Jay Ma n°77                Eté 2005

 

 

Paroles de Mâ

 

La lumière du monde va et vient, elle est instable. La Lumière qui est éternelle ne peut s'éteindre. Dans cette Lumière, vous considérez la lumière extérieure et toute chose dans l'univers : c'est seulement parce qu'elle resplendit à tout jamais en vous que vous pouvez percevoir cette lumière extérieure. Ce qui vous apparaît dans l'univers n'est dû qu'à cette grande Lumière en vous, et c'est seulement parce que la Connaissance suprême de l'essence des choses demeure cachée dans les profondeurs de votre être qu'il vous est possible d'acquérir une connaissance quelle qu'elle soit.

 

Tout ceci qui est Sa création, est en Son pouvoir, en Sa présence et c'est Lui.

 

En quelque situation où Il puisse maintenir qui que ce soit n'importe quand, tout cela est pour son bien, car en vérité tout a été ordonné par Lui et vient de Lui.

 

Le bonheur relatif, c'est-à-dire celui qui dépend d'une chose ou d'une autre, doit s'achever dans la frustration. C'est le devoir de l'être humain de méditer sur Dieu, qui est la paix elle-même. Sans avoir recours à ce qui aide au souvenir de Dieu, on ne peut avoir de paix. N'avez vous pas expérimenté ce qu'est la vie dans le monde ? Celui qu'on doit aimer est Dieu. En Lui  il y a tout, c'est Lui que vous devez trouver.

 

Essayez toujours de garder présent à l'esprit que Dieu envoie tous les soucis de la vie pour vous purifier.

 

Souvenez-vous toujours que la répétition de Son Nom a assez de pouvoir pour laver les péchés, qu'ils proviennent de cette vie ou des vie passées.

 

Lui seul connaît celui auquel il va se révéler et sous quelle forme. L'intelligence humaine ne peut comprendre par quels chemins et de quelle manière il attire un être particulier à lui avec une grande force. Le chemin est différent pour des pèlerins différents. Souvenez-vous qu'il détruit le malheur par le malheur et annihile le chagrin par le chagrin.

 

Si l'on doit désirer quelque chose, à tout prendre, que ce soit Sa grâce.

 

Si vous êtes persévérant et stable comme la terre, la vie divine s'éveillera en vous.

 

De même que l'eau purifie par son simple contact,   la vue, le toucher,  les bénédictions, et même seulement le souvenir d'un sadhou réel, nettoie petit à petit les aspirations et les désirs impurs.

 

 

 

Ma  Anandamayi

vue

par  ses  disciples

 

Extraits du Premier livre de souvenirs sur Mâ,

publiés par l’ashram en 1946

 

 

Hymne à Mâ Anandamayi

 

(Traduit du « Matri Darshan. En compagnie de Mâ Anandamayi », de Bhaiji, par G.Dasgupta)

 

 

Gloire à Toi, Sri Mâ Anandamayi,

Qui habite en chaque âme dans une pureté absolue

A travers le temps, O Mère !

 

Ton éclat, mère Nirmala, illumine l’univers ;

Tu es la splendeur des vertus célestes, O Mère !

 

Tu es le Guru incarné, la reine de toutes les royautés,

Et le sceptre de tous les pouvoirs ;

Tu es le symbole du « Aum » dans le Swaha,

Et le Swadha, O Mère !

 

Devant tous les regards, tu rayonnes, O Mère !

Dans une grâce dont la divinité surpasse toutes choses ;

Tu es la réalité absolue, suprêmement belle et parfaite, O Mère !

 

Le soleil et la lune sont les lobes jumeaux de Tes oreilles ;

Le bleu profond du ciel infini est Ta chevelure elle-même,

Et l’univers, ta silhouette glorieuse, O Mère !

 

Tu es le charme de toutes les richesses de la terre, douceur incarnée,

Radiant éclat de la splendeur de la vie, O Mère !

 

Tu es aussi délicieuse que Lakshmi l’est à Vishnu,

Toujours si pleine de paix, de tranquillité et de pardon,

Tous les dieux et toutes les déesses émanent de ta personne, O Mère !

 

Tu es la dispensatrice de toute joie,

De toutes les bénédictions de la vie, de l’amour de la dévotion,

De la sagesse divine et du salut, tout coule de Toi, O Mère !

 

L’univers est Ton enfant, tu as pris soin de lui avec toute ta tendresse

Et finalement, tu l’as fait prendre refuge au cœur de Toi, O Mère !

 

La vie même de tes dévots est tienne,

Tu es la divine grâce incarnée,

 Et la douceur de ce monde et des deux prochains, O Mère !

 

Tu es la fontaine même d’où coulent toutes les causes,

Comme les effets,

Bien au-delà des liens de toute harmonie et de toute discorde,

Le mouvement premier de toute force divine est Toi-même, O Mère !

 

 

Tu es la formule sacrée de toute sagesse,

Celle qui charme et appelle à Elle tous les yogis,

Et toutes les terreurs de la vie terrestre sont dissipées par Ta présence, O Mère !

 

L’âme de tous les mantras et Bijas est tienne,

En Toi, se tient la révélation des Védas,

Tu es celle qui nourrit les mondes par l’omnipotence de Ta présence, O Mère !

 

Tous les Gunas et les formes irradient de Ta personne,

Mais tu es bien au-delà de leur portée,

Tu es celle qui resplendit de la plus haute bénédiction de l’existence, O Mère !

 

L’univers entier, de l’animé à l’inanimé,

Tremble de ravissement à Ton contact,

Et chante sans cesse la douceur de Ta grâce, O Mère !

 

Permets-nous de nous unir,

Afin de n’être plus qu’un cœur et qu’une âme,

Pour offrir nos vœux à Tes pieds, O Mère !

 

Que la plus haute gloire croisse et resplendisse toujours davantage pour Toi,

O Mère !

 


Chapitre 1

 

    J’entendis pour la première fois le nom de Mâ Anandamayi un beau matin de la fin de l’automne de l’année 1928. J’étais en train de finir mes préparatifs pour me rendre au collège (je n’avais pas encore pris ma retraite à l’époque) quand celui qu’on appellera plus tard Mahamahopadhaya (Pt Padmanath Vidyavinoda) arriva chez moi et me prévint que Mâ Anandamayi de Dacca se trouvait en ce moment même à Bénarès. Il me tendit un article écrit par Mr Kunja Mohan Mukerji (alias Swami Turiyananda) sur Mâ, et la guérison miraculeuse que Sa grâce avait opérée sur une dangereuse morsure de serpent qu’avait subi son fils. Il ajouta que la vision de Mâ en Samadhi était de la plus haute élévation, et il insista pour que je vienne par moi-même y assister, si cela m’était possible. Cette démarche provenant d’une personne réputée pour un esprit critique acéré envers toutes choses, et qui n’épargnait rien ni personne dans ses attaques, me sembla d’une portée remarquable. Mâ demeurait dans la maison de Kunja Babu à Ramapura. Et je décidai d’aller la voir. De ce fait, lorsque je me rendis là-bas le soir, Kunja Babu, comme son frère aîné Sasanka Babu (alias Swami Akhandananda), me conduisirent vers Mâ pour avoir son Darshan. Ils me présentèrent immédiatement à Blolanath qui m’emmena dans une petite pièce au rez-de-chaussée où je trouvais Mâ absorbée en Samadhi et entourée d’un grand nombre de dévots (bhaktas). Blolanath n’était pas à l’aise qu’elle ne reprenne pas rapidement conscience, et il fit quelques tentatives infructueuses pour la ramener à elle-même. Sachant qu’un état de transe doit poursuivre son déroulement naturel sans être interrompu de façon artificielle, sous peine de faire encourir à la personne de gros risques, je lui demandai de cesser ses tentatives. J’attendis donc qu’elle revienne à un état de conscience normal, mais rien de tel ne se produisit dans les deux, trois heures qui suivirent. Anticipant qu’il se pourrait que cela prenne un temps infini avant qu’elle ne revienne à une condition normale, je décidai de rentrer chez moi, mais fermement décidé à revenir la voir le jour suivant. Ce fut un 6 Septembre que je rendis ma première visite à Mâ. J’en vins à apprendre qu’elle était arrivée un ou deux jours auparavant, et que c’était la seconde fois qu’elle se rendait à Bénarès. Sa première visita remontait à 1927, et avait été une étape sur sa route vers Hardwar, à l’occasion du grand marché de Khumba.

    Je revins le 7, comme prévu, à l’endroit où elle habitait. Et en réalité, je vins deux fois par jour durant le bref séjour qu’elle fit à Bénarès et qui se finit le 12 Septembre. Je me souviens très bien que je n’ai pas fait faute de me rendre là-bas un seul jour pendant cette période. Mais c’est difficile de rendre compte après un laps de temps de plus de dix sept années de mes premières impressions d’alors sur Mâ, et d’essayer de formuler à l’aide de mots ce que j’ai alors ressenti. Tout ce que je peux dire, c’est que ce que j’ai alors vu de mes propres yeux, dépassait de loin tout ce que l’on peut imaginer rencontrer dans le monde naturel ; c’était un rêve concrétisé sous mes yeux. Pendant les quelques jours que Mâ passa à Bénarès, la maison de Kunja Babu fut le tableau vivant d’une intense ferveur, et un flot ininterrompu de visiteurs s’y succédait du matin avant l’aube, jusqu’au soir, bien après minuit. Les portes de la maison étaient en permanence laissées ouvertes, et qui voulait y pénétrer était le bienvenu. Personnalités de haut rang, pandits, étudiants d’université, commerçants, saddhus, sannyasins, prêtres, laïcs et mendiants – tous surgissaient en nombre, chacun à leur convenance, pour avoir la chance d’avoir son Darshan, de lui offrir leur respect, et dans la mesure du possible, d’échanger avec Elle quelques mots. Des gens des deux sexes, de tous les âges et de tous les rangs de la société formaient cette foule. Certains ne venaient que dans le but d’avoir son Darshan, d’autres pour trouver une solution à leurs doutes intérieurs, et d’autres enfin par pure curiosité. La magie de la situation voulait que tous sentent le charme magnétique qui émanait de la personnalité de Mâ, ainsi, ceux qui étaient venus une première fois par curiosité, ne résistaient pas à la tentation de revenir, non plus pour satisfaire une curiosité, mais guidés par une mystérieuse attraction. Ce que tous sentaient, en fait, c’était la sensation de se retrouver comme de tout petits enfants en présence de leur mère bien aimée. L’austérité et la froideur formelle étaient remplacées par une chaleureuse intimité, une familiarité immédiate.  Mâ se conduisait avec eux tous comme avec ses propres enfants – tendre, prévenante, et très intime. Il n’y avait pas la moindre réserve dans Son regard, ni aucune retenue dans Son expression. L’atmosphère générale donnait l’impression d’un rassemblement amical, imprégné de gaieté et de bonheur.

    Chaque soir, on organisait une sorte de rassemblement informel dans la cour où les visiteurs s’asseyaient en rond autour de Mâ, et la pressaient de questions. Elle répondait à chacune, apaisant les doutes des chercheurs (de sagesse…) de quelques phrases avec Sa manière inimitable et douce de le faire. Du fait que les chercheurs venaient tous de niveaux culturels différents et représentaient des courants intellectuels et spirituels spécifiques, il va de soi que les questions posées abordaient un grand nombre de sujets, et soient de valeur et d’intérêt variés. C’était incroyable de voir de quelle manière Mâ s’adaptait à chacune de ces questions avec la même aisance, et la même spontanéité, sans demander, ne serait-ce qu’un moment de réflexion avant de répondre aux problèmes les plus abstraits et les plus intriqués qu’on lui présentait. Ses réponses étaient invariablement de la plus grande pertinence, allant droit au cœur de celui qui L’avait interrogée, et formulée dans une langue remarquable par sa concision et son expressivité. Chaque mot qui sortait de ses lèvres avait un impact, et lorsque l’occasion s’y prêtait, un trait d’humour ne se faisait pas attendre.  

 

 

==== (pas prispour automne 2005)

    Mâ était à cette époque, une interlocutrice hors du commun. C’est une qualité dont toute personne ayant eu le privilège de parler avec elle pouvait témoigner, même des années après. Il était intéressant d’observer qu’elle manifestait une attitude de réticence inaltérable vis-à-vis des questions qui n’étaient pas véritablement sincères dans leur nature –soit qu’elles relevaient d’un domaine plus académique, soit qu’elles essayaient de soulever des opinions propres à blesser les sentiments d’un certain nombre de personnes. Des célébrations de Kirtan différents rivalisaient entre elles chaque jour, au-devant de Mâ pour glorifier le Divin et son nom. Des dévots à la voix mélodieuse tenaient pour une distinction et un honneur qu’on leur permette de La régaler de leurs chants. Généralement, en ces occasions, quand la musique s’écoulait spontanément du plus profond du cœur d’un chanteur, ou au beau milieu d’une conversation, lorsqu’un point crucial était abordé, on pouvait observer que l’apparence de Mâ se nimbait d’un rayonnement de Bhava, et que son état normal était en train de subir une transmutation vers quelque chose d’un ordre appartenant au surnaturel. On avait l’impression que la personnalité habituelle que les Bhaktas  côtoyaient, était remplacée, pendant un certain laps de temps, par une présence d’une autre nature. En de pareils moments, on observait des phénomènes variés et inhabituels.

Des « Stotras » et des « Mantras » d’une qualité extraordinaire jaillissaient de ses lèvres, avec une telle rapidité qu’il était impossible à qui que ce soit de les identifier. La langue dans laquelle ceux-ci étaient prononcés, était unique. Ce n’était pas, à proprement parler, du sanskrit ou un de ses dérivés vernaculaires, bien qu’on puisse reconnaître ça et là quelques mots épars de Sanskrit. De nombreux mots étaient inconnus et même ceux que l’on croyait venir du Sanskrit ne paraissaient pas avoir le même sens. De plus des Bijas monosyllabiques – connus ou inconnus – émaillaient ses paroles. La prononciation en était si parfaite que même un son conjoint, fait de plusieurs consonnes et sans voyelles inter-vocales, était parfaitement distinctement audible. Quelquefois, en de pareilles occasions, Mâ répandait des larmes ou des exclamations, et parfois encore, elle devenait rigide et entrait dans une sorte de transe.

     A cette époque, des états de transe surgissaient aussi lorsque des Bhaktas déposaient des fleurs à ses pieds, ou lui offraient, d’une façon ou d’une autre, un acte propiatoire. La réponse surgissait immédiatement.

    Il y avait à l’époque une divergence d’opinion quant au statut précis de Mâ, certains soutenaient qu’elle était une déesse incarnée, soit Kali, soit Durga, ou encore Sarasvati ou Radha. D’autres pensaient qu’elle était un être humain, ayant atteint la perfection dans cette vie, après une série de renaissances où un progrès spirituel avait pu venir à son terme et à sa complétude. Enfin, d’autres soutenaient le point de vue qu’elle était une Brahmavadini du temps jadis, ou peut-être encore une incarnation du divin venue sur terre pour apaiser les souffrances. On l’identifiait parfois à Sukadeva, et parfois même à Sri Krishna. Des personnes d’une nature plus mondaine soutenaient qu’une entité spirituellement supérieure – humaine ou céleste – possédait son corps et l’utilisait en vue de ses fins propres. Un monsieur de ma connaissance, qui habitait alors dans une maison adjacente à la mienne, et qui travaillait dans un des lycées locaux, alla même jusqu’à me soutenir que Son cas relevait clairement d’une possession – et que même si elle était le fait d’un bon esprit, il était souhaitable que l’âme d’origine retournât habiter son corps et se libère de cette possession. Ce monsieur, qui était d’un certain âge et qui avait la réputation d’être un pratiquant tantriste de longue date, soutenait qu’il détenait le pouvoir de rendre Mâ à sa condition normale, à la seule condition que son mari et son père donnent leur accord. Son idée était que le cours normal et l’évolution de Sa vie, étaient, du fait de cette « possession », entravés dans son développement, et que dans son propre intérêt spirituel, cette « manipulation » (retardant son évolution) devait lui être retirée. Il va sans dire que personne n’attachait la moindre importance à ses paroles. Un jour, le grand orateur qui allait devenir Swami Dayananda du Bharat Dharma Mahamandal, vint voir Mâ et eut une conversation privée avec elle. Bien que cette conversation entre Swamiji et elle dû demeurer privée, on convint que le futur Sasanka Babu et moi-même, puissions demeurer présents en cette occasion. Swamiji put poser plusieurs questions à Mâ auxquelles elle répondit immédiatement.

Ainsi :

Swamaiji : Mère, qu’êtes-vous en réalité ? Les gens sont tous d’un avis contraire, et personne n’arrive à se mettre d’accord. Que diriez-vous pour vous définir vous-même ?

 : Vous voulez savoir ce que je suis… ? Et bien, je suis ce que vous pensez que je suis. Rien de plus, ni rien de moins.

Swamiji : Quelle est la nature de votre Samadhi ? Est-il d’un Savikalpa ou d’un Nirvikalpa ? Devenez-vous consciente ?

 : Et bien, c’est à vous d’en décider ! Tout ce que je peux dire, c’est qu’au beau milieu de tous ces changements apparents, je sens et je suis consciente que je demeure la même. Je sens qu’au-dedans de moi, il n’y aucun changement d’état. Appelez ça du nom que vous voulez. Est-ce un Samadhi ? Bien des fois, cette question a été posée, et on y a répondu.

 

    Les quelques jours où Mâ resta à Bénarès suffirent à me convaincre de la grandeur de Sa personne, et de la sainteté hors du commun de sa vie. J’appris son histoire de la bouche de ceux qui l’entouraient, parmi eux, il y avait Bolanathji, Sœur Gurupriya, Sansanka Babu et d’autres, et je me rappelle encore avec bonheur ces occasions si joyeuses où Mâ elle-même consentait à évoquer les événements de son enfance, et ses développements ultérieurs quand elle était à Bajitpur et à Dacca. C’étaient des histoires d’un tel intérêt qu’on était tous passionnés. Ces histoires qui rapportent une époque de sa vie où elle se trouvait à Astagram, Bajitpur et Dacca, ont été depuis mises par écrit par ses admirateurs et disciples, et l’histoire de sa vie postérieure à cette époque, jette une lumière mémorable sur la qualité totalement unique de sa personnalité.

    D’ailleurs, la chose qui me frappa le plus en elle à cette époque, était Sa personnalité. Ses traits physiques émanaient un rayonnement magnétique – aussi bien sa contenance souriante, la douceur de son expression que la simplicité de sa vie et de sa conduite. Son indéfinissable façon d’être, comme la cordialité et la chaleur de ses relations avec chacun, ceci allié à une vie d’une extraordinaire sainteté et d’une profonde sagesse, faisait d’elle l’objet d’une attraction et d’une adoration universelle.

 

 

Shrî Mâ à Solan

par Bithika Mukerji

 

(Extraits de ‘Ces jours anciens avec Mâ Anandamayi’)

 

    Ces jours à Solan furent  merveilleux et tout pleins d’incidents mémorables. Une fois, tandis que le kîrtan  se déroula, Shrî Mâ quitta son siège dans la véranda et entra dans le cercle des chanteurs,  levant sa main droite dans ce geste inimitable qu'elle effectuait durant les nâma sankîrtans. Gini et moi-même avions entendu dire que Didi se tenait toujours derrière Shrî Mâ quand elle se déplaçait avec un groupe de kîrtans, nous envoyâmes donc quelqu'un chercher Didi et toutes les deux nous nous glissâmes dans le cercle des hommes  pour être derrière Shrî Mâ. Pratiquement à la seconde suivante, nous nous sommes retrouvées avec nos mains agrippées par Shrî Mâ ; elle nous reconduisit tout simplement droit à la véranda puis entra de nouveau dans le groupe de kîrtans. Elle avait été si rapide qu’on n'avait même pas noté son absence et que nous avions eu l'impression qu'elle était juste sortie et rentrée dans le même mouvement. Nous avons réalisé plus tard que Shrî Mâ ne permettait pas aux jeunes filles de se mêler à la foule. Elle ne faisait pas semblant d'avoir un état d'âme extatique durant ces kîrtans, mais elle représentait tout le temps un mélange si harmonieux de surnaturel et de sens pratique que nous vivions à tout jamais dans un pays merveilleux où tout événement extraordinaire était possible.(p.133)

 

    Les mahâtmas voulaient en savoir plus sur la sâdhanâ de Mâ, en particulier sur sa période de « jeu de sâdhanâ » qui a duré plusieurs années dans sa jeunesse à Dhaka. Elle dit : "Tout cela est survenu naturellement. Vous savez tous ce que ce corps n'a pas lu sur de tels sujets ni n’a appris d'autres personnes. De plus, en voyant mon absorption en méditation, beaucoup de gens pensaient qu'ils pourraient m’aider en me parlant de sâdhanâ ou en me lisant des ouvrages sur le travail spirituel. De tels efforts étaient absolument rejetés par ce corps comme s’ils étaient des briques jetés contre un mur massif. Parfois, des conseils venant de l'extérieur étaient aussi perturbateurs qu'un choc électrique - et dissipaient tout simplement l'inspiration intérieure du moment."

    "Tout venait de l'intérieur. Les manifestations des mantras védiques, le rythme, comme ils étaient beaux ! Dans la sâdhanâ, il y a des niveaux, il y a des états durant lesquels les mantras se révèlent d’eux-mêmes. Certains d'entre vous ont vu comment ce corps en était affecté. Quand les mantras védiques sortaient en abondance de ce corps, il assumait les postures justes tandis que les mains prenaient les gestes appropriés ; le flux de la respiration était en accord avec les paroles, même le regard était changé. Tous les mantras ont leur forme spéciale de manifestation. Quand ces manifestations sont spontanées, l'aspect extérieur de l'être intérieur est révélé, et toutes sortes de phénomènes sont possibles. En ce qui concerne ce corps,  il n'est pas question de stade postérieur ou antérieur. Tout ce qui devait se passer se révélait pleinement et ensuite laissait place à quelque chose d'autre. Le processus naturel a sa propre splendeur. Vous plantez une graine ou une pousse et vous vous mettez à la soigner - et l'arbre émerge dans toute sa gloire avec des feuilles, des fleurs et des fruits. On n'a pas besoin de tirer sur les bourgeons. Tout arrive en son temps et déploie une beauté qui lui est propre. Tout ce dont on a besoin, c'est d’un soin constant.

    La sâdhanâ n'a pas amené de changement dans ce corps - il est resté tel qu'il est. Vous pouvez le comparer à une boule de pâte - vous pouvez en faire ce que vous voulez, un oiseau, un animal, un arbre, une poupée, et ensuite en faire de nouveau une masse amorphe ".

   Durant ce séjour à Solan, je me souviens d'un autre incident plutôt étrange. Un monsieur, N., avait accompagné Shrî Mâ à partir de Bahrampour au Bengale. il était très calme, mais Shrî Mâ lui marquait une attention particulière à tout moment. Shrî Mâ nous dit une fois que sa femme venait la voir fréquemment. Un jour, Shrî Mâ a vu une  cicatrice récente sur son bras et lui a demandé si elle s'était blessée. Cette dame me raconta alors l'épouvantable histoires de son mari alcoolique. Ce monsieur, un riche propriétaire terrien, avait l'habitude de se laisser aller parfois à des beuveries en oubliant complètement son statut et ses devoirs dans le monde. Quand il sortait de sa stupeur alcoolique, sa femme se blessait elle-même pour protester contre son mode de vie. Il regrettait, promettait de ne plus jamais boire mais un autre accès revenait inévitablement. La dame a montré à Shrî Mâ comment ses bras et ses jambes étaient pleins de ces blessures qu'elles s'étaient infligées à elle-même, et qui s'étaient transformées maintenant en cicatrices.

     On convainquit N. de visiter Shrî Mâ. Elle lui demanda s'il voudrait bien l’accompagner où qu'elle aille. Il a dû avoir conscience de sa grâce et de sa compassion car elle ne lui a dit aucune parole de critique à propos de sa faiblesse. Il obéit et s'en alla de la maison pour être avec elle. C’était ainsi qu’il s’était retrouvé à Solan et qu’il y menait une vie tranquille. Un jour il dit à Shrî Mâ qu'il avait un grand désir de toucher ses pieds. Il savait qu'un pécheur comme lui ne devrait pas aspirer à ce privilège mais il sentait aussi que seul ce contact pourrait le sauver, ou au moins quelques paroles dans ce sens. Shrî Mâ était assise sur son chowki (lit), avec ses pieds à quelques centimètres du sol. Puisque Shrî Mâ ne dit rien, N. s’agenouilla et avec de grands tremblements et de l’agitation toucha ses pieds, les prenant dans les deux mains.

   A ce moment-là, le Dr Girin Mitra, un ancien disciple de Mâ, entra dans la chambre et prit conscience de la situation d’un coup d’œil. L'expression de Shrî Mâ était indescriptible ; en général, tous ceux ou celles de la suite de Shrî Mâ étaient supposés stopper les nouveaux venus dans leurs tentatives de toucher ses pieds. Girinda sourit et regardant Bhoupen dit : "Je  suis maintenant trop vieux pour m'engager sur cette mauvaise voie, qui a pu procurer ce grand privilège. Mais tu as l'âge qu'il faut, donc commence maintenant !" Tout le monde se mit à rire. Mâ a laissé entendre que si son khéyala demeurait si constamment sur N., c'était à cause de sa femme qui était restée loin à Bahrampour.(p.137)

   A Solan, je me suis mise à bien connaître Atmânandaji [la sannyâsinî de Mâ d'origine autrichienne qui a traduit de nombreux ouvrages sur Mâ du bengali ou du hindi en anglais. Son journal spirituel a été publié en partie dans Présence de Mâ  aux Deux Océans,  et récemment de façon plus complète dans La mort doit mourir aux éditions Accarias]. Elle et moi avions l'habitude de partir pour de grandes promenades sur les chemins de montagne. A cette époque, elle se débattait avec ses propres problèmes.(p.138)

 

 

Mâ, la mère Universelle

Par Anil Guha

   

 

 

     Shrî Shrî Mâ Anandamayî est un nom unique dans le royaume des saints et des sages de l'Inde. Elle est née le 30 avril  1896 dans un simple hameau appelé Khéora (au Bangladesh) dans une famille brahmine pieuse. Elle a été nommée avec affection Nirmalâ (immaculée) par ses parents, son père Bipin Bihari Bhattacharya et sa mère Mokshada Sundari Dévi (connue plus tard sous le nom de Swâmî Mouktânanda Girijî, après avoir pris le sannyâs en 1938). Contrairement au mortel ordinaire, elle était apparue sur cette terre avec pleine conscience. Ceci s’est révélé clairement dans les années qui ont suivi grâce à sa propre lîlâ (jeu) et à ses paroles. Elle a dit souvent à ses fidèles : «Je suis toujours avec vous... Souvenez-vous, où que vous soyez, proches ou loin, de tout ce que vous faites, rien n'échappe à l'attention de ce corps [la manière dont Mâ se désignait-elle même].» Paramhamsa Swâmi Yogânanda cite Shrî Mâ dans son fameux livre l'autobiographie d'un yogi : « Ma conscience ne s'est jamais associée avec ce corps temporaire. Avant de venir sur cette terre, j'étais la même. En tant que petite fille,  j'étais là même, et quand j'ai grandi pour devenir une femme, je suis demeurée toujours la même. Et en face de vous, maintenant, je suis la même. Après également, à travers la danse des changements et de la création autour de moi, je resterai la même. » Cette affirmation indique très clairement le fait que Mâ Anandamayî est toujours restée en unité complète avec Brahman, le Non-manifesté.

 

     La petite Nirmalâ s'est développée en une fille exceptionnellement belle et aimable, et dès l'âge de treize ans on la maria à  Ramani Mohan Chakravarti qu'on a appelé plus tard Bholanâth ou Pitajî. C'était le 7 février 1909. En décembre 1922, celui-ci a reçu l'initiation de Mâ et il a été peut-être été le premier fidèle et disciple à propos duquel Mâ ait dit : « Il menait une vie extraordinaire de renoncement à soi-même et d'ascétisme rigoureux ». 

 

    Quelques années après le mariage, à Ashtagram, la nature spirituellement très élevée de Nirmalâ a été reconnue par un certain Hara Kumar Roy : un jour, tandis qu'il la saluait avec révérence, il s'exclama d'une façon prophétique : « Maintenant, c’est moi qui vous appelle Mâ, mais un jour, ce sera le monde entier vous appellera ainsi ! ». De nouveau, une autre personne, Kshetra Mohan, un ami de Bholonath,  a découvert la déesse Durgâ en Mâ et s'est prosterné devant elle.

 

    Nirmalâ Chandra Chattopadhyay à Dacca, une autre fidèle ardente de Mâ, a vu Mâ à Shahbag sous la forme de Sarasvâtî Dévî. Pramatha Babu, encore un autre de ses fidèles, a souhaité un jour en son for intérieur avoir la vision de Mâ en tant qu'incarnation (mûrtî)  de Kali Chinnamasta. Une fois, Mâ l’emmena  avec Bholonath au temple de Kali Siddhesvarî. Un serviteur de Pramatha Babu les avait aussi accompagnés. Mâ resta  assise en silence là-bas pendant longtemps mais quand la paix fut répandue de façon parfaite alentour, elle se mit debout et Pramatha Babou vit clairement en elle cette forme de Kali Chinnamasta. Plus tard, le serviteur de Babou révéla que Mâ lui était aparue sous forme des dix Mahavidya [littéralement « les grandes connaissances », les dix formes terribles de la déesse Kali].

 

    Plus tard, alors qu'elle résidait dans différentes parties du pays  en établissant des relations spirituelles avec ses fidèles, beaucoup d'entre eux l'ont vue sous différentes formes divines. Le râja Durga Singh de Solan (connu plus tard sous le nom de Yogi Bhai) avait reconnu Mâ sous la forme de Bhagavati Durgâ. Un industriel du Goujarat (Shri Munsha) avait distingué  en elle sa divinité d'élection, Amba Dévi. Shri GS Pathak y avait vu la déesse Sarasvâtî. Il y a de très nombreux exemples de ce genre de fidèles qui ont  reçu la bénédiction de voir Mâ sous différentes formes. Cela confirme ce que Mâ avait l'habitude de dire : « Ce corps est tout ce que chacun d'entre vous pense qu'il est ».

 

       Il y avait un autre trait unique qu'on pouvait remarquer durant toute la vie de Shrî Mâ, et qui l'a révélée comme la Mère universelle acceptant toutes les religions comme des chemins menant à la Réalité ultime. C'était au tout début  de son existence, quand elle avait à peine cinq ou six ans, dans le village où les missionnaires chrétiens étaient venus prêcher leur foi.  Elle leur courut après et leur acheta un livre sur le Christ en en payant le prix de deux centimes. Elle voulait tout savoir à propos de Jésus. Plus tard, un frère de Bholanâth qui dans sa jeunesse avaient fugué de la maison et était devenu chrétien pour même finalement s'engager dans la prêtrise, est venu voir Mâ qui était alors largement reconnue comme une sainte aux vertus rares, et l'a saluée respectueusement. Shrî Mâ n'hésita pas le bénir.

 

     Les proches de Shrî Mâ pendant sa jeunesse ont observé qu'elle est passée à travers des phases distinctes marquées par des types différents d'épanouissement spirituel. La première phase qu'on appelle d'habitude le « jeu de la sâdhanâ » a couvert à peu près les années 1918-1924. La sâdhanâ de Mâ étaient cependant d'un genre différent. Elle a expliqué sur ce sujet à l'un de ses fidèles: « Il me faut vous dire que ce que je suis, je l'ai été depuis la petite enfance; mais quand les différents stades de la sâdhanâ se sont manifestés à travers ce corps, il y a eu comme une surimposition d'Ajñâna, d'ignorance ; mais qu'elle sorte d'Ajñana était-ce ? C'était réellement Jñâna, la connaissances, déguisée sous forme d'Ajñâna... » Elle a ensuite développé plus avant  cette nature inhabituelle de sa sâdhanâ. « Un jour à Bajitpur, j'ai été me baigner dans un étang près de la maison où je vivais. Pendant que je versais de l'eau sur mon corps, le khéyâla me vint soudainement : « Qu'est-ce que cela ferait si je jouais le rôle d'une 'sadhika' (une aspirante spirituelle)? C'est ainsi que la lîlâ a commencé ». Mais quelle sorte de sâdhanâ était-ce pour Shrî Mâ ? Etait-ce vraiment nécessaire pour des maîtres réalisés de pratiquer la sâdhanâ ? On a largement débattu de cette question dans la littérature indienne  sur les religions. Les fidèles de Shrî Râmakrishna soutiennent qu'il s'était engagé volontairement dans la sâdhanâ seulement pour inspirer ses disciples à se soumettre à des disciplines religieuses intenses. Contrairement à la sâdhanâ de Shrî Râmakrishna sous l'autorité de différents gourous, Shrî Mâ n'a reçu d'initiation aucun gourou. Elles étaient en fait son propre gourou. Ceci est arrivé la nuit de Jhulan Purnima [où l'on célèbre Krishna] en août 1920. Pendant qu'elle se préparait pour le rituel habituel de la nuit, elle reçut l'inspiration de jouer à la fois le rôle de gourou et de disciple. Le bija mantra, le mantra d'initiation qui ne comporte qu'une syllabe, s'échappa de ses lèvres spontanément et elle le répéta avec la réalisation que gourou, disciple et mantra ne sont qu'un. Shrî Mâ a expliqué  la signification sous-jacente de l'initiation de la façon suivante:  « C'est Dieu lui-même dans le rôle du précepteur spirituel (gourou) qui a révélé son nom aux pèlerins qui se lancent à la recherche d'un guide ». Il n'y a peut-être pas d'autre exemple connu d'auto-initiation. Ainsi dans la vie de Shrî Mâ, nous pouvons distinguer l'épanouissement spontané d'une lîlâ plutôt qu'une sâdhanâ.

 

   A Shahbag, le jardin qui était la propriété du Nawab de Dacca et dont Bholonath était l'intendant, Shrî Mâ passait la plupart de son temps plongée en extase. C'était à cette époque qu'un événement unique, la découverte de l'ancien temple à Kali, eut lieu à l'instigation de Shrî Mâ. Tandis qu'elle était encore à Bajitpur quelques années auparavant, elle avait eu la vision de ce temple. Après s'être informée à Dacca, on l'a menée à un temple de Kali abandonné, presque inaccessible au milieu d'une jungle sauvage et sombre. On disait qu'il avait été visité dans le passé par nombre de saints et de sages fameux d'Inde, y compris le grand Adi-Shankarâchârya (788 - 820) qui avait passé quelques jours là-bas. Après avoir découvert ce temple, Shrî Mâ s'est mis à passer beaucoup de temps là-bas. Un jour à midi à Shabagh, Shrî Mâ a envoyé soudainement chercher à son bureau Bhaïjî ( JC Roy, à l'époque haut fonctionnaire du gouvernement du Bengale) qui était l'un des premiers fidèles de Shrî Mâ et qui avait eu le privilège unique d'être accepté comme son dharmaputra, son fils selon le Dharma (filleul, fils spirituel). Quand il arriva, elle lui demanda de l'accompagner à Siddhesvarî. Il y avait là-bas à l'époque un petit creux dans le sol où se trouve maintenant un pilier de taille réduite ainsi qu'un shivalingam. Mâ s'assit dans ce creux et son visage se mit à rayonner, à transpirer d'une joie radieuse. Voyant ceci, Bhaïjî s'est exclamé en s'adressant à Bholanâth : « A partir d'aujourd'hui, nous allons désigner Mâ du nom de Anandamayî », ce à quoi Bholonath obtempéra de suite. Ainsi, la 'Mâ' reconnue par Hara Kumar devint 'Anandamayi' pour Bhaïji, et la postérité l'a connue sous le nom de Shrî Mâ Anandamayî, la Mère universelle qui est toute pénétrée de félicité et qui diffuse son parfum spirituel  sur toute la planète.

 

     Le séjour de Mâ à Shabagh a été remarquable sous bien des points de vue. C'est là-bas que le docteur Sasanka Mohan Mukhopadhya, un médecin-chef du district de Dacca en retraite, et sa fille Adarini Dévî (appelée plus tard Gurupriyâ Dévî ou Dîdî) est venu en contact avec Shrî Mâ en début 1928. L'influence purificatrice de Shrî Mâ sur eux a été telle que le Dr Mukhopadya, au fil du temps, a embrassé la vie de renoncement et est devenu Swâmî  Akhandânanda; Gurupriyâ Dévî, quant à elle, a été la femme la plus dévouée à Shrî Mâ, le compagnon constant qui faisait le service de Mâ dans les débuts et ensuite l'administration des divers ashram. En outre, c'est elle qui a soigneusement noté les souvenirs précieux et tout à fait authentiques de la  lîlâ, du jeu  de Shrî Mâ au fil des années. On les a publiés depuis en dix-sept volumes, en bengali, hindi et anglais, pour le bénéfice des millions de fidèles de Shrî Mâ.

 

    Lorsqu'elle était à Shahbag à Dacca, Shrî Mâ a visité un jour  le mausolée d'un saint musulman situé dans le jardin même, et s'est mis soudainement à réciter des versets du coran. Des fidèles musulmans qui étaient alentour se sont exclamés qu'il n'avait jamais entendu de récitation si claire du coran de qui que ce soit auparavant. Ils étaient stupéfaits, d'autant plus qu'ils savaient bien que Shrî Mâ n'avait jamais eu d'apprentissage de ce texte sacré chez quiconque auparavant. Le jardin de Shabagh, là où Bholonath et Shrî Mâ demeuraient appartenait à la famille du Nawab de Dacca, dont Bholanâth étaient l'employé à l'époque. La Nawabzadi Pyari Banu et les membres de sa famille ont été attirés par la ferveur spirituelle inhabituelle de Shrî Mâ et sont devenus ses ardents fidèles, à tel point qu'au mariage de ses deux seuls enfants, sa fils et sa fille, célébré le même jour à Calcutta, elle a invité Shrî Mâ à être présente au cours des deux cérémonies qui eurent lieu dans deux maisons différentes. Une vieille histoire de famille a été aussi réglée à l'amiable grâce à l'intervention bénéfique de Shrî Mâ, et tous en furent satisfaits.

 

   On sera intéressé de savoir que, bien que le jardin de Shahbag ait été la propriété de la famille d'un Nawab musulman, la poujâ annuelle de Kali y a été célébrée en présence de Shrî Mâ et que la femme du Nawab, Pyari Banu, plaça une guirlande en or autour de l'idole de Kali. C'étaient le type d'intégration spirituelle que Mâ induisait entre les deux communautés.

 

    Shrî Mâ avait aussi des centaines de fidèles Sikhs, y compris nombre de saints de cette confession tel qu'Avadhûtjî qui était devenu tout à fait proche de Mâ. Beaucoup de fidèles de Jalandhar, Ludhinana et d'autres lieux viennent souvent à l'ashram de Kankhal, où il y a le Mahâ Samâdhi Mandir (Ananda Jyotî Pîtham) et sont présents en bon nombre à l'occasion des grandes fêtes. Ils conquièrent le coeur de tous les fidèles et membres de l'ashram par leur dévotion et leur service généreux. De multiples chercheurs spirituels du monde entier appartenant à toutes sortes de croyances, de castes et de religions différentes sont venus voir Shrî Mâ pour avoir des réponses à leurs questions spirituelles, et s'en allèrent pleinement satisfaits, avec une bénédiction de paix et de consolation. Ceci indique l'universalité de Shrî Mâ dans son approche à la vie spirituelle, elle voyait l'humanité comme un tout intégré et identifié avec l'Un unique,  ce sont les termes mêmes de Mâ .

 

     Jusqu'en 1928, les activités de Shrî Mâ sont restées principalement confinées au district de Dacca. Mais la 'marée montante' était déjà venue et il devenait difficile de la retenir. En mai 1928, elle alla visiter les temples de Déogarh au Bihar où elle rencontra le saint célèbre Balânanda Brahmâchari; celui-ci, profondément impressionnés par son comportement spirituel, n'eut pas d'hésitations à proclamer : « Elle est la Mère divine incarnée ». Grâce à Balânandajî, de nombreux autres saints de l'époque sont rentrés en contact avec elle. Ce n'était qu'un début. Où qu'elle puisse aller, à partir de ce moment-là, elle attirait comme un aimant non seulement les gens en général, riches ou pauvres, quelles que soient leur caste, leurs croyances, leur couleur ou leur religion, mais aussi les saints les plus réputés de tous les coins de l'Inde et de l'étranger. En fait, en réalité, lors des dernières années de sa vie, les saints et les sages se sont rassemblés autour d'elle pour recevoir sa bénédiction d'une façon telle que cela rappelle le verset de la Bhagavad-Gîtâ (IV, 8):

 

Paritrânâya sâdhûnâm vinâshâya cha duskritâm

Dharmasansthâpanârthâya samhavâmi yuge yuge

 

   Afin de soutenir le bien, afin de détruire le mal, pour rétablir le Dharma, j'interviens d'âge en âge.   

     On peut peut-être être dire que c'est lors de son séjour à Déogarh qu'elle s'est mise à vraiment remplir sa fonction d'aider et conseiller les gens. D'abord dans le Bengale oriental, et ensuite dans le nord de l'Inde, elle visita d'innombrables  lieux de pèlerinage. Pendant ces voyages, beaucoup de fidèles, hommes ou femmes, jeunes ou vieux se sont joints à son entourage. Certains quittèrent de façon permanente la maison familiale et demeurèrent auprès de Shrî Mâ. C'est ainsi qu'on ressentit le besoin de construire des ashrams et que par conséquent un petit centre fut d'abord établi à Siddhesvarî, puis un autre à Râmana à Dacca. Plus tard, bien sûr, une série de beaux ashrams sont apparus dans différents centres de pèlerinage du pays, il y en a une trentaine, certains de ses ashrams ont de belles statues de différents dieux et déesses, et il y en a qui  sont investis d'une signification sacrée particulière, par exemple la Kali de Siddhesvari, le Chaliya Krishna de Vrindâvan, l'Ananda Gopal de Vârânasî, le Shrî Râma-Sîtâ et Lakshmana de Kalyanvan à Dehra-Dun, etc.. A Vindyâchal, Mâ indiqua un endroit spécifique près du lieu où il y a son ashram maintenant. Le Département  d'Archéologie du gouvernement s'est mis à faire des fouilles, et le site d'un temple ainsi qu'un grand nombre de statues de dieux et de déesses ont été exhumés.

 

     On notera avec intérêt que Bhaïjî, bien qu'il ait eu le privilège de garder une association constante avec Shrî Mâ seulement pendant une dizaine d'années, a été animé de l'intuition profonde de reconnaître la Mère divine Anandamayî chez Nirmalâ, la jeune femme de village belle mais illettrée. C'était lui qui avait prédit : « La sainte Mère est l'incarnation, la manifestation de tout ce que nous pouvons concevoir de la divinité ou de la déité. Sa forme physique, ses actions et ses humeurs joueuses sont toutes surnaturelles et extraordinaires. Si nous sommes établis dans cette conviction, nous réaliserons que dans toutes nos actions, notre méditation et notre connaissance, elle est l'objet d'adoration suprême et unique, et si finalement nous concentrons notre attention sur ses pieds sacrés, nous n'aurons pas besoin d'autres havres ou refuges dans notre voyage de la vie vers l'illumination et l'émancipation spirituelle ultime.»

 

      Le fait même que Shrî Mâ ait révélé de multiples façon sa vraie nature durant une période plutôt brève est une indication suffisamment claire de l'état spirituel élevé de Bhaïjî. C'était en 1937 que Bhaïjî s'était joint à Shrî Mâ dans son pèlerinage au mont Kailash et au Lac Mansasarovar; il fut alors envahi soudainement par un besoin de renoncement complet et  reçut de Shrî Mâ l'initiation au sannyâs, sous le nom de Maunanand Parvat [littéralement « Montagne, félicité du silence »]. En revenant de ce pèlerinage, il décéda soudain à Almora dans une paix et une félicité complète sous la protection de Shrî Mâ. Après ce décès, elle fit remarquer qu'il avait atteint un état de réalisation du Soi qu'on ne pouvait exprimer par le langage.

 

     Le fait que Bhaïjî ait observé silencieusement, mais avec grande attention et de très près les diverses manifestations spirituelles de Shrî Mâ dans ses années de jeunesse, il l’a mis dans une position unique pour comprendre également la vraie nature de ses développements. Dans son livre Matri darshan, il a relevé un nombre de pouvoirs inhabituels que Shrî Mâ avait manifestés, que ce soit au niveau des mantras, de la pensée ou du Yoga. A partir de sa connaissance personnelle et de son expérience intime, il a cité un grand nombre d'exemples de tels pouvoirs qui ont émanés de Shrî Mâ pour le bien de ceux qui étaient dans le besoin ou la souffrance. Pendant cette période précoce, il arrivait que Shrî Mâ revienne à son état normal après des extases profondes et des états de  samâdhi, et que beaucoup d'activités yoguiques se manifestent alors d'elles-mêmes; à certains moments, un flot ininterrompu et suprêmement mélodieux de vérités divines émergeaient de ses lèvres sous forme d'hymnes en sanskrit remplis d'un sens spirituel riche, comme si les vérités divines avaient pris la forme de symboles sonores en provenance du ciel éternel à travers le langage de Mâ. Il est en fait dommage que simplement quatre de ces hymnes sacrés aient pu être notés, et encore seulement  en partie, pour être ensuite transmis à la postérité. Par la suite, il a cependant été possible de garder des documents authentiques des mouvements de Shrî Mâ, de ses activités, de ce qu'elle disait, de ses chants etc. sous forme de centaines de rouleaux de film, de cassettes audio ou vidéo. En outre, un grand nombre de publications sont sorties ces dernières années sous la plume de savants réputés et de fidèles, que ce soit  en Inde ou à l'étranger : ils offrent aux chercheurs de vérité un matériel précieux ouvrant sur des abîmes de sagesse.

 

    Une caractéristique de Shrî Mâ, c'était qu'elle ne restait pas confinée entre les quatre murs d'un ashram donné dans quelque partie du pays que ce soit. Elle semblait toujours être en mouvement, en général avec un entourage et parfois en ajnâta vâs, en solitude, vivant par elle même. Il n'y avait jamais de traces de fatigue sur son visage. Une fois, cependant, quand certains fidèles ont remarqué que Shrî Mâ se déplaçait tout le temps, elle les a contredit immédiatement en affirmant que, puisqu'il n'y avait pas assez de place pour elle afin de se reposer, la question de son mouvement d'un lieu à un autre ne se posait pas. La pleine conséquence de cette affirmation, c'est qu'elle n'était pas conditionnée par le temps et l'espace, sa vision étaient en fait au delà de toutes les dimensions. Elle avait souvent dit : « Il n'y a pas d'allées et venues pour ce corps ». Shrî Mâ insistait toujours sur l'unité des sois individuels, qui paraissent séparés, à l'intérieur de l'Ame suprême est unique. La multiplicité émane du Un. Et elle était toujours identifiée avec ce Un. Elle a déclaré constamment : « Il n'y a rien que le Un ». Brahman, dans le jeu de sa pensée créatrice, kheyal, avait pris des millions de formes dans cet univers manifesté tel que nous le percevons, et de même, la forme 'Anandamayî' de Shrî Mâ, la Mère universelle pénétrée de félicité s'est manifestée par sa lîlâ et ses kheyals à un grand nombre de fidèles sur la planète.

 

    Cependant, il semblait plutôt étrange pour une telle Mère divine qui ne connaît ni début ni fin, que de nombreux fidèles dans les ashrams ou chez eux célèbrent son anniversaire chaque année en grande pompe, avec joie et splendeur. Lors des célébrations de son 60e anniversaire, en 1956, un fidèle lui a demandé la signification de cet anniversaire : elle lui a répondu qu'il était vrai qu'elle n'était pas née au sens réel du terme, Krishna ne l'a pas été non plus, cela n'empêche pas malgré tout de célébrer avec une ferveur religieuse son anniversaire, Krishna Janmâshtami. De tels anniversaires, qui ne consistent que dans des rituels religieux, ont l'utilité de concentrer l'attention des gens sur le divin et ainsi d'accroître leur dévotion et leur réceptivité spirituelle. C'était en avril-mai 1982 que des centaines de fidèles de tous les pays s'étaient rassemblés à l'ashram de Mâ Anandamayî à Kankhal et ont célébré son anniversaire en sa présence physique pour la dernière  fois.

 

     Une réunion religieuse importante qu'on appelle Samyam Vrata [voeu d'auto-contrôle] a été débutée à l'instigation de Shrî Mâ en 1952. Elle revient chaque année pendant une semaine pour donner aux fidèles une discipline physique, morale et spirituelle et conférer de la beauté à leur vie. Mâ désirait qu'au moins une semaine chaque année ses fidèles essaient d'abandonner la vie du monde et consacrent cette période aux pratiques spirituelles. Le Samyam Vrata a lieu chaque année en des endroits différents. Les participants s'engagent à jeûner,  à part un repas léger,  et à s'abstenir de disputes, de bavardages stériles, de fumer, de boire même du café ou du thé, etc.,  et à observer le brahmachârya. Chacun vit dans une simplicité complète. Les participants passent la plus grande partie de leur temps occupés avec la méditation, le japa ou le kirtan , etc. Des religieux renommés pour leur sainteté et des orateurs savants de différentes parties du pays participent aussi à cette réunion qui dure une semaine et éclairent les participants sur des sujets spirituels grâce à leurs discours éloquents pendant la journée. Le soir, il y a environ une heure accordée au Matri Satsang. et Mâ de son temps répondait à toutes les questions des participants et ainsi les aidait à dépasser leurs doutes.

 

      Il y avait des aspects inhabituels chez Shrî Mâ. Tout ce qu'elle faisait émanait en fait de l'intérieur, et provenait de ses khéyâls. C'était depuis la période de Dhaka qu'elle était incapable de prendre aucune nourriture de son propre chef. Le peu qu'elle prenait devait lui être donné par des personnes très proches comme Gurupriya Didi ou Udasjî dans les dernières années. À certains moments, elle plongeait dans un silence complet pendant des journées voire des mois d'affilée. Une fois, ceci a continué pendant une période de trois ans. Souvent au milieu de programmes chargés, Shrî Mâ allait en solitude complète dans des endroits inconnus de tous. On sait sa préférence pour les règles traditionnelles. Shrî Shrî Prakash, le gouverneur du Maharashtra lui demanda en 1968 quel était le traitement qu'elle proposait pour remédier à la décadence morale et spirituelle de la société moderne. Shrî Mâ n'a pas eu d'hésitation à suggérer que la panacée étaient l'adhérence au système védique ancien dont les fondations étaient le brahmachârya, c'est-à-dire que les jeunes hommes et femmes vivent comme des célibataires en recevant une éducation spirituelle de leur gourou avant de se lancer dans la vie de famille. Elle estimait que c'est seulement si on enseigne aux jeunes le contrôle de soi, l'équanimité, l'absence d'ego et la centration sur Dieu qu'ils peuvent être bien équipés pour pratiquer cet art qu’est la vie. Le brahmachârya mène alors automatiquement à la brahmavidya, la connaissance de Brahman.

      Shrî Mâ suivait la ligne traditionnelle à propos de la nourriture aussi. Elle  insistait sur le fait de prendre une nourriture satvique, c'est-à-dire pas de viande, de poisson, d’ail ou d'oignons. En fait, elle élargissait le concept de nourriture pour signifier tout ce qui est absorbé par le mental et les sens également. Cela signifiait se libérer des pensées et sentiments impurs comme le désir sensuel, l'avidité, la haine, les inimitiés et la colère, etc. L'insistance de Shrî Mâ sur l'observance de certains rituels était aussi connue. Les sacrifices au feu, yajña, avaient une place particulière dans la manière dont Shrî Mâ ordonnait les cérémonies religieuses. Cela commença dès la période de Dhaka, en 1926, quand après la poûjâ à Kali, on alluma le feu sacrificiel pour le yajña et l'offrande finale a été consacrée, Shrî Mâ suggéra qu'on entretienne le feu sacrificiel. C'est ce même feu qui fut ensuite transporté à l'ashram de Vârânasî et après en plusieurs autres ashram y compris celui de Kankhal où on le garde  toujours allumé ­­ comme Shrî Mâ elle-même l'a demandé. Beaucoup de fidèles se souviennent encore avec vénération et crainte sacrée du Savitri Mahâyajña qui s'est tenu à l'ashram de Vârânasî pendant trois ans, entre 1947 et 1950. Des milliers de religieux en provenance de différentes parties du pays y ont participé. Récemment, en mai 1980, on a fait une célébration du grand sacrifice à Rudra, Ati Rudra Mahâyajña, en la sainte présence de Shrî Mâ dans une yajñashâlâ (abri spécialement conçu pour ce genre de sacrifice)  qu'on avait spécialement improvisée à l'ashram de Kankhal. Des milliers de fidèles venant de toute Inde et de l'étranger y ont pris part avec enthousiasme. Depuis, une structure permanente a été joliment édifiée, au même endroit exactement. La forme architecturale de cette yajñashâlâ unique a reçu l'accord et les bénédictions de Shrî Mâ.

 

      En insistant sur les valeurs traditionnelles, Shrî Mâ a toujours conseillé à ses fidèles d'être absorbé de plus en plus dans le japa et la méditation. La participation au satsang, la lecture de livres saints et le fait d'écouter des discours religieux avec sincérité, tout cela est sûr de mener régulièrement chacun le long de la route vers le but ultime de la Réalisation divine. Souvent Shrî Mâ demande à son audience de consacrer au moins quelque temps chaque jour au souvenir du nom de Dieu sous quelque forme que ce soit, pourvu que celle-ci leur soit chère. Il est donc tout à fait naturel que dans chaque ashram qui font partie de l'Anandamayî Sangha, des satsangs, la récitation des livres saints tels que la Gîtâ, la Chandî, les kirtans, parfois l'akhanda Nâma Sankîrtan et le Nama Yajna [vingt-quatre heures de récitation continue du mahâ-mantra Hare Krishna... par les hommes et les femmes en alternance] constituent des caractéristiques de leurs activités spirituelles. Ils représentent des façons sûres de parvenir à la Réalisation de soi, et c'est simplement à travers la réalisation des individus que la transformation du monde aura lieu, rendant ainsi la planète un meilleur endroit pour que l'homo sapiens y vive dans une paix et une harmonie éternelle.

 

     Pendant son long séjour spirituel de par le pays, qui s'est étendu sur plus de 60 ans, Shrî Mâ a attiré des millions de fidèles en leur donnant l'aide et le secours auxquels ils aspiraient. Parmi ces chercheurs spirituels, on pouvait trouver des hommes d'affaire, des artistes, des savants, des journalistes, des religieux, des râjas et des reines, des chefs politiques ou sociaux, des hauts fonctionnaires, des diplomates étrangers, des gens de toutes les couleurs, castes, croyances ou religions,  des riches et des pauvres. Tout ceux, hommes ou femmes, qui l'ont rencontrée même une fois en sont revenus d'une façon constante plus heureux, ayant trouvé auprès d'elle une paix indicible de l'esprit et une joie du coeur. Sa présence, même en silence complet,  résolvait d'une façon satisfaisante  toutes les questions lancinantes dans le mental des chercheurs spirituels qui se trouvaient dans l'assistance. Shrî Mâ était sans aucun doute un exemple vivant du Dakshinamoûrtî de Shrî Shankarâchârya : Mauna bhi akshaprakâtita parabrahma tattvam «le silence représente la réalité du Brahman Suprême totalement au-delà de la connaissance (intellectuelle)»

 

 

 

 Il peut être intéressant de connaître les conseils de Shrî Mâ pour tous ceux qui veulent trouver un style juste de vie quotidienne afin de sortir des filets de ce monde de souffrance. Un malade a besoin à la fois d'un contrôle alimentaire et de médicaments. A ceux qui souffrent, Shrî Mâ suggère : Votre médicament, c'est la répétition du Nom divin et la contemplation de sa signification, votre régime quotidien sera le contrôle de soi. Pratiquez les deux ensemble pendant un jour donné de la semaine, une fois tous les quinze jours au moins une fois par mois. Plus vous le pouvez, mieux c'est. Vous devez observer les règles suivantes durant cette journée particulière de pratique

 

1.      Observez la vérité en paroles, en pensée en action.

2.      Conservez votre esprit serein durant cette journée, en préférant l'éternel à l’éphémère; avec une dévotion intense, gardez votre mental constamment orienté vers la forme divine, son message envers l'être humain et sa gloire telle qu'elle est révélée dans la Gîtâ.

3.      Maintenez une simplicité extrême de nourriture et de vêtement.

4.      Essayez pendant cette journée de garder toujours présent à l'esprit que Dieu envoie tous les soucis pour purifier votre Soi.

5.      Gardez un esprit de service pendant cette journée en considérant que vos parents, vos enseignants, vos enfants, votre femme ou vos voisins sont autant de canaux à travers lesquels votre service Le touche.

6.      Renforcez toujours la conviction que vous demeurez dans la vérité, que vous grandissez dans le sein de Dieu et que vous vous perdez vous-même pour Le trouver encore plus de jour en jour.

7.      Souvenez-vous constamment que les joies et souffrances du monde sont des ombres éphémères de votre propre Soi ; en jouant avec la force divine faites venir en vous une paix et un bonheur qui dure toujours.

8.      Laissez à votre mental toute liberté afin qu'il puisse jouer avec Lui, se réjouir des beautés de ces formes, de ses attributs et de sa grâce, et évoluer avec joie dans ce qui a été dit à propos de Lui dans les écritures par les saints de tous les pays.

9.      Quand vous sentez que vous ne progressez pas spirituellement, pensez toujours que c'est vous seul qui êtes responsables des difficultés qui vous arrivent; renforcez votre volonté  avec de plus en plus d'énergie, avec un sens de l'ego qui est plus pur et plus élevé, c'est-à-dire «je dois réciter Son nom de plus en plus pour L'appeler", ou "je vais L'adorer, apprendre à L'aimer». Ce sens du je dirigé vers Dieu est bien meilleur qu'un soi égoïste.

10.  Souvenez-vous toujours pendant la journée, que la répétition de Son Nom a assez de pouvoirs pour laver tous les péchés, que ce soit de cette  vie ou des vie passées.

 

      Shrî Mâ Anandamayî a quitté sa forme physique le 27 août 1982 à l'ashram de Kishenpour près de Dehra-Dun : son corps a été déposé dans le mahâsamâdhi de l'ashram de Kankhal le 29 du même mois. On a bâti autour un nouveau sanctuaire de toute beauté  qui s'appelle 'Ananda Jyotî Pitham' et on l'a inauguré solennellement le 1er mai 1987. On y a  aussi installé le même jour une statue de marbre blanc de Shrî Mâ Anandamayî. On a accompli dignement les célébrations du centenaire de Mâ du 3 mai 1995 au 6 mai 1996 en différents lieux du pays et à l'étranger, de nombreux fidèles de Shrî Mâ, des personnalités religieuses et des responsables de la vie sociale et publique y ont participé.

 

    Clairement, il est futile pour nous de chercher à évaluer Shrî Mâ Anandamayî. D'après ses  paroles elles-mêmes, elle est immuable, toujours existante, Satchidananda [être-conscience-félicité], la vérité elle-même et ne peut être mesurée ni par le temps ni par espace,  au-delà de toutes les dimensions. Comment pourrions-nous, nous qui sommes des êtres infimes, nous aventurer à englober ses gloires avec notre compréhension et vocabulaire limités?

 

A la fin de ces réflexions, puissions-nous chanter à gorge déployée le beau chant d'offrande de Bhaïjî qu'il a laissé à tous les aspirants à la vie divine :

 

 

«Toutes mes actions, toutes mes pensées de religion sont en fait une adoration qui

t'es dédiée. O Mère, donne-moi la bhakti et une foi ferme, afin que je puisse faire de la méditation sur toi l'ancre de mon existence».

 

Anil Guha, ex-secrétaire de l’ashram de Mâ à Delhi

 

Table

 

Paroles de Mâ

Mâ vue par ses disciples Souvenirs de 1946

Ces jours anciens avec Mâ – Mâ à Solan  Bithika Mukerji

Mâ, la Mère Universelle Anil Guha