père
Premier et de la Mère Première, implique que l’on transcende les aspects mâle
et femelle ; comprendre un peu Anandamayî demande
que l’on soit capable de la vivre sans qu’elle soit ni ceci, ni cela, ou
contenant et ceci et cela. Dans l’Atharva Veda (VII-6)
la Déesse Première Aditi, est saluée ainsi :
« Aditi est Mère, elle est Père, elle est
fils. »
Mâ Anandamayî nous invite souvent a perdre nos
repères : nos clivages masculin – féminin ou d’autres paires
d’opposés. Nous y reviendrons un peu plus loin.
Elle est, certes, notre mère ou notre enfant, elle est surtout Une avec qui
que ce soit, quoi que ce soit. Cela, elle le confie souvent, sous une forme ou
sous une autre, car nous avons besoin de l’entendre et de le réentendre !
Alors qu’un occidental lui demandait de façon insistante quel message
d’elle il pourrait répercuter quand il serait rentré dans son pays, et comment
il pourrait évoquer sa présence, elle répondit en souriant :
Très bien. Dites à vos amis : j’ai vu une gamine ; elle papote
sur tout ce qui lui arrive. A tout ceux qui voudront en savoir plus, dites-leur
que je suis leur enfant. Mais en réalité, vous tous et moi, sommes un, n’est-ce
pas ? Il n’y a qu’un souffle qui imprègne tout, il n’y a rien d’autre qu’Un.
Vos penchants inconscients (samskara) dressent un mur
qui vous enferme.
Le destin humain est d’effondrer cette limite qui vous sépare de votre
propre nature. Réaliser sa propre nature, signifie réaliser Dieu, c’est
réaliser l’Unique Réalité !
Non-quoi-que-ce-soit
Une direction donnée permet d’atteindre un but donné ; tout le reste
par ailleurs, demeure hors d’atteinte. Mais quand la différence s’évanouit
entre ce qui s’atteint et ce qui est hors d’atteinte, alors Cela se
révèle !
Elle ajoutera :
Le mystère de l’univers révèle à qui sait savourer le non-quoi-que-ce-soit.
Vous voulez jouer ….
Ce corps n’est qu’une poupée. Vous voulez jouer avec elle…elle joue !
Humour encore de Mâ Anandamayî,
traitant des propos considérés comme sérieux Un jour, elle s’exclama :
Vous vous émerveillez vis-à-vis de celles et ceux
qui renoncent au monde…en réalité, c’est vous qui renoncez à tout ! Quel est
ce tout ? Dieu, ni plus ni moins ! Le
laisser de côté est la renonciation suprême ! (Et le transcripteur note : à ce
moment elle éclate de rire !)
Une autre fois elle fit la remarque :
Dans le domaine spirituel, vous aimez vous sentir libre de toute
obligation ! Vous réservez à tous les autres domaines de votre vie, votre
grande capacité à être dépendants …. (autres
rires !)
Laissez les mouches
s’amuser un peu !
Quand elle arrive au vaste ashram de Bénarès, elle s’inquiète de chacun des
humains présents, et va saluer avec la même attention individuelle, vaches et
veaux.
Cette tendresse se manifestait pour le moindre insecte. Une fois, un insecte
escaladait un coussin où Mâ était
assise ; une jeune fille brahmacharini
s’en aperçoit et le repousse. L’insecte recommence son escalade. Mâ prend la serviette qui protège sa tête et délicatement y
installe l’insecte qui ne bouge pas. Mâ remarque
qu’il semble absorbé dans une profonde méditation. Un peu plus tard, Mâ regarde intensément l’insecte et annonce qu’il a quitté
son corps. Elle demande qu’on le porte au Gange, enveloppé dans sa serviette.
Cet insecte avait une rencontre qui avait bouleversé sa vie !
Texte tapé par Sandrine Oubrier
à Kankhal
Préface
au recueil de paroles de Mâ
« Vangmayee Ma »
Par Vigyânânand (Dr
Jacques Vigne)
C'est dans l'Himalaya, à
l'ermitage de Dhaulchina, situé au nord-est de Delhi
dans l'angle de l'Inde entre le Tibet et le Népal, que j'ai pu avoir
connaissance du texte anglais non encore publié de Vangmayee Ma (ou Vangmayî Mâ). Il s'agissait de la traduction à partir du bengali d'un recueil assez fourni de
paroles de Mâ classées par thème. J’ai reçu ce texte
de Swami Nirgunânanda, mon voisin dans ce bel ermitage où il vit
depuis 22 ans. Il a effectué lui-même une bonne partie des traductions à partir
du bengali, et a travaillé avec une autre personne qui elle, était partie de la
version en hindi, nécessairement moins précise puisqu'elle était elle-même déjà
une traduction de l'original bengali. Swami Bhaskarânanda, qui était le bras droit de Mâ et auquel celle-ci a confié la charge de donner
l’initiation après le décès de sa mère Didi Mâ, a beaucoup encouragé la traduction de ce livre du
bengali en anglais, pensant qu’il était bon de revenir facilement, grâce à
cette anthologie, à ce que Mâ disait directement. Nous
avons décidé de publier ces paroles de Mâ à la fois
en français et en espagnol pour mettre sur le site de Mâ
Anandamayî. C’est Jean E.Louis
de Nice qui s'est chargé de la traduction française, que j'ai révisée, en discutant
un certain nombre de points peu clairs dans le texte anglais avec Swami Nirgunânanda à l'ermitage.
À chaque fois, il est revenu à l'original bengali, nous avons discuté de ce
qu’a vraiment voulu dire Mâ, et cela a permis
d'améliorer certains points obscurs de la traduction anglaise, et de les rendre
plus clairement à la fois en français et en espagnol. Pour cette dernière
version, c'est Andrea Veselich qui s'en est chargé.
Jeune avocate passionnée par l'Inde, elle ne vit cependant pas tout près, puisqu'elle
réside en Patagonie, la pointe sud de l'Argentine près de la Terre de feu...
Mais grâce à l'Internet et à sa bonne volonté, car elle ressent un lien fort
avec Mâ, elle a pu rendre ce service de traduction au
lectorat hispanophone intéressé par la sagesse de l'Inde.
Swami Vijayânanda qui a passé plus de 30 ans auprès de Mâ Anandamayî, et vit toujours
dans ses ashrams après 57 ans continûment en Inde, dit clairement et fortement
: guru vakya mantra, ‘la parole du gourou
est un mantra’. Dans la Guru Gita, il est aussi une strophe célèbre où il est dit mantra-mulam guru-vakyam,
‘la racine du mantra, c'est la parole du gourou’. La qualité principale du
gourou n'est pas de donner un enseignement intellectuel et linéaire, mais
d'avoir un impact par une transmission de l'énergie, ce qu'on appelle dans le
langage traditionnel le shaktî-pat. Il peut le
faire à travers un mantra chuchoté dans l'oreille au moment de l'initiation
rituelle, mais aussi à travers n'importe quelle autre parole survenant dans
n'importe quelle autre circonstance, à travers le don d'un objet, d'une fleur,
d'un prasâd,
et encore, sans aucun intermédiaire (anupaya),
de façon directe, d’âme à âme. Du trop-plein de ce réservoir d'énergie qu’est
le gourou, le manque du disciple peut être comblé.
Pour bien comprendre comment Mâ transmettait l'énergie, il ne suffit pas de lire ces
paroles, mais il faut également se plonger dans sa vie et dans les expériences
de ses disciples proches. Nous avons traduit en français sous le titre de Matri
Darsh[i]an,
le témoignage princeps de Bhaiji, le premier
grand disciple de Mâ Anandamayî
après son mari Bholonath, et qui a donné à celle qui
s'appelait auparavant Nirmala Dévî
le nom d'Anandamayî. Il y a aussi l'ouvrage de Bithika Mukerjee qui donne
beaucoup de détails[ii], et le dernier livre de Jean-Claude Marol – il est paru deux mois avant sa mort trop précoce – La
Saturée de joie aux éditions Dervy. Il y
développe en particulier l'importance du féminin spirituel, et le lien qu’il
discernait entre le lien avec Mâ et le respect pour
l’image de la Dame au Moyen Âge, qui a continué dans le catholicisme jusqu'à
nos jours à travers le culte de Notre-Dame.
Il y a tout un mouvement de fond
au XXe siècle et qui prend de l'ampleur maintenant : il tend à remettre à
l'honneur l'aspect féminin du sacré. Il peut se manifester à travers
l'écologie, où Gaïa est présentée comme une personne vivante, la déesse Terre,
qu'il faut respecter et cesser de violer dans tous les sens. Par ailleurs, à
cause du conflit israélo-arabe chronique au Moyen-Orient, beaucoup de gens
sensés se mettent à réaliser que le monothéisme avec son dieu purement mâle et
exclusivement unique, risque de ne jamais réussir à dépasser les guerres
saintes, et qu'au contraire les armes de destruction massive exposent au danger
qu'elles deviennent beaucoup plus dévastatrices qu'auparavant, ce qui n'est pas
peu dire. D'où la nécessité de renforcer l'aspect féminin du sacré, en
encourageant le développement d’enseignantes religieuses femmes et aussi du
point de vue métaphysique, en remettant à l’honneur le couple divin dieu/déesse
qu’on retrouve dans pratiquement toutes les formes religieuses de l'humanité,
excepté le monothéisme.
De plus, l'aspect féminin de
la mystique est aussi relié à l'expérience chamanique, restant proche de la
source et peu encombrée de dogmatiques et d’idéologies religieuses. Dans ses
débuts, l’auto-initiation de Mâ
par exemple et ses transes multiples évoquaient tout à fait la descente d'une
expérience chamanique. Cependant, Mâ n'est
certainement pas restée à ce niveau, elle était déjà prise dans le vaste
courant de la bhakti du Bengale avec les grands exemples de Chaitanya Mahâprabhu au XVIe siècle et de Râmakrishna
au XIXe. Elle a passé sa vie de gourou à guider la
majorité de ses disciples sur cette voie traditionnelle de la bhakti, d'où ses
multiples conseils dans cet ouvrage sur la récitation du mantra et la force du
lien avec le gourou, mais elle était aussi solidement enracinée dans la voie de
la connaissance et dans l'expérience de l'Un. Elle revient tout le temps à
l’Unité fondamentale, en exprimant en des termes simples, mais forts, l'absence
de dualité et la capacité fondamentale qu'a un être humain à se relier
directement à l'Absolu sans intermédiaire.
Un mot d'explication sur le sens
du titre de ce livre, Vangmayî Mâ.
Il signifie’ la Mère pénétrée, constituée de Parole’. Ce nom évoque la première
forme de la Mère divine dans les védas, Vak,
de la même racine que vox en latin et ‘voix’ en français, cette déesse
« Voix » donc qui permet l'expression audible du Brahman. On dit
qu'elle est née de la langue de ce Brahman, ou parfois qu'elle en est son
épouse. Elle n'est pas sans évoquer la Hohkhma-Sophia-Sagesse
de la mystique juive. Dans l'hindouisme classique, elle s'est transformée en
Sarasvatî, déesse blanche de la pureté, de l'enseignement et de la
connaissance, ainsi que de la musique. Elle réside (vatî)
sur un cours d'eau (saras), c'est le sens de
son nom. Cet archétype s'associe assez spontanément à Mâ
Anandamayî, qui a été toute sa vie vêtue de blanc, et
dont l'ashram principal et le tombeau sont situés au bord du Gange tout près d'Hardwar. Ce qu'il y a de particulier dans le cas de Mâ, c'est qu'il ne s'agissait pas d'une divinité vieille de
plusieurs millénaires et présente uniquement sur le plan subtil, mais d’une
personne bien vivante qu'on pouvait rencontrer si on le voulait. Dans ce
contexte, la transmission d'énergie était beaucoup plus puissante et concrète,
au moins pour les visiteurs ou disciples qui avaient l'ouverture requise pour
recevoir ce transfert.
Au début de cet ouvrage, nous avons traduit telle quelle la préface à
l'édition hindi. Elle est écrite dans le style fleuri de l'Orient et de la
bhakti. C'est certes un autre monde mental que celui de l'Occident rationnel
contemporain, mais pourquoi ne pas entendre ce qu'il a à nous dire de temps en
temps ? Surtout quand il y a contact direct, le coeur est touché et peut
transcender bien des barrières culturelles. Sarvâtma
était un des premiers disciples français de Mâ Amritânândamayî. Il avait très peur en France que sa
manière d'embrasser les gens pendant le darshan
et de leur distribuer des bonbons choque avec un public plutôt rationaliste et quelque peu coincé. En fait, rapidement, il y a eu de longues
queues pour passer dans les bras de celle qu'on appelle Amma,
et donc celle-ci s’est mise à se moquer de Sarvâtma
en lui disant : « Regarde donc tes Français ! Ils sont prêts à attendre des
heures simplement pour avoir un bonbon ! »
Quand on lit continûment le
livre, on s'aperçoit que Mâ revient souvent sur des
thèmes fondamentaux car elle voulait donner des bases au public général de
visiteurs qui venaient la trouver. Le classement par thèmes est intéressant
quand on veut méditer directement sur un sujet précis, mais il a l'inconvénient
de faire ressortir certaines répétitions. Cependant, celles-ci peuvent avoir un
effet ‘mantrique’ sur le lecteur : avec une
mouvement qu'on pourrait appeler en spirale, on revient régulièrement au même
point, mais à un niveau de profondeur plus grands. Mâ
conseille d’ailleurs le mantra comme une méthode accessible à tous, capable
d'accompagner le processus de transformation et de purification du sâdhaka à long
terme. Une bonne partie des conseils de son livre pourrait se résumer ainsi : «
Répétez votre mantra avec persévérance et une confiance complète dans le
gourou, et vous atteindrez un niveau où toutes les questions et les
contradictions seront résolues spontanément. » Cependant, il ne faut pas rester
sur une fausse impression de simplisme en lisant ce livre d'une traite. Dans
les entretiens privés, Mâ donnait bien d'autres
enseignements et exercices de méditation que le mantra. Quand j'ai demandé à Swami Vijayânanda qui, nous
l'avons dit, a passé plus de 30 ans sous la guidance directe de Mâ, s'il récitait le mantra quand il s'asseyait pour la
méditation, il m'a répondu que non. Par contre, quand il fait sa cuisine ou des
activités concrètes, il aime bien garder l'esprit relié à l’Absolu et à Mâ grâce au japa, mais quand il était assis en méditation, il aimait
bien suivre ses propres pratiques et leur évolution spontanée. Pendant toute la
période de début, il était dans l'idée qu'un gourou doit avant tout donner des
conseils de techniques de méditations, des kriyas,
et Mâ effectivement lui en a donné abondamment
lors d'entretiens privés. Cependant, à chaque fois qu'elle en expliquait
quelques-uns, elle ajoutait ; « Ceci est un exercice secret, ne
le répète pas. » Mâ
a expliqué aussi que les kriyas étaient faits
pour secouer la torpeur, le tamas. La plupart des gens sont somnolents,
mais c'est bon pour eux de faire quelque chose, que ce soit des kriyas ou des rituels. Cela leur donne un début de réveil. Cependant, à un niveau
élevé, la volonté de faire quelque chose se révélera être un obstacle. Mais ce
« non faire » n'est pas pour les débutants. Un autre aspect des kriyas, ou rituels, doit aussi bien être compris :
ils peuvent être destinés à éveiller des pouvoirs, comme les techniques de
toumo chez les tibétains qui développent la capacité de ressortir le feu
intérieur et donc de résister aux grands froids. Pour aller plus loin, on peut
évoquer aussi les pratiques de magie qui sont des formes de kriyas,
mais qui peuvent tourner à la magie noire. Au fond, quand la vie intérieure est
éveillée, la manière de méditer vient spontanément. On ne peut pas en faire une
généralité. Ce qui vous réussit à vous peut être inutile, voire dangereux pour
d'autres. Il en va de même pour les conseils que le gourou vous donne personnellement,
d'où l'avertissement de Mâ.
Dans ce sens, on dit dans la
kabbale qu'il y a trois niveaux d'enseignements, le niveau général
correspondant aux conseils que le maître donne à un petit groupe, le niveau
personnel dans sa relation à un disciple en face-à-face, et le niveau supérieur
sous forme d'expériences qui remontent spontanément chez le disciple, mais qui
n'en sont pas pour autant étrangères à la présence du maître. Vijayânanda ajoute que les kriyas
ne sont pas si importants, la voie spirituelle dans son ensemble est beaucoup
plus large qu’une sorte de technologie où la révélation d'un code secret
pourrait vous ouvrir l'accès à tous les programmes d’un coup. Cette voie
spirituelle nécessite un engagement complet de l'individu : il est bon déjà
d'avoir une base large de lectures et de connaissances pour comprendre vraiment
quel est son intérêt, et ensuite de s'impliquer dans une pratique destinée
d'emblée à transformer toute la vie et le comportement concret. Cela est
beaucoup plus large que l'exécution plus ou moins mécanique de certaines
techniques méditatives supposées secrètes et toutes-puissantes.
Il est tout à fait classique en
Inde d'insister sur l'abandon entre les mains du gourou. Ceci choque les
occidentaux qui ont d'ailleurs souvent perdu le lien avec la spiritualité
traditionnelle chrétienne qui insiste elle aussi à sa manière sur l'importance
du maître spirituel et du voeu d'obéissance pour les moines. « Être comme un
cadavre dans les mains du laveur de mort » disait par exemple Ignace de Loyola. J'ai essayé d'éclaircir ces questions dans mon
premier ouvrage, Le maître et le thérapeute, qui parle de la relation
d'aide à la fois spirituelle et psychologique. De son côté, Swami
Vijayânanda a tendance à distinguer deux niveaux, le
niveau concret où il obéissait à la lettre aux paroles de Mâ,
justement pour le plaisir en quelque sorte de montrer qu'il était capable de
faire ce qu'elle lui demandait, et un niveau plus profond où il gardait tout
son discernement et sa liberté. Mâ ne semble pas avoir été choquée par son attitude,
constatant sans doute qu'elle relevait plus de la voie de la connaissance que
de celle de la dévotion. Dès leur premier entretien à Bénarès en février 1951,
elle avait d’ailleurs constaté et dit de lui qu'il était un pranava
upasaka, littéralement un ‘adorateur du Om’, c'est-à-dire quelqu'un
qui suivait la voie de la connaissance. Dans ce sens, elle ne lui a jamais
demandé par exemple de faire de poujâ ni de centrer sa dévotion sur la forme d'une divinité
hindoue.
Mâ
disait d'elle-même qu'elle n'était pas une réformatrice, qu'elle avait pris
l'hindouisme comme il était, et qu'elle ne faisait que transmette
l'enseignement de l'Inde ancienne et des rishis-munis de jadis. Elle a accompli cette tâche avec un souci de
la perfection et en transmettant tout autour d'elle une énergie indubitable
d'amour et de joie.
Vigyânânand
Kankhal, Hardwar,
Inde, mars 2009
Introduction
à
la version hindi de ‘Vangmayî Mâ’
Les mots prononcés
par les lèvres vénérées de Sri Mâ – Mâ qui habite le coeur de tous, Mâ
qui est pure et éternelle – ces mots de Sri Mâ sont
une manifestation particulière de la
Mère divine en tant qu’Essence de la parole. Tout au long de Sa Lîlâ (son jeu) en ce monde, Mâ
s’est communiquée dans la pureté de Ses paroles. Avant que ne s’achève Sa Lîlâ ici-bas, Mâ a donné
une idée de ce qu’est l’appel du non-manifesté. Dans
le présent, Mâ brille de son éclat dans les mots de
la Katha Upanishad :
On se libère
des serres de la mort lorsqu’on connaît Cela qu’on ne peut entendre ni toucher,
qui est incolore et inaltéré, qui est sans goût, éternel, inodore, sans commencement ni fin, qui est distinct de
Mahat [l'espace primordial] et toujours constant.
Mâ a
dit : « Je viens à votre portée, mais je ne vous permets pas
de m’accaparer ». Les paroles reviennent et l’esprit ne peut s’en
emparer, comme on dit dans une Upanishad :
yatho vacha
nirvartante aprapya manasa saha
Durant
l’accomplissement de Sa Lîlâ, dans cette
sphère qui est à notre mesure – Mâ s’est présentée
Elle-même – dans la forme humaine de la mère – la Lîlâ
de Sri Mâ Anandamayî. Elle
était l’âme de Ses disciples et la grâce personnifiée. Elle était d’une douceur
sans pareille et cette douceur masquait Sa divine grandeur. Sa céleste
magnificence allait au-delà de toute imagination. Sa Lîlâ
était le Râs, l'essence, la sève de l'expérience
personnifiée. Quelques rares personnes ont le bonheur d’être en mesure de
visualiser, aujourd’hui encore, [dans leur mémoire] l’irréprochable Lîlâ de Mâ – la Lîlâ dont il faut faire l’expérience pour la
conserver gravée dans la conscience. Mais alors quel est l’état d’être, la
condition, de ces innombrables âmes ordinaires qui ne jouissent pas de cet
incomparable privilège, qui n’ont jamais rencontré Mâ ? En effet, les premiers, tous ceux qui ont vécu à
l’ombre apaisante de l’amour et de l’affection de Mâ
– la mère tendre et douce dans la forme humaine, ceux qui ont grandi sous Sa
protection, sous Sa discipline aimante et chaude, tous ceux-là, ressentaient
que la présence toute proche de Mâ, était la plus grande consolation durant les
temps de détresse et de souffrance qu’ils connaissaient. La chance inestimable
de ces êtres, de ces disciples de Mâ, aurait-elle
pris fin ? Non ! Le privilège extraordinaire d’avoir vécu aux côtés
de Mâ s’est peut-être évanoui, quelque part dans les
méandres du passé, mais les paroles de Mâ, elles,
sont là, dans la forme écrite. Elles sont là, dans le présent. Et elles seront
là aussi dans le futur.
Une force
rayonnante et l’image ineffaçable de Son geste offrant des guirlandes de
mantra, ce sont là d’inoubliables et merveilleux souvenirs de Mâ. Les paroles de Mâ sont la
source d’un intarissable nectar. La publication de ce livre, bénie par la
caresse transcendante de ce ruissellement, est le fruit d’un effort dont on
souhaite qu’il mène à un bain purificateur. Mâ n’a
écrit aucun livre. Les mots qu’Elle prononçait venaient d’Elle, mais ne Lui
appartenaient pas. Le nectar de Ses paroles jaillissait spontanément. Il
contenait la réponse aux questions de Ses innombrables disciples qui
souffraient des trois tourments [qui viennent de soi, des phénomènes naturels
et des dieux, une classification habituelle dans l'hindouisme] que nous, les
êtres humains, sommes condamnés à endurer en ce monde. Nous avons réuni, dans
cet ouvrage, un certain nombre des paroles de Mâ.
Mâ Anandamayî
manifeste la Mère divine qui est l’âme du bîja-mantra
(mantra-semence), qui a porté à la lumière les Vêda (Ecritures sacrées), qui est omniprésente, qui
est dans la forme du Pranava [le Om].
Les paroles d’une telle Mère expriment l'essence des Védas. Les mots de Mâ imprègnent l’univers tout entier. Elle règne dans
l’océan de l’esprit agité de Ses disciples, sous forme de vérité et de paix éternelle.
Qui donc sont les
sources concrètes de ce témoignage – ce livre, en l’occurrence – qui est la
manifestation du svarûpa, de l'essence de Mâ ? Ce n’est ni la pierre, ni le métal, ni le bois.
Ce n’est ni la boue, ni la pluie. Les mots, ce ne sont que les mots. Filtres de
nectar engendrés par les paroles physiques de Mâ. Les
source essentielles du présent ouvrage sont « Ânanda Varta » (journal trimestriel du mouvement de Mâ publié depuis 1952
et qui a recueilli jusqu'à ce qu'elle quitte son corps en 1982 ses
faits, gestes et dires lors de ses nombreuses déplacements et interventions
publiques), Matri-Darshan de Bhaiji, ainsi que les enregistrements de quelques
conversations, dans lesquels on peut entendre les paroles de Mâ, que l’on peut
retrouver également couchées sur le papier dans les livres. Quand on lit ‘Vangmayee Mâ’ d’une voix claire,
il s’agit de quelque chose qui peut être vu aussi bien qu’entendu. Il n’est pas
indispensable d'effectuer comme un rituel d'insufflation de vie à une statue
pour la rendre consciente, ce qu'on appelle Pran-pratishtha
C'est l'énergie même contenue dans la forme lumineuse de Mâ
qui infuse son énergie à toutes ses paroles.
Nous tous, dans
notre élan vital, déposons l’offrande
de nos prânam (prosternations) aux pieds de Mâ.
Le fils dévoué de Mâ, Bhaiji, devant lequel nous
devrions nous incliner chaque matin, nous a enseigné cette obéissance dans son
livre rempli de science spirituelle, « Matri Vandana ».
A ce sujet, nous nous devons de citer quelques mots de Mâ
concernant Bhaiji : « Bhaiji avait coutume de dire, à tout
propos, que celui qui suivait pleinement et consciencieusement les conseils de Mâ, finissait par récolter les fruits de centaines d’années
de sâdhanâ. En ne faisant que cela : suivre les
conseils de Mâ. Bhaiji a
vécu près de ‘ce corps’ avec cet intime sentiment (bhâva). »
Nous publions cet
ouvrage à la mémoire de Bhaiji. Il fut la première
personne à nous guider pour ce qui est du recueil et de la mise en ordre des
paroles de Mâ.
Pour faciliter la
lecture de ce livre, nous nous sommes efforcés, autant que faire se pouvait,
d'en classer la matière sous différentes rubriques. Nous avons tenu compte,
pour cela, des thèmes développés que nous avons placés dans des chapitres
spécifiques. Il est possible toutefois, dans le cas précis des paroles de Mâ, que la solution adoptée ne soit pas idéale. En effet,
selon l’avis de différentes personnes, cette disposition par catégories risque
d’engendrer une certaine confusion, voire une interprétation erronée des
textes. Et cela parce qu’un même mot de Sri Mâ peut
être interprété de différentes façons, et, selon le niveau du lecteur,
engendrer dans l’esprit de celui-ci, d’étranges vibrations. Les paroles de Mâ peuvent être classées de diverses manières. Certains
mots, inclus dans une catégorie donnée, pourraient induire le lecteur en erreur
et créer une certaine confusion au lieu de le mettre sur la juste voie. Il
était préférable, dans cette situation de perplexité, d’invoquer la protection
de la déesse du langage, Vangmayee Mâ et de revoir l’ensemble du projet, du début à la fin. De
tout cela devra ressortir pour le lecteur le fait que Mâ
est présente dans chacun des mots qu’Elle prononce, elle qui n’a aucune
attente, elle qui est l’éternelle Mère Ananda-Mayî.
Même si la disposition par catégories effectuée par le rédacteur n’a pas
d’intérêt pour certains lecteurs, la recherche et l’étude en elle-même, quand
on s’est placé sous la protection de Mâ, seront
bénéfiques. En fin de compte, le mantra « il progresse » (charaiveti) sera celui qui mène à la victoire.
L’étude et la recherche constituent l’âme de la sâdhanâ.
Quand on s'y est vraiment plongé, les paroles qu'on y étudie deviennent comme
les siennes propres.
Mâ a dit : « L’océan
est dans la goutte, la goutte est dans l’océan ». C’est là le vrai
principe éternel, tellement difficile à saisir et sujet à tant
d’interprétations et de manifestations selon le moment et la situation. Tout
d’abord, quelle est la signification de ce principe en ce qui concerne les
paroles de Mâ ? Que veut dire Mâ lorsqu’elle affirme que « l’océan est contenu dans
la goutte » ? Dans chacune des paroles de Mâ
est contenu comme son thème central, son essence, l'océan de la Parole divine. Et
ensuite, quel est le sens des mots « une goutte dans l’océan » ?
Depuis l’aube des temps, les vibrations de tous les sons existants (manifestés
ou non manifestés) y compris les sons grandioses et puissants, sont
essentiellement mesurables comme des accumulations de grand homme énergétique.
En d’autres termes, chaque son et chaque parole sont de la nature de l'énergie.
Ce livre de
paroles de Mâ en hindi est traduit d'un original
bengali.
Le livre Vangmayee Mâ,
traduit de l’anglais en français récemment par Jean E.LOUIS, est disponible
chez Geneviève Koevoets (Mahâjyoti)
qui en a fait l’illustration :
7 Bd du Parc impérial
06000 Nice
Pour la somme de 20€+ 4€ de frais d’envoi.
PAROLES DE CONSOLATION
MENANT A L’ABSENCE DE PEUR
Début de Vangmayee Ma, receuil
de paroles de Mâ, classées par thèmes
Mâ est là.
Pourquoi s’inquiéter ?
Il y a ceux qui
sont incapables de faire quoi que ce soit, ceux qui n’ont aucun soutien dans la
vie spirituelle. C’est de ceux-là surtout dont j’ai besoin.
Si, le coeur empli
de foi et de vénération, tu peux dire ne serait-ce qu’une seule fois
« Oh ! Mâ, venez je vous en conjure, que
mes journées ne se passent pas sans Vous ». Alors, assurément tu auras le darshan
de Mâ, Elle apparaîtra devant toi dans Sa forme
réelle et te serrera affectueusement sur Son coeur. Ne L’invoque pas uniquement
lorsque tu es en proie à la détresse, en La considérant comme une protection
magique ou un refuge momentané. Souviens-toi, Elle est toujours présente et si proche,
qu’Elle est comme ton élan vital. Elle te soulagera de ton fardeau.
En vérité, Je suis
toujours avec vous.
Vous vous demandez si ce que vous sentez arrive jusqu’à ce
corps, n’est-ce pas ?
Oui, oui, oui.
Ce corps aussi
n’est qu’une petite fille impatiente que vous ne pourrez pas renvoyer, même si
vous le désirez. Elle n’est jamais partie et ne partira jamais.
Ayez foi en ce
corps. Seule une foi complète vous ouvrira les yeux.
Acceptez ce qui
est bénéfique, (shreyas) rejetez ce qui ne
fait que procurer du plaisir (preyas). Une
aide propice va se manifester à coup sûr.
Un doute prend
forme dans votre esprit – pourquoi la sâdhanâ
progresse-t-elle aussi lentement ? Père, amis, vous savez que lorsque vous
souffrez du ventre, le médecin commence par vous administrer un purgatif pour
vous nettoyer les intestins. Ce n’est qu’après qu’il vous donne les
médicaments. D’innombrables actions ont été accomplies durant cette vie et
durant les vies précédentes. Aussi longtemps que leurs effets n’auront pas été
épurés, le progrès dans la sâdhanâ sera lent.
Une fois que le corps et l’esprit seront purifiés, le médicament, sous forme de
nama-japa, fera son effet. Aucun d’entre vous
n’a progressé jusqu’à ce point. Alors continuez à agir – qui sait quand viendra
le moment propice ?
L’accomplissement
ne s’obtient que si on le demande. Mais la requête ne devrait se faire qu'avec
un esprit sincèrement et complètement uni à la parole.
Ce corps est
partout. Pour chacun.
Je ne vous
abandonne jamais. Je suis toujours avec vous.
Vous avez eu
suffisamment du jeu de l'intelligence durant votre vie. Victoire ou défaite,
peu importe, tout cela appartient au passé. Même si c'est seulement une fois,
réalisez que vous n'avez pas d'autres aides, regarder vers Lui et jetez-vous
sur Ses genoux. Vous n'aurez pas à vous soucier de quoi que ce soit d'autre.
Notre mère universelle Mâ Anandamayî
Personnification de l'amour de la
compassion
Par Brahmacharini Kumar Chitra Ghosh
Chitra
a été une assistante proche de Mâ Anandamayî.
Originaire de Calcutta, elle est revenue vivre dans ses ashrams après avoir
fait un doctorat aux États-Unis. Le texte ci-dessous est une contribution à
l'ouvrage ‘Mâ Anandamayî -
incarnation de l'héritage spirituel et culturel de l'Inde’, publié en anglais
par la Sangha de Mâ pour la Samyam
Sapta de novembre 2005. Il s'agit d'un ouvrage de 120
pages qui réunit une trentaine de contributions brèves de personnes qui, en
général, ont connu Mâ Anandamayî
de près.
En mai 1961, Mâ était à Bombay dans la propriété de feu Shri BK Shah, qui était le président de la Sangha d’Anandamayî. Tous les fidèles le Mâ
le connaissent sous le nom de Bhaiya [grand
frère]. Mâ résidait au milieu de son jardin dans une
maisonnette de bois ressemblant à une pagode. [Cette maisonnette a été démontée
lors de la vente de la propriété de Bhaiya après son
décès et a été réinstallée dans le jardin de l'ashram de Mâ
à Kankhal].
Bhaiya
avait fait la demande à Mâ de rendre visite à Gopinath Kaviraj au Tata Memorial Cancer Institute, où
il se remettait d'une opération risquée pour cancer. Gopinath
était l'un de ces philosophes chez lesquels une grande érudition et un savoir
élevé étaient combinés avec une spiritualité profonde et une aspiration sincère
pour expérimenter les vérités exposées dans les doctrines philosophiques.
Gopibaba
– comme Mâ l’appelait – devait bientôt quitter
l'hôpital et Bhaiya a demandé instamment à Mâ d'avoir le kheyal de le
visiter le jour même de sa sortie. Mâ a donc demandé
à Bhaiya d'organiser cette visite. Les docteurs, les
infirmières et le personnel de l'hôpital étaient très désireux d'avoir le darshan
de Mâ. Ils étaient surpris de la guérison miraculeuse
de Gopibaba après une invasion dangereuse de cancer à
un âge tellement avancé. On fixa une date et j'ai eu la chance rare, et surtout
la grâce de Mâ de l’accompagner avec Bhaiya et Swami Paramânandaji pour la visite à l'hôpital.
Quand Mâ
a pénétré dans la chambre de Gopibaba, il était déjà
tout préparé pour quitter l'hôpital avec elle. Les docteurs et les infirmières
avaient formé une ligne pour accueillir Mâ avec des
guirlandes. Elle les a acceptées, mais leur a retourné les malas
après les avoir bénis. Néanmoins, elle a mis de côté une grande guirlande de
roses rouges. On a offert aussi à Mâ un panier de
grosses pommes rouges. Elle les a distribuées et en a mis deux de côté. Elle me
regarda et me demanda de conserver la guirlande de roses rouges et les deux
pommes, en disant en bengali Rakho parey lagbe c'est-à-dire : « Garde-les
pour être distribuées plus tard ! »
À ce moment-là, Mâ, de sa voix douce débordant de compassion, remercia les
docteurs et les infirmières pour leur service envers Baba, désintéressé et
infatigable. Ils lui répondirent tous : « C'est votre bénédiction, votre kheyal [intuition spirituelle sûre] et votre grâce
qui a sauvé miraculeusement Baba – nous n'avons été que les instruments de Dieu
– rien d'autre ! » Sur ce, j'ai entendu une voix faible, comme en train de
pleurer et de prononcer trois fois ha Allah ! Je me suis rendu à la porte de la chambre d'à
côté et j'y ai jeté un coup d'oeil. Pendant ce temps, Mâ
supervisait l'organisation du voyage de Baba en chaise roulante. À l'intérieur
de la chambre d'à côté j'ai vu un musulman arabe, un patient cancéreux, avec
une barbe brune, étendu à plat sur son lit. Son corps était tellement émacié
qu’il ressemblait à un squelette. Le milieu de sa poitrine était affaissé, et
des larmes de douleur aiguë et de souffrance coulaient sur ses joues creusées.
Il était secoué régulièrement de hoquets. De temps à autre il prononçait
faiblement Ha Allah ! Ses yeux étaient fermés. L'infirmière qui
s'en occupait me dit qu'il était un cancéreux au stade terminal.
Je retournai près de Mâ. Elle se rendit dans le couloir vers les ascenseurs avec
Gopibaba et sa troupe de docteurs et l'infirmière.
Soudain, elle revint en arrière et sans un mot, marcha fermement vers la
chambre du patient arabe musulman. Bhaiya semblait
déconcerté, Paramânandaji semblait serein ; les
autres et Gopibaba étaient fascinés et s'arrêtèrent
simplement en route, stupéfaits !
Je suis rentré avec Mâ dans la chambre du patient arabe. Bhaiya
et tous les autres se tenaient à l'extérieur. Mâ dit
en souriant : « Baba, je suis venu à vous, regardez-moi ! ». En disant ceci,
elle caressa la poitrine déprimée de ce cancéreux au stade terminal, trois
fois, avec un toucher rempli de compassion douce et de félicité céleste. J'ai
senti qu'en faisant ceci elle était en train de lui donner la libération des
liens humains et des filets de la mortalité. Ensuite elle lui essuya les larmes
qui coulaient en abondance avec le coin de son pagne. Puis elle saisit la
guirlande de roses rouges de mes mains et la plaça autour de la nuque du patient musulman. Peu après, elle me
prit l'une des deux grosses pommes et la déposa entre ses mains jointes. Quant
à l'autre, Mâ la donna à l'infirmière. Maintenant le
patient ouvrit lentement les yeux et fixa Mâ avec un
long regard plein de gratitude – il prit sa main et la plaça sur sa propre
tête. Mâ lui fit un geste signifiant qu'il devait
continuer à répéter son mantra du Coran. Ils eurent un échange prolongé de
regards. Elle resta auprès de lui cinq minutes – ses yeux ressemblaient à des
rayons X qui regardaient à travers lui comme si elle pouvait être le témoin de
son passé, de son présent de son futur en un seul instant. Je me mis à pleurer,
en voyant cette union spirituelle du véritable fidèle et de Dieu au-delà des
distinctions de castes, de credo, de religions et de nationalités. Mâ savait que c'était son premier et dernier darshan.
Elle s'en alla à reculons, au lieu de se retourner, afin que le patient puisse
la voir jusqu'à ce qu'elle soit sortie de la chambre. Les docteurs lui dirent
que ses jours étaient comptés. En effet, le lendemain je pris l'initiative de
demander à Bhaiya de se renseigner pour savoir quel
était son état de santé. L'après-midi, il me dit que le patient était décédé la
nuit même paisiblement. Je me précipitai pour annoncer la nouvelle à Mâ, mais avant que je n’ai pu ouvrir la bouche elle me dit
en bengali : Arab desher
Baba chole gacchay « Le baba des pays arabes
est parti ! »
Ainsi, la grâce de Mâ qui n'avait même pas été sollicitée (ahetuki
kripa) a hâté son retour dans le séjour du
royaume des cieux, où on trouve une paix perpétuelle. Le baba arabe s'était
éteint.
Seulement Lui (le
Divin) sait à qui Tu (Mâ) te révèles
et une fois que vous L'avez connu vous devenez un
avec Lui.
(Ramayana de Tulsidâs)
Mâ Anandamayî,
embodiement of India’s Spiritual and Cultural
Heritage, p.110
Mâ Anandamayî Sangha Kankhal 249408 Hardwar Uttarakhand
Inde, 2005
INDRA LILA,
Le jeu d'Indra ou le mental illuminé.
A VIGYANANANDA
et aux amis de Cilaos
Joëlle
Coiret est venue participer à une retraite sur
l'écoute du silence à l'île de la Réunion animée par Vigyanânanda,
dans le cirque de Cilaos, pendant les quatre jours du week-end de l'Ascension
2009. Pour meubler ce silence, des orages tropicaux et le tonnerre étaient au
rendez-vous, se réverbérant sur la falaise de 1000 m de dénivelé qui mène au
Piton des neiges, se dressant juste en face du lieu du stage. Ceci lui a
inspiré le poème ci-dessous. Joëlle vient de prendre sa retraite de professeur
de littérature française, et aime bien venir marcher en Himalaya.
Les premiers jours,
loin de nous déplaire,
Indra, dieu des
orages et de l'atmosphère,
Nous isola sous une coupole
De pluie continue et
de vent fol.
Incarnant
l'exubérance de la vie,
Armé du vajra pour vaincre l'ennemi,
-Notre mental
vaniteux ou dispersé-,
Il éclaira nos âmes
de paix.
Il envoya aussi le
tonnerre
Et ses résonances
extraordinaires
Pour révéler de
l'espace l'immensité,
Au-delà de Cilaos,
dans ses remparts, enfermé.
Surya rivalisa avec lui:
L'Indra-danush, l'arc-en-ciel en sanskrit,
Dans ses magiques
apparitions
Inspira de poétiques
méditations:
L'arc du silence
lançait allègrement
La flèche de nos
âmes visant
La cible
éternellement présente du Soi,
Et les coeurs
glorieux vibraient d'une joie,
Qui se répandait en
ondes illimitées
Jusqu'aux frontières
de l'Incréé.
a)Vajra: -foudre;
-objet utilisé dans les rituels
bouddhistes, symbole de l'illumination. Chez les Tibétains, le dorje représente l'Absolu, l'unité au-delà des opposés, la
force.
b)Danush: arc, symbole de la conscience
et de la détermination.
Joëlle COIRET.
Ascension.
Mai 2009
Cilaos,
Ile de La Réunion
A MA VIEILLE
AME
(Confession à Mâ… dans
l’avion pour l’Inde)
Par Mahâjyoti
Ma vieille âme est déjà
partie !
La blonde aux yeux bleus
est restée
Près de Mâ…afin de déjouer
Les pièges et ruses de la
vie…
Ma vieille âme est un
vieux barbu
Etait-ce un Sage ?
Un vrai Mystique ?
Elle donne un contraste
un peu cru
Avec ma blondeur
dynamique.
Ma vieille âme comprend
trop de choses
Son magnétisme, ses
vibrations,
Comme un cri en mon ‘moi’
se posent
Et on me pose des
questions…
Car la blonde demeure
incomprise
Pour qui ne sait pas lire
au fond
Et pourtant son ego se
brise
Au cœur de sa méditation.
Elle sait combattre pour
de bon
Lorsqu’en titubant elle
avance
Elle sent, telle une
imprégnation,
La lumière et
l’impermanence…
L’avion a pris de
l’altitude
L’Inde est au bout de son
chemin
Le silence et la solitude
Désormais lui tiennent la main.
Un jour en rencontrant
‘quelqu’un’
Elle eut la notion du
Divin…
La blonde pourra
rejoindre enfin
Ce vieux qui est parti si
loin….
Ce vieux qui dirigea sa
vie
Voyez, je vous l’avais
bien dit :
Ma vieille âme est déjà
partie…
Pourquoi n’avez-vous pas
compris… ?
Geneviève KOEVOETS
(Mahâjyoti)
"Le pessimiste
voit des difficultés dans chaque opportunité...
L'optimiste voit
des opportunités dans chaque difficulté..."
Nouvelles
- A Kankhal
ce mois d'août 2009, nous avons eu pour neuf jours un groupe de 27 Français
venus faire retraite auprès de Swami Vijayânanda. Dinesh et Vigyanânanda se sont occupés de leur séjour, auparavant ils
ont fait une visite de trois jours de Bénarès et ensuite rencontré Swami Jñanananda et Chandra Swami dans la région de Dehradun, en plus d’une visite de Rishikesh.
Le voyage a duré en tout trois semaines
- Swami Nirgunânanda a
animé une retraite de huit jours au Rosaire, une institution religieuse dans
les environs de Bruxelles, qui a été suivie avec intérêt par les francophones.
La retraite a été organisée par Paul et Christine Neefs.
Swamiji a préparé une traduction avec commentaires
des lettres de Mâ à Pran Gopal Mukerjî, Paul a déjà fait
la traduction française des lettres, une publication est prévue dans le Jay Mâ à partir du prochain numéro. Nous avions déjà publié
quelques lettres de Pran Gopal
il y a plusieurs années dans ce même Jay Mâ.
- Vigyanânanda est de retour maintenant à l’ermitage
de Dhaulchina et à plus long terme pour deux ans en
Inde, après quatre mois et demi de séminaires et conférences qui l'ont amené en
France, Belgique, Suisse, Italie (pour un congrès de la Fédération italienne de yoga près de
Venise), et cinq semaines à la Réunion, avant de revenir à Kankhal
pour la retraite d’août auprès de Swami Vijayânanda.
Nouveaux
abonnements
Les
nouveaux abonnements par email, pour deux ans, sont en cours. Ils iront de Mars
2009 à Mars 2011.La souscription peut être réglée dès maintenant en envoyant
comme d’habitude la somme de 8 € (soit 1 euro par exemplaire trimestriel) par
chèques à l’ordre de Jacques VIGNE, à : José SANCHEZ-GONZALEZ – (nouvelle
adresse depuis Novembre 2008) :
10 rue
Tibère - 84110 VAISON-LA-ROMAINE – nagajo3@yahoo.fr - 06 34 98 82 22 - qui conservera la partie administrative. Prière
d’aviser ‘ensuite’ (une fois le paiement effectué) par email ou par téléphone :
Geneviève Koevoets (Mahajyoti)
koevoetsg@wanadoo.fr
pour qu’elle poursuive les envois, car c’est elle
qui s’occupe, bénévolement, de la partie artistique, littéraire, de la mise en
page, et des envois par emails ainsi que des illustrations. Pour ceux qui
souscriront en retard ou en cours d’année, elle leur enverra les numéros arriérés
afin qu’ils soient à jour de leur abonnement complet.
C’est une
aide qui va à PANUDA à Bénarès, pour soutenir les éditions indiennes de « Amrita Varta ». (Panuda sert Mâ depuis plus d’un
demi siècle et dirige son hôpital).
Table des matières
Paroles de Mâ, extraites
de ‘Vangmayee Ma’
Dialogues avec Mâ, extraits
de ‘La saturée de joie’ de Jean-Claude Marol
Préface au recueil de paroles de Mâ
‘Vangmayee Ma’, par
Vigyânânanda
Introduction à la version hindi de ‘Vangmayî
Mâ’
Paroles de consolation menant à l’absence de peur, extraites de ‘Vangmayee Ma’
Notre mère universelle Mâ Anandamayî, par Brahmacharini Kumar Chitra Ghosh
Indra Lila, le jeu d’Indra ou le mental illuminé, par Joëlle Coiret
A ma vieille âme… par
Geneviève Koevoets (Mahâjyoti)
Nouvelles
Nouveaux abonnements
Table des matières
[i] Publié en 1996 par les éditions Terre du Ciel,
maintenant épuisé, mais disponible sur le site www.anandamayi.org , section française.
[ii] Disponible sur le même site pour toute la
première partie qui parle de la vie de Mâ jusqu'à
environ 35 ans.