Jay Mâ n° 92 printemps 2009






Vangmayî Mâ - La mère constituée de Parole

Traduit de l’anglais par : Jean E. LOUIS



Nous publions sur le site de Mâ www.anandamayî.org un nouveau livre de pensées de Mâ classées par thèmes et traduites du bengali. Il est intitulé Vangmayî Mâ. Vang-mayî signifie ‘pénétrée de parole’, c'est-à-dire imbibée de l’énergie de la parole. Vang, ou Vak est non seulement la parole, mais la plus grande déesse des Védas, fille de Brahman ; c’est par elle que l’énergie créatrice se propage dans le monde. L'édition française de ce livre est prête, et devrait être mise en ligne rapidement. Quant à l'édition anglaise et espagnole, nous espérons qu'elle suivra d’ici un ou deux mois sur le même site. Nous commençons pas reproduire un des premiers chapitres de cet ouvrage pour en donner une idée, puis nous reproduisons l'introduction qu'en a écrite Jacques Vigne après avoir discuté de certains points avec Swami Vijayânanda. D'autres chapitres suivront dans les prochains numéros. Swami Bhaskarânanda, auquel Mâ avait confié la charge de l'initiation en son nom de son vivant, a beaucoup insisté pour la traduction de cet ouvrage du bengali en anglais, pensant qu'il était bon de revenir facilement, grâce à cette anthologie, à ce que Mâ disait directement






La Nature du Manque



Chapitre 14

L’être humain se manifeste sous la forme du désir, du manque [en anglais, want, en hindi et sanskrit, a-bhav]. Il n’a que le désir, le manque en tête. Et lorsqu’il s’en va, c’est encore avec le désir, le manque en lui. C’est pourquoi il devrait méditer sur sa propre nature. Autrement : désir – inactivité – indolence – malheur – mort. [Le soi dans le soi [nijiti nijai, on doit se livrer à l’introspection]


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A l’heure qu’il est, vous tous êtes en état de désir, de besoin, et c’est là maintenant votre vraie nature. Lorsque vous avez faim vous ressentez un besoin. Après avoir satisfait cette faim, la sensation de besoin disparaît. Puis vous éprouvez le besoin de dormir. Et lorsque vous vous réveillez vous avez envie de prendre l’air ou de bavarder. Les désirs-manques se présentent les uns après les autres et ne vous quittent pas un instant. Ainsi votre existence se passe dans le désir et le besoin. C’est ce que le corps considère comme des besoins naturels. L’homme a en lui la capacité de vivre dans sa vraie nature, sa vraie forme, sa vraie vie. De même qu’il y a le voile de l’ignorance, il y a la porte de la connaissance. C’est en passant cette porte que l’homme retourne vers sa vraie nature et retrouve son état véritable.

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Dans ce domaine d’un monde imaginaire, d’un côté votre corps est soutenu, tandis que de l’autre, derrière le voile, les actions [du Divin] se déroulent.

Vous êtes nombreux à vous montrer sous différentes formes, avec différents sentiments. Qu’est-ce donc, si ce n’est la destruction du désir-manque sous toutes ses formes ? Dans l’univers, si c’est vous qui donnez et qui prenez, vous qui éprouvez le sentiment du désir, alors cette action est en fait la vôtre.

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Là où vous voyez votre Soi en toutes choses et que vous vous efforcez de ne voir que « Cela » en quelque existence que ce soit, en quoi la vision est-elle différente de ce qui est vu ? Le dessein d’un entretien, d’une discussion, d’une controverse, comme également celui de l’état de besoin, de manque, est en fait d’obtenir cette connaissance directe. Soyez éveillé dans votre propre nature.

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Plus nous passons de temps à honorer Dieu, plus sera grand l’avantage que nous en tirerons. Où il y a le monde, il y a le désir-manque. C’est là sa nature. On ne peut qu’espérer la paix en déposant notre esprit à Ses pieds, de notre plein gré ou de quelque autre manière que ce soit.



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Lorsque la question est incomplète, vous n’obtenez pas la réponse escomptée. N’est-il pas fastidieux de renouveler la question ? C’est dans la nature des choses que de connaître le malheur. Le monde est ainsi fait, n’est-ce pas ? Le désir insatiable des choses de ce monde engendre la souffrance. Bien sûr vous pouvez en tirer un plaisir passager, et ensuite ? Il est du devoir exclusif de l’homme de demander ces choses dont l’obtention n’entraîne pas la souffrance et à travers lesquelles survient toute réalisation.


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Les actions elles-mêmes créent un sentiment de manque. Seules de nouvelles actions effaceront cette sensation de manque. Il appartient à chacun de s’efforcer d’atteindre sa propre plénitude. En jouissant des objets mondains, on glisse peu à peu dans la mort. Père, deviens celui qui boit le nectar [a-mrit, littéralement "immortel"]. Jouis de l’immortalité. Sur cette voie-là il n’y a ni mort, ni maladie.





Préface

au livre Vangmayî Mâ

par Vigyânânand ( Dr Jacques Vigne)



C'est dans l'Himalaya, à l'ermitage de Dhaulchina, situé au nord-est de Delhi dans l'angle de l'Inde entre le Tibet et le Népal, que j'ai pu avoir connaissance du texte anglais non encore publié de Vangmayee Ma (ou Vangmayî Mâ)Il s'agissait de la traduction à partir du bengali d'un recueil assez fourni de paroles de Mâ classées par thème. J’ai reçu ce texte de Swami Nirgunânanda, mon voisin dans ce bel ermitage où il vit depuis 22 ans, Il a effectué lui-même une bonne partie des traductions à partir du bengali, et a travaillé avec une autre personne qui elle était partie de la version en hindi, nécessairement moins précise puisqu'elle était elle-même déjà une traduction de l'original bengali. Nous avons décidé de publier ces paroles de Mâ à la fois en français et en espagnol pour mettre sur le site de Mâ Anandamayî. C’est Jean E.Louis de Nice qui s'est chargé de la traduction française, que j'ai révisée, en discutant un certain nombre de points peu clairs dans le texte anglais avec Swami Nirgunânanda à l'ermitage. À chaque fois, il est revenu à l'original bengali, nous avons discuté de ce qu’a vraiment voulu dire Mâ, et cela a permis d'améliorer certains points obscurs de la traduction anglaise, et de les rendre plus clairement à la fois en français et en espagnol. Pour cette dernière version, c'est Andrea Veselich qui s'en est chargé. Jeune avocate passionnée par l'Inde, elle ne vit cependant pas tout près, puisqu'elle réside en Patagonie, la pointe sud de l'Argentine près de la Terre de feu... Mais grâce à l'internet et à sa bonne volonté car elle ressent un lien fort avec Mâ, elle a pu rendre ce service de traduction au lectorat hispanophone intéressé par la sagesse de l'Inde.

Swami Vijayânanda qui a passé plus de 30 ans auprès de Mâ Anandamayî, et vit toujours dans ses ashrams après 57 ans continûment en Inde, dit clairement et fortement : guru vakya mantra, ‘la parole du gourou est un mantra’. Dans la Guru Gita, il est aussi une strophe célèbre où il est dit mantra-mulam guru-vakyam, ‘la racine du mantra, c'est la parole du gourou’. La qualité principale du gourou n'est pas de donner un enseignement intellectuel et linéaire, mais d'avoir un impact par une transmission de l'énergie, ce qu'on appelle dans le langage traditionnel le shaktî-pat. Il peut le faire à travers un mantra chuchoté dans l'oreille au moment de l'initiation rituelle, mais aussi à travers n'importe quelle autre parole survenant dans n'importe quelle autre circonstance, à travers le don d'un objet, d'une fleur, d'un prasâd, et encore, sans aucun intermédiaire (anupaya), de façon directe, d’âme à âme. Du trop-plein de ce réservoir d'énergie qu’est le gourou, le manque du disciple peut être comblé.

Pour bien comprendre comment Mâ transmettait l'énergie, il ne suffit pas de lire ces paroles, mais il faut également se plonger dans sa vie et dans les expériences de ses disciples proches. Nous avons traduit en français sous le titre de Matri Darshan, (publié en 1996 par les éditions Terre du Ciel, maintenant épuisé, mais disponible sur le site www.anandamayi.com, (section française). le témoignage princeps de Bhaiji, le premier grand disciple de Mâ Anandamayî après son mari Bholonath, et qui a donné à celle qui s'appelait auparavant Nirmala Dévî le nom d'Anandamayî. Il y a aussi l'ouvrage de Bithika Mukerjee qui donne beaucoup de détails (disponible sur le même site pour toute la première partie qui parle de la vie de Mâ jusqu'à environ 35 ans), et le dernier livre de Jean-Claude Marol – il est paru deux mois avant sa mort trop précoce – La Saturée de joie aux éditions Dervy. Il y développe en particulier l'importance du féminin spirituel, et le lien qu’il discernait entre le lien avec Mâ et le respect pour l’image de la Dame au Moyen Âge, qui a continué dans le catholicisme jusqu'à nos jours à travers le culte de Notre-Dame.

Il y a tout un mouvement de fond au XXe siècle et qui prend de l'ampleur maintenant : il tend remettre à l'honneur l'aspect féminin du sacré. Il peut se manifester à travers l'écologie, où Gaïa est présenté comme une personne vivante, la déesse Terre, qu'il faut respecter et cesser de violer dans tous les sens. Par ailleurs, à cause du conflit israélo-arabe chronique au Moyen-Orient, beaucoup de gens sensés se mettent à réaliser que le monothéisme avec son dieu purement mâle et exclusivement unique risque de ne jamais réussir à dépasser les guerres saintes, et qu'au contraire les armes de destruction massive exposent au danger qu'elles deviennent beaucoup plus dévastatrices qu'auparavant, ce qui n'est pas peu dire. D'où la nécessité de renforcer l'aspect féminin du sacré, en encourageant le développement d’enseignantes religieuses femmes et aussi du point de vue métaphysique, en remettant à l’honneur le couple divin dieu/déesse qu’on retrouve dans pratiquement toutes les formes religieuses de l'humanité, excepté le monothéisme.

De plus, l'aspect féminin de la mystique est aussi relié à l'expérience chamanique, restant proche de la source et peu encombrée de dogmatiques et d’idéologies religieuses. Dans ses débuts, l’auto-initiation de Mâ par exemple et ses transes multiples évoquaient tout à fait la descente d'une expérience chamanique. Cependant, Mâ n'est certainement pas restée à ce niveau, elle était déjà prise dans le vaste courant de la bhakti du Bengale avec les grands exemples de Chaitanya Mahâprabhu au XVIe siècle et de Râmakrishna au XIXe. Elle a passé sa vie de gourou à guider la majorité de ses disciples sur cette voie traditionnelle de la bhakti, d'où ses multiples conseils dans cet ouvrage sur la récitation du mantra et la force du lien avec le gourou, mais elle était aussi solidement enracinée dans la voie de la connaissance et dans l'expérience de l'Un. Elle revient tout le temps à l’Unité fondamentale, en exprimant en des termes simples mais forts l'absence de dualité et la capacité fondamentale qu'a un être humain à se relier directement à l'Absolu sans intermédiaire.

Un mot d'explication sur le sens du titre de ce livre, ‘Vangmayî Mâ’. Il signifie ‘la Mère pénétrée, constituée de Parole’. Ce nom évoque la première forme de la Mère divine dans les védas, Vak, de la même racine que vox en latin et ‘voix’ en français, cette déesse « Voix » donc qui permet l'expression audible du Brahman. On dit qu'elle est née de la langue de ce Brahman, ou parfois qu'elle en est son épouse. Elle n'est pas sans évoquer la Hohkhma-Sophia-Sagesse de la mystique juive. Dans l'hindouisme classique, elle s'est transformée en Sarasvatî, déesse blanche de la pureté, de l'enseignement et de la connaissance, ainsi que de la musique. Elle réside (vatî) sur un cours d'eau (saras), c'est le sens de son nom. Cet archétype s'associe assez spontanément à Mâ Anandamayî, qui a été toute sa vie vêtue de blanc, et dont l'ashram principal et le tombeau sont situés au bord du Gange tout près d'Hardwar. Ce qu'il y a de particulier dans le cas de Mâ, c'est qu'il ne s'agissait pas d'une divinité vieille de plusieurs millénaires et présents uniquement sur le plan subtil, mais d’une personne bien vivante qu'on pouvait rencontrer si on le voulait. Dans ce contexte, la transmission d'énergie était beaucoup plus puissante et concrète, au moins pour les visiteurs ou disciples qui avaient l'ouverture requise pour recevoir ce transfert.

Au début de cet ouvrage, nous avons traduit telle quelle la préface à l'édition hindi. Elle est écrite dans le style fleuri de l'Orient et de la bhakti. C'est certes un autre monde mental que celui de l'Occident rationnel contemporain, mais pourquoi ne pas entendre ce qu'il a à nous dire de temps en temps ? Surtout quand il y a contact direct, le coeur est touché et peut transcender bien des barrières culturelles. Sarvâtma était un des premiers disciples français de Mâ Amritânândamayî. Il avait très peur en France que sa manière d'embrasser les gens pendant le darshan et de leur distribuer des bonbons choque avec un public plutôt rationaliste et quelque peu coincé. En fait, rapidement, il y a eu de longues queues pour passer dans les bras de celle qu'on appelle Amma, et donc celle-ci s’est mise à se moquer de Sarvâtma en lui disant : « Regarde donc tes Français ! Ils sont prêts à attendre des heures simplement pour avoir un bonbon ! »

Quand on lit continûment le livre, on s'aperçoit que Mâ revient souvent sur des thèmes fondamentaux car elle voulait donner des bases au public général de visiteurs qui venaient la trouver. Le classement par thèmes est intéressant quand on veut méditer directement sur un sujet précis, mais il a l'inconvénient de faire ressortir certaines répétitions. Cependant, celles-ci peuvent avoir un effet ‘mantrique’ sur le lecteur : avec une mouvement qu'on pourrait appeler en spirale, on revient régulièrement au même point, mais à un niveau de profondeur plus grand. Mâ conseille d’ailleurs le mantra comme une méthode accessible à tous, capable d'accompagner le processus de transformation et de purification du sâdhaka à long terme. Une bonne partie des conseils de son livre pourrait se résumer ainsi : « Répétez votre mantra avec persévérance et une confiance complète dans le gourou, vous atteindrez un niveau où toutes les questions et les contradictions seront résolues spontanément. » Cependant, il ne faut pas rester sur une fausse impression de simplisme en lisant ce livre d'une traite. Dans les entretiens privés, Mâ donnait bien d'autres enseignements et exercices de méditation que le mantra. Quand j'ai demandé à Swami Vijayânanda qui, nous l'avons dit, a passé plus de 30 ans sous la guidance directe de Mâ, s'il récitait le mantra quand il s'asseyait pour la méditation, il m'a répondu que non. Par contre, quand il fait sa cuisine ou des activités concrètes, il aime bien garder l'esprit relié à l’Absolu et à Mâ grâce au japa, mais quand il était assis en méditation, il aimait bien suivre ses propres pratiques et leur évolution spontanée. Pendant toute la période de début, il était dans l'idée qu'un gourou doit avant tout donner des conseils de techniques de méditations, des kriyas, et Mâ effectivement lui en a donné abondamment lors d'entretiens privés. Cependant, à chaque fois qu'elle en expliquait quelques-uns, elle ajoutait ; «  Ceci est un exercice secret, ne le répète pas. » Mâ a expliqué aussi que les kriyas était faits pour secouer la torpeur, le tamas. La plupart des gens sont somnolents, mais c'est bon pour eux de faire quelque chose, que ce soit des kriyas ou des rituels. Cela leur donne un début de réveil. Cependant, à un niveau élevé, la volonté de faire quelque chose se révélera être un obstacle. Mais ce « non faire » n'est pas pour les débutants. Un autre aspect des kriyas, ou rituels, doit aussi bien être compris : ils peuvent être destinés à éveiller des pouvoirs, comme les techniques de toumo chez les tibétains qui développent la capacité de ressortir le feu intérieur et donc de résister aux grands froids. Pour aller plus loin, on peut évoquer aussi les pratiques de magie qui sont des formes de kriyas, mais qui peuvent tourner à la magie noire. Au fond, quand la vie intérieure est éveillée, la manière de méditer vient spontanément. On ne peut pas en faire une généralité. Ce qui vous réussit à vous peut être inutile, voire dangereux pour d'autres. Il en va de même pour les conseils que le gourou vous donne personnellement, d'où l'avertissement de Mâ.

Dans ce sens, on dit dans la kabbale qu'il y a trois niveaux d'enseignements, le niveau général correspondant aux conseils que le maître donne à un petit groupe, le niveau personnel dans sa relation à un disciple en face-à-face, et le niveau supérieur sous forme d'expériences qui remontent spontanément chez le disciple, mais qui n'en sont pas pour autant étrangères à la présence du maître. Vijayânanda ajoute que les kriyas ne sont pas si importants, la voie spirituelle dans son ensemble est beaucoup plus large qu’une sorte de technologie où la révélation d'un code secret pourrait vous ouvrir l'accès à tous les programmes d’un coup. Cette voie spirituelle nécessite un engagement complet de l'individu : il est bon déjà d'avoir une base large de lectures et de connaissances pour comprendre vraiment quel est son intérêt, et ensuite de s'impliquer dans une pratique destinée d'emblée à transformer toute la vie et le comportement concret. Cela est beaucoup plus large que l'exécution plus ou moins mécanique de certaines techniques méditatives supposées secrètes et toutes-puissantes.

Il est tout à fait classique en Inde d'insister sur l'abandon entre les mains du gourou. Ceci choque les occidentaux qui ont d'ailleurs souvent perdu le lien avec la spiritualité traditionnelle chrétienne qui insiste elle aussi à sa manière sur l'importance du maître spirituel et du voeu d'obéissance pour les moines. « Être comme un cadavre dans les mains du laveur de mort » disait par exemple Ignace de Loyola. J'ai essayé d'éclaircir ces questions dans mon premier ouvrage, Le maître et le thérapeute, qui parle de la relation d'aide à la fois spirituelle et psychologique. De son côté, Swami Vijayânanda a tendance à distinguer deux niveaux, le niveau concret où il obéissait à la lettre aux paroles de Mâ, justement pour le plaisir en quelque sorte de montrer qu'il était capable de faire ce qu'elle lui demandait, et un niveau plus profond où il gardait tout son discernement et sa liberté. Mâ ne semble pas avoir été choquée par son attitude, constatant sans doute qu'elle relevait plus de la voie de la connaissance que de celle de la dévotion. Dès leur premier entretien à Bénarès en février 1951, elle avait d’ailleurs constaté et dit de lui qu'il était un pranava upasaka, littéralement un ‘adorateur du Om’, c'est-à-dire quelqu'un qui suivait la voie de la connaissance. Dans ce sens, elle ne lui a jamais demandé par exemple de faire de poujâ ni de centrer sa dévotion sur la forme d'une divinité hindoue.

Il aurait bien sûr beaucoup d'autres choses à dire à propos de Mâ Anandamayî. J’ai parlé d'elle dans un chapitre de mon livre L’Inde intérieure, et d'après Swami Vijayânanda, la meilleure introduction qui ait été écrite au livre de Mâ en français se trouve sous la plume de Jean Herbert dans les quelques pages qu'il a mises au début de Aux sources de la joie. (Albin-Michel, spiritualités vivantes/poche, 1996.)

Mâ disait d'elle-même qu'elle n'était pas une réformatrice, qu'elle avait pris l'hindouisme comme il était, et qu'elle ne faisait que transmette l'enseignement de l'Inde ancienne et des rishis-munis de jadis. Elle a accompli cette tâche avec un souci de la perfection et en transmettant tout autour d'elle une énergie indubitable d'amour et de joie.

Vigyânânand

Kankhal, Hardwar, Inde, mars 2009





Ma mère Anandamayî

Extraits du livre de Vishuddha



Vishuddha a perdu sa mère jeune. Celle-ci est une fidèle très dévouée à Mâ. De ce fait, son père a décidé qu'elle soit élevée au Kanyâpîth, l'école de filles de l'ashram de Mâ à Bénarès fondé par Gurupriya Didi. Elle y a aussi enseigné après, puis est repartie dans le monde pendant quelques dizaines d'années, et vit maintenant à l'ashram de Kankhal, où elle a communiqué son livre à Vigyânânand.



Vishuddha évoque la vie autour de Mâ à Bénarès avant même que l'ashram ne soit construit :

On avait organisé des discours religieux (satsang) matin et soir directement sur une grande barque. À midi, la barque était ancrée sur un haut-fond ou sur un point d'accostage. C'est là que Khukunidi (Gurupriya Dévi), Tante Matori et Swami Paramânanda cuisaient le kicheri (une préparation mélangeant le riz et les lentilles). Kukhunidi nourrissait Mâ et ensuite servait le kicheri bien chaud sur des assiettes faites de feuilles à ceux qui étaient présents. Cette nourriture avait un goût excellent. Après avoir eu notre repas, nous jetions les feuilles dans le Gange et nettoyions nos mains et notre visage. Quand Mâ se reposait, le rideau autour d'elle était tiré. Nous aussi nous nous reposions où nous pouvions, assis ou allongés. Dans l'après-midi, la grande barque prenait de nouveau le large. D'un côté de la rivière, la plupart des ghats étaient encombrés par les gens assis en groupe autour d'un chanteur spirituel ou d'un savant religieux en train de donner des discours. Petit à petit, les lumières sur les ghats se mettaient à briller doucement. Pour nous qui étions assis dans la barque sur le Gange, ces lumières présentaient une vision rare, s'apparentant au divin.

Beaucoup de fidèles venaient dans l'après-midi pour avoir un aperçu de Mâ. Je me souviens que le respecté Mahanânanda Brahmachari vivait à l'époque quelque part près de Kedarghat. Chaque soir, il restait en méditation sur le toit d'un petit bateau ancré au ghat de Gauranga. Quand Mâ était à Kashi, il vint à sa barque et il se mit à chanter pour elle des chants et des kîrtans très doux en s'accompagnant d'un mandira. Un autre visiteur, Shree Govind Gopal Mukhopadhyay venait souvent voir Mâ et chantait des chants dévotionnels avec une émotion qui venait du coeur. De plus, il y avait Abhoyda et Shobanda qui faisaient vraiment vibrer l'endroit avec la modulation des musiques des kîrtans tandis que Kamalda (qui est devenu Virâjânanda, le fondateur de la Sangha de Mâ) récitait des textes. Il y avait un flot incessant de fidèles de Calcutta.

Citons pour finir les extraits de ce numéro de ‘Jay Mâ’ la lettre que Chitra Ghosh, qui était une brahmachârinî proche de Mâ durant la dernière période de sa vie, a écrit à Vishuddha pour la féliciter de son livre :

« Ma chère Vishuddha,

J'ai lu votre livre Ma Mère Anandamayî sans reprendre mon souffle. J'y ai pris beaucoup de plaisir et j'ai senti que je revoyais Mâ de nouveau parmi nous. Le langage clair et facile de votre livre m'a aussi impressionné. Vous avez rapporté les incidents que vous avez vécus directement en compagnie de Mâ avec votre coeur. Ils ne peuvent être oubliés. Mâ est à l'intérieur de vous et vous inspire pour écrire ces anecdotes véritables. Certes, j'ai lu d'autres livres sur Mâ, mais le vôtre est tout à fait différent et il ouvre une nouvelle porte vers Mâ.

En lisant votre ouvrage, j'ai tout oublié à propos de ma maladie, de la douleur et des troubles de mon corps. J'ai été si heureuse que cela m'a guéri le corps. Voilà qui me rappelle le chant de Tagore :

« Quand j'ai joué avec toi,

Toi qui savais qui tu étais,

il n'y avait ni peur ni honte... »

Vous êtes des plus fortunées en pouvant jouer avec Mâ... »

[Nous envisageons de continuer à citer des extraits du livre de Vishuddha dans les numéros suivants.]





Rencontre avec Krishnapriya



Nous étions un groupe d’une douzaine de Français début décembre 2008 à Kankhal.

Un après-midi, sur le toit-terrasse du nouvel ashram Shiva-Shakti Pith (en face de l’ashram de Mâ) où logeait la plus grande partie du groupe, nous avons eu un entretien avec Krishnapriya. D’origine suisse, Krishnapriya a 78 ans. Elle a passé 12 ans auprès de Mâ qu’elle a rencontrée en 1970.




Infirmière, elle a participé au développement de l'hôpital de Mâ Anandamayî à Bénarès à ses débuts. Elle partage à présent son temps entre Kankhal, Calcutta les mois d’hiver, Dehradun où elle a une petite maison dans l’ashram de Kalyanvan et la Suisse lors des fortes chaleurs qu’elle supporte moins bien à présent.


« Dans mon enfance, j’étais le « canard jaune chez les Lenoir ». Mes parents étaient gentils, mais ils ne comprenaient rien à ce qui m’arrivait. Je devais probablement présenter des signes de vies antérieures hindoues, par exemple, je ne voulais pas échanger ma vaisselle ou mes vêtements avec mes petites sœurs, j’aimais garder mon assiette à table, être à part.

Vers 16 ou 17 ans, j’ai acheté un petit livre de Mâ, la traduction de Sadvani en français par Jean Herbert qui l’avait rencontrée dès 1937. Cependant, je pensais qu’elle était morte depuis longtemps comme Ramakrishna ou Vivékânanda.

Lors d’une rencontre avec Arnaud Desjardins qui revenait d’Inde où il avait fait un film sur Mâ, je l’ai vue (Arnaud faisait des arrêts sur image sur elle pour favoriser un véritable darshan), je me suis exclamée : « Pourquoi resterais-je à me tourner les pouces à Lausanne alors que le Christ est à Rome ? » et je suis partie pour l’Inde.

Quand je suis arrivée auprès de Mâ à Kanpur, j’étais dans un état d’excitation incroyable ; pendant plusieurs jours je sautais tous les trois pas en m’exclamant « Jay Ma » ! J’étais ‘pagal’, folle ! J’avais une immense bhakti pour Mâ comme Swami Vijayânanda au début, c’est d’ailleurs cela qui l’a fait ‘basculer’ et rester en Inde, mais après il a évolué vers le jnâna, moi je suis restée dans la voie de la bhakti.

Pendant les 12 ans qui ont suivi, je n’ai quasiment pas quitté l‘Inde sauf un mois tous les 2 ans pour voir ma mère. Cela faisait deux ou trois ans que j’étais en Inde et je n’avais toujours pas de nom. Le jour de mon anniversaire (c’était le 3 mai et Mâ était du 1er), j’ai demandé un nom à Mâ. Elle était sur la terrasse de l’ashram de Bénarès, assise, avec une grande présence. Elle a claqué des mains une fois en disant ‘Krishnapriya’, puis une seconde fois en disant ‘Shaktipriya’, puis une troisième fois pour ‘Narayanpriya’ et une dernière fois pour un quatrième nom. Tous les quatre m’allaient, mais j’ai pris le premier puisque Mâ l’avait donné d’abord. J’étais revenue à la maison !

Les brahmacharinîs me disaient qu’elles devaient faire un effort pour se souvenir que je n’étais pas des leurs en tant que brahmine de naissance tant je me suis bien adaptée aux règles, qui étaient très strictes. Par exemple, je n’ai jamais pollué l’eau ou de la nourriture en m’en approchant dans les endroits où je ne devais pas. Atmânanda, qui est restée longtemps en révolte contre les règles, le faisait souvent. Quand on parlait à Mâ de cette discipline brahmanique, elle levait les bras au ciel avec un air évasif et s’exclamait ‘Il y a les règles ! » Elle-même n’en avait aucun besoin.

Je dansais régulièrement toute la nuit pendant les Namkirtans. Les autres participantes s’adossaient ou allaient de temps à autre prendre le thé. Une nuit vers deux heures du matin, Mâ est venue, elle a fait un signe autoritaire à celles qui étaient adossées de venir dans la ronde. Elle m’a prise avec elle et nous avons dansé ensemble. C’était comme être près d’une centrale atomique. Quand elle m’a laissée, heureusement que j’étais près d’un mur où j’ai pu me retenir. J’étais complètement ivre.

Quand on était avec Mâ, on était au paradis. Ils étaient parfois obligés de la ramener dans sa chambre au bout d’un certain temps, car personne ne voulait ou ne pouvait plus partir. Cependant, je ne demandais pas d’entretiens privés à Mâ. Parfois je venais près d’elle avec des questions préparées, elle me regardait et disait juste en levant les mains « Krishnapriya ! Krishnapriya ! Krishnapriya ! » et mes questions étaient résolues.

Les gens modernes se moquent des miracles du Christ en disant que c’est de l’imagination. Mais je les ai vus chez Mâ, tout cela est vrai ! Un jour nous étions dans l’ancien ashram où se trouve le temple de Shiva et les cuisines des brahmines. Je voyais qu’il y avait dans les casseroles de la nourriture pour 10 ou 12, et 80 personnes sont arrivées. Mâ a dit : « Il faut nourrir tout le monde ! », et effectivement tout le monde a été nourri, les récipients ne se vidaient pas. La multiplication des pains à la manière du Christ existe donc. Quand il y avait foule, Mâ distribuait les fruits et la corbeille n’était vide que quand la dernière personne avait été servie.

Un jour, Mâ avait dit à Chitra à l’ashram de Bénarès qu’elle allait se baigner dans le Gange puis qu’elle reviendrait prendre un verre de jus d’orange. Tandis qu’elle nageait, elle a soudain disparu dans le fleuve pendant cinq, dix, quinze minutes, plus personne ne la voyait ! Les brahmacharinis se mirent à crier de désespoir, pensant qu’elle s’était noyée. Tout d’un coup, elle est réapparue et a dit : « J’étais une avec le Gange, mais je suis remontée car je me suis rappelée que j’avais promis à Chitra de boire le verre de jus d’orange qu’elle m’avait préparé ! »

Si je dois résumer ce que j’ai à dire, ayez de l’intensité ! Mâ est présente, elle est là, si vous lui demandez quelque chose avec une vraie intensité, c’est sûr que vous l’obtiendrez.

Si Mâ revenait sous forme physique, nous serions tous tellement joyeux.

Ella Maillard à laquelle Arnaud Desjardins m’avait adressée me disait : « J’ai vu passer beaucoup de chercheurs spirituels occidentaux, mais vous êtes une des rares qui aient vraiment la bhakti ».


Propos recueillis par Jacques Vigne et Caroline Stein








La saturée de joie

de Jean-Claude Marol

Extraits du livre



A travers le miroir





Ma Anandamayî eut une humanité savoureuse. Nous en saluerons fatalement quelques moments, mais nous insisterons plutôt, dans les pages de ce livre, sur une familiarité de Principe avec ``ce corps` (ehi sharir)- tel était le nom que Mâ Anandamayî le plus souvent se donnait dans sa langue bengalie. Selon Anandamayî (cela peut se traduire par `la saturée de Joie`), nous sommes ses proches depuis si longtemps….elle sait comment nous prendre! Elle dit avec humour :


Voila comment quelqu’un venu rencontrer ce corps, se présenta :

Il reçut cette réponse :


La jeune fille pimentée


Celle “établie dans le Coeur de tous les êtres”, s’est faufilée jusque-là où on ne l’attendait pas, sous de nombreux aspects, dans nos propres mouvances culturelles.

Notre esprit philosophique occidental, façonné par la Grèce Antique, et si fier de sa rationalité, doit faire la place, s’il est conséquent avec ses sources, avec cette vision; quelques jours avant sa mort, selon le Criton (44) de Platon, Socrate fit ce songe:

J’eus l’impression de voir venir a moi une femme, belle et pleine de grâce, vêtue de blanc, qui m’appela par mon nom. Elle me dit:




Socrate, trois jours après ta fin, tu arriveras dans la Phtie fertile…”


Etrange apparition! De façon plus prévisible, l’ancienne église grecque des VIIe et VIIIe siècles saluait ainsi Marie, qui rend le plus sage, insensé (Eikos-IX):

Salut, toi qui rends les sages, insensés!

Salut, toi qui réduis à des absurdités les paroles les plus avisées.


Toujours une féminité ardente a parcouru nos sociétés comme un frisson.

L’Esprit Saint a souvent été qualifié de féminin. La tradition hébraïque, pour Esprit, emploie un mot féminin (Ruah). Effet de continuité (?), ou simple connivence dans l’expérience, l’Eglise syrienne, en fidélité à d’antiques enseignements chrétiens, évoque le Saint-Esprit en tant que Mère. L’Ancien Testament (Sagesse-7-26-27) pourtant essentiellement patriarcal, laisse aussi transparaître un visage féminin.

Elle (Hokmah – la sagesse) est en effet un effluve de la puissance de Dieu, une pure émanation de la gloire du Tout-Puissant.

Elle est un reflet de la lumière éternelle, un miroir sans tache de l’activité de Dieu.

(…)Seule, elle peut tout! Demeurant en elle-même, elle renouvelle l’univers.



Un des piliers du christianisme, Bernard de Clairvaux, dans ce XIe siècle foisonnant de saluts à la Dame, contribua à développer la dévotion à “Notre Dame, aqueduc de la grâce”.

Sur le plan d’une déité principielle, un des anciens pères, Denys, annonce:

Elle est l’être de tout, elle est au-dessus de l’être, la Déité.


Dans la concision de la langue latine : Esse omnium est, quae super esse est deitas.


Toutes ces formulations (parmi beaucoup d’autres: dans le celtisme notamment, qui fut un grand ferment de notre monde médiéval) ont tissé de façon sous-jacente notre Occident.

Tous ces accents, souvent peu connus et refoulés par l’Eglise, participent, qu’on le veuille ou non, de notre tréfonds culturel. Ils nous préparent à entendre le sacré au féminin, tel que l’Inde le proclame sans vergogne depuis des millénaires et qui s’est actualisé avec la Saturée de Joie.

Qui est cette Mère, proche de tous, dont notre Bible dit:

Seule, Elle peut tout!


Quelle Mère?


En Inde, nous n’aurons pas à nous convertir a quoi que ce soit. En fait, il n’y a pas d’hindouisme avec l’-isme que nous aimons accoler en Occident à tous les mouvements de pensée, il n’y a pas de prophète fondateur, pas d’Eglise, pas de dogme



exclusif, mais d’infinies variations de langage, de multiples sagesses (etc.) et pourtant un fantastique sens de l’unité. Mâ était disponible à toutes les formes de quête, à toutes les expressions du divin de par le monde :


Les chemins sont sans nombre. On ne peut les limiter à ce qu’ont répertorié les Ecritures. Où il est question d’Infini, la variété des approches est aussi infinie et les révélations sur ces chemins sont illimitées. Ne dit-on pas: “il y a autant de doctrines que de sages?” A moins d’avoir une expression qui vous soit propre, il n’est nullement question d’être Sage.


Une autre fois, un autre échange :


Question : Mais pourquoi existe-t-il tant de religions sur notre planète, s’il n’y a que le Un?

Mâ : Il est infini; il est naturel qu’il y ait une infinie variété de conceptions Le concernant, et une infinie variété de chemins pour Le rejoindre.

Il est toutes choses, Il est toutes les croyances; Il est aussi le refus de croire en Lui de l’athée. La déclaration des vertus de l’incroyance est une autre croyance, n’est-ce pas? Il est dans toutes les formes et toutes les non formes.


Elle résumera:


Je n’ai pas de voie particulière. Toutes les voies sont mes voies.




Ainsi va Mâ; ainsi vont les Indes, depuis des millénaires. Dans cette générosité indienne, nous tenterons de déceler maintenant, et au nom de la présence de Mâ (elle s’est incarnée en femme, ce qui n’est pas neutre) plus particulièrement la composante féminine.

Dans un des Tantrasara, la poète kashmiri du XIe siècle, Abhinavagupta, chante Bhuvaneshvari (celle qui contrôle l’Univers):


Tu es la primordiale,

La Mère des créatures en nombre infini.

Tu différencies l’Absolu en ces trois puissances:

Brahma, Vishnu, Shiva,

Pour créer, maintenir et détruire les mondes.

Mère, puisse ton chant éclairer ma parole!


(Nous remercions Sandrine Oubrier, qui s’est installée à Kankhal,

pour avoir aidé à sélectionner et saisir des extraits du livre de Marol qui seront continués dans les numéros qui suivent).











Parler est un besoin, écouter est un grand art (Goethe)

ECOUTER

(Voici un cadeau d’AMMA)


Ecouter est peut-être le plus beau cadeau

Que nous puissions faire à quelqu’un…

C’est lui dire, non pas avec des mots,

Mais avec ses yeux, son visage, son sourire

Et tout son corps : tu es important pour moi,

Tu es intéressant, je suis heureux que tu sois là.


Ecouter, c’est commencer par se taire.

Ecouter, c’est accueillir l’autre avec reconnaissance

Tel qu’il se définit lui-même

Sans se substituer à lui pour dire ce qu’il doit être.


Ecouter, ce n’est pas vouloir que quelqu’un

Soit comme ceci ou comme cela,

C’est apprendre à découvrir les qualités

Qui lui sont spécifiques.


C’est être ouvert positivement

A toutes les idées, à tous les sujets,

A toutes les expériences, à toutes les solutions,

Sans interpréter, sans juger,




Laissant à l’autre son espace

Et le temps de trouver la voie qui est la sienne.


Etre attentif à quelqu’un qui souffre,

Ce n’est pas donner une solution

Ou une explication à sa souffrance,

C’est lui permettre de la dire et de trouver

Lui-même son propre chemin pour se libérer…


Ecouter, c’est donner à l’autre

Ce qu'on ne lui a peut-être jamais donné :

De l’attention, du temps, une présence affectueuse.


(Recueilli par Geneviève Koevoets-Mahâjyoti)


Recette pour le Bonheur

(Par Mahâjyoti)


Précédemment, j’avais évoqué ‘Mâ et la Joie’…

Mais alors… le Bonheur ?

La souffrance ?

La souffrance ? Mais oui, il y a aussi B……comme Bonheur ! Avec une majuscule.

Cela me rappelle le grand humoriste disparu Raymond Devos, qui raisonnait dans l’absurde…

Et qu’est-ce que c’est que l’absurde ? C’est NOUS !



La ‘Voix du Maître’ répond à son disciple lorsque celui-ci demande :

Disciple : « Combien de temps me faudra-t-il chercher ? »

Maître : « Jusqu’à ce que tu trouves… »

Disciple : « Mais quand vais-je trouver ? »

Maître : « Quand tu cesseras de chercher… »


Cela me rappelle alors le grand peintre Michel-Ange lorsqu’il mit plusieurs années à peindre le plafond somptueux de la Chapelle Sixtine du Vatican à Rome, alors que son mécène, le Pape Jules II, lui demandait, du bas de l’échelle où était juché Michel-Ange :

Jules II : « Quand auras-tu terminé ? »

M-A : « Quand j’aurai fini ! »


Il y en a qui assènent des coups à leurs mécènes…mais NOUS…où allons-nous le dénicher notre bonheur si notre mécène est au-dedans de nous et si on ne sait pas le voir ?

Frilosité…frivolité… ?

C’est Noël, il fait beau.

C’est l’Année Nouvelle, il fait froid.

C’est l’Année du cœur, il fait triste.

C’est l’Année du Lion, du Chat, du Rat…peu importe, cela devrait être l’Année du Bonheur. Avec un grand B.

Alors? Comment s’y prendre?





Voici une recette (toujours de ma grand-mère de 104 ans) :



N’est-ce pas tout cela le Bonheur qui nous est prodigué ? Celui de pouvoir avoir accès à nos anciens…à nos maîtres…à nos guides…

« La compassion du sage éclaire sans éblouir, réchauffe sans brûler » a écrit Matthieu Ricard dans son « Plaidoyer pour le bonheur »

Accèderons-nous jamais à une parcelle de ce qu’ils ont atteint ? De ce qu’ils ont connu ? On peut essayer de faire de notre mieux.

Le Bonheur n’est-il pas un simple ‘état d’être’ indéfinissable qui vient éclore parfois sans qu’on s’en aperçoive dans les moment les plus inattendus… ?


En sanskrit, le bonheur se dit « ANANDA » (béatitude, félicité…)

Mâ Anandamayî (Mère imprégnée de bonheur…habitée par la joie…)



Si vous voulez que le monde en ait un peu plus…transmettez, transmettez…Tous les moyens sont bons et atteindront leur but au moment opportun, après avoir erré quelques temps dans le champ akashique, dans la mémoire collective, dans les rayons du soleil !

Il n’y a pas de petits bonheurs, ils sont tous à la mesure de comment vous les recevrez.

« Souvent on rencontre sa destinée par les chemins qu’on prend pour l’éviter » nous rapporte Victor Hugo.

Et Jacques Vigne a écrit : « Nous nous lèverons de Bonheur » !

Donc : « Prenez soin du Bonheur, prenez soin de la vie et elle prendra soin de vous » (Maharishi Mahesh Yogi)

Mais je terminerai simplement en vous affirmant que le BONHEUR est comme un parfum, on le porte sur soi pour le faire respirer aux autres…

Heureux JAY MA 2009 !

Geneviève Koevoets

(Mahâjyoti)








Le dalaï-lama :

Le bouddhisme tibétain reconnaît l'Inde comme gourou


En janvier 2009, le dalaï-lama est venu inaugurer le pavillon du Tibet à Auroville. Jacques Vigne y est passé en février avec un groupe et grâce à la revue d’Auroville en français, il a pu prendre connaissance de façon détaillée du contenu des rencontres et des enseignements du dalaï-lama dans cette cité internationale voulue par la Mère. Le dalaï-lama a reconnu clairement la dette du bouddhisme tibétain envers l'Inde, y compris l'Inde du sud d'où sont venus par exemple Nagârjuna et Bohidharma.


« Je voudrais saluer les habitants de cette région. L'arrivée du bouddhisme au Tibet a transformé la manière de vivre des tibétains. Depuis plus de mille ans, le bouddhisme bénéficie immensément au peuple tibétain. Le bouddhisme est une ancienne religion indienne. Le bouddha Sakyamuni (Siddhartha) était indien. Les grands maîtres de la tradition bouddhiste sanskrite étaient aussi tous Indiens. C'est pourquoi nous considérons l'Inde comme notre gourou. Nous tibétains, nous nous considérons comme des chelas (disciples).


La plupart des grands maîtres comme Nagârjuna venaient du sud de l'Inde. La plupart de ces grands pandits, de ces maîtres en langues et philosophies sont venus du Sud :

J’ai personnellement toujours ressenti une très profonde admiration pour les Indiens du sud.

La personne qui m'a présenté a dit que j'avais fait une petite contribution à l'humanité. Mais ces idéaux et ces concepts ne me sont pas venus parce que je suis spécial. En fait, je suis un être humain très ignorant. Ces idéaux sont avec moi grâce à ces grands textes indiens que j'ai étudiés depuis l'enfance. Je les ai étudiés sans enthousiasme, en traînant les pieds [rires] par peur de mon tuteur ; ce n'était pas quelque chose de volontaire. Ce n'est que plus tard que j'ai réalisé que ces études, ces textes étaient très utiles pour développer une perception juste, une attitude juste.

J'ai l'occasion de voyager beaucoup dans le monde. J'accepte avec plaisir les invitations à aller parler ici ou là. Quel message est-ce que je donne ?

Eh bien, c'est cette pensée indienne. Je suis comme un messager de la pensée de l'Inde ancienne, particulièrement de l'Inde du Sud. Je suis seulement le messager. Le véritable auteur de ces pensées, c'est vous. »


La revue d’Auroville, numéro 27,

mars-juin 2009, spécial dalaï-lama.



Nouvelles


l’intérieur de Vaison-la-Romaine. Vous trouverez ses nouvelles coordonnées dans la section suivante.


Un nouveau livre de paroles de Mâ classées par thèmes a été traduit en français et devrait être mis incessamment en ligne sur le site www.anandamayi.org , il est intitulé Vangmayî Mâ, et nous en avons mis des extraits ainsi que l'introduction par Vigyanânanda au début de ce numéro. L’école primaire au nom de Ma Anandamayî qui compte 80 élèves dans le village de Jamrari est en train de finir de construire ses bâtiments. Ceci est dû à la générosité de Français fidèles de Mâ. Près de l'ermitage de Dhaulchina, il y a deux écoles primaires au nom de Mâ Anandamayî qu’aide l'ashram, dont celle de Jamrari, et le collège de 300 élèves lui-même est aussi au nom de Mâ Anandamayî, mais est géré par le gouvernement directement.

Le progrès dans le niveau d'éducation des gens des montagnes, en particulier des femmes, est une véritable révolution silencieuse qui fera réellement bouger la société dans le bon sens. Par contre, du côté de l'Himalaya népalais, les nouvelles ne sont pas bonnes, d'après Pushparaj, secrétaire de l'ashram de Mâ, et lui-même népalais, le pays est en train de régresser de 20 ans au point de vue économique, et au point de vue culturel, les maoïstes font tout ce qu'ils peuvent pour réduire l'importance de l'hindouisme et de l'Inde et essayer d'imposer leur propre idéologie. Heureusement, la dépendance envers l’Inde est à la fois un fait historique et géographique ainsi qu’une donnée économique actuelle, et les maoïstes seront sans doute défaits avant d'avoir pu la défaire.

en début mai près de Venise. Il animera en particulier une semaine de retraite à Cannes du 18 au 25 avril et une autre sur une île du Golfe du Morbihan en juillet, cette dernière étant complète. Du 20 mai au 20 juin il sera à la Réunion.

Demandez si besoin son programme à Mahâjyoti koevoetsg@wanadoo.fr


Renouvellement général des abonnements


Ce renouvellement général des abonnements nous emmènera jusqu’à mars 2011, sauf événements imprévus. Vu les problèmes de courrier entre l'Inde et la France, nous avons décidé de cesser l'envoi du ‘JAY MA’ sur papier, la grande majorité des abonnés étant déjà passée à la version électronique. Celle-ci est à la fois plus rapide, plus économique et plus écologique. Pour confirmer votre renouvellement d'abonnement, envoyez un chèque de 8 € à José et rappelez votre adresse courriel, ce sera aussi clair.

José Sanchez Gonzalez

10 rue Tibère

84110 Vaison-la-Romaine

Tel : 06 34 98 82 22

Email : nagajo3@yahoo.fr

Il ne faudra pas manquer d’en aviser également Mahâjyoti (Geneviève Koevoets) une fois votre paiement envoyé – koevoetsg@wanadoo.fr car c’est elle qui se chargera de vous envoyer le ‘Jay Mâ’ par email, tout en l’illustrant d’une belle photo de Mâ comme dans l'édition papier. Les bénéfices du ‘Jay Mâ’ français seront reversés pour soutenir l’Amrita Varta dont s'occupe Panuda et l'équipe des brahmachârinîs du Kanyapeeth de Bénarès., avec les versions anglaise, hindi et bengali.



Table des matières


Paroles de Mâ extraites du nouveau livre Vangmayî Mâ p.1

Introduction à Vangmayî Mâ par Vigyânânand p.5

Ma mère, Mâ Anandamayî par Vishuddha p.14

Rencontre avec Krishnapriya p.16

La Saturée de joie de Jean-Claude Marol p.20

Ecouter par Amma p.26

Recette pour le Bonheur par Mahâjyoti p.27

Le bouddhisme tibétain reconnaît l'Inde comme gourou

par le dalaï-lama : p.32

Nouvelles p.34

Renouvellement général des abonnements p.36