Jay   N° 103                     Hiver 2011-2012


 

 

Paroles de Mâ

 

 

 

Chapitre  4 de ‘Les Enseignements de Anandamayî

Concernant la vie d’ashram et de famille

                                                       

Ce corps ne construit pas d’ashrams. Il est un ashram qui s’étend partout et transcende tout – où que vous considériez qu’il se trouve. Vous croyez que seuls ces ashrams que vous avez construits sont à Elle. En fait, le monde tout entier est un ashram pour ce corps. Le second, où est-il ?

 

Par suite du manque de l’ashrama du brahmacharya (observance de l’abstinence et de la chasteté durant le stade initial de la vie), les règles des autres ashrams (stages de vie) ne sont pas strictement respectées. Or, un édifice ne peut être construit comme il se doit sans de solides fondations.

 

L’ashram est un lieu où il n’y a pas de travail (a-shrama). Et en fait, sans Dieu, le travail est partout. Où est le repos ? Même dans l’ashrama de grihasta (la vie de famille), si on rend service avec le sentiment de Le servir, alors, alors seulement, cela revient à une vie d’ashram.

 

 Vous êtes la mère, vous êtes le père, vous êtes le frère, l’ami, le maître – tout. Là où chaque chose est régie par un principe, c’est là qu’existe véritablement un ashram (ou un ‘ashrama’, c'est-à-dire un stade de la vie pouvant être vécu tout à fait spirituellement). Aucune question n’est soulevée à propos de « limité » ou « d’illimité ». Tout est un et appartient à l’un. Il y a la dualité dans deux. Là où il y a un voile, il y a aveuglement.

 

                                                       

Un temps précieux est en train de passer. Tous les membres des ashrams, filles ou garçons, qui évoluent dans un bel environnement, devraient s’efforcer d’en tirer un enseignement bénéfique. Personne ne sait quand, personne ne sait  à qui, Dieu accordera l’illumination. C’est pourquoi il est du devoir de l’homme de se vouer à Dieu. Paix, amour, amitié, joie, vérité, endurance et patience, voilà ce que tous les ashramites devraient posséder.

 

                                                       

Un brahmacharîn peut-il être créé ? Un brahmacharîn devient ce qu’il est de par lui-même. Nous prenons nos propres samskara (impressions latentes) avec nous quand nous naissons et quand nous nous engageons dans les actions.

 

                                                      

Un brahmacharîn qui vise à devenir un sâdhu devra maintenir une attitude  de renoncement. La paresse, la passion, la célébrité, la flatterie, sont des obstacles à vraiment éviter. Sachant cela, agissez dans le but de bien faire. Portez une attention particulière au code de conduite des brahmacharîn et des sâdhu. Il ne faudrait même pas aller dans telle direction qui pourrait choquer les gens extérieurs et ne pas être pour le bien.

 

Ce que l’on dit être le bonheur familial est transitoire. Il est aussi cause de souffrance. A chaque pas la souffrance est là. Les obligations doivent être accomplies avec la meilleure efficacité possible sur ce long trajet de patience. Priez toujours pour obtenir la grâce de Dieu.

 

Vous devez être amenés à suivre la voie de la vie familiale en tant que chemin de sagesse.

                                                             

Il est difficile de mener une vie spirituelle sans prendre appui sur la vie de famille. Accordez une attention toute particulière à ce qui vient de l’intérieur. Que sa seule volonté soit faite.

 

                                                      

Dieu lui-même est là, sous ses formes infinies, dans chaque foyer. Il se peut qu’il faille partir à peine arrivé, deux jours avant ou deux jours après. Il peut y avoir de grandes souffrances dans la vie d’un foyer. Ces souffrances sont le lot de toutes les familles. Comment trouver le réconfort lors de ces moments, si ce n’est en se réfugiant en Lui, le Créateur, le Préservateur et le Destructeur ?

 

                                                      

Le vidvat sannyâsa (renoncement conscient, intérieur) est en fait le véritable sannyâsa. C’est une grande chance que d’avoir le sannyâsa. Tout abandonner. Le sannyâsa c’est l’annihilation de toutes choses. La négation du sens de la négation. S’engager dans le sannyâsa (vividisha sannyasîn) ou devenir spontanément sannyasîn (vidvat sannyasîn) ce n’est pas du tout pareil.

                                                                                                                                                                             Traduit par Jean E.Louis

 

VOUS  VOILA  REVEILLES.

Du chaos à la lumière.

par Jean Bastide

 

C'est par ces trois mots que nous fûmes accueillis en Inde, par ce sage hindouiste VIJAYANANDA.

Nous étions dans un moment très difficile de notre existence, consécutif à ce qu'on appelle un choc de vie, une tragédie.

L'extrême concision de ses paroles nous a plongés dans la perplexité. Leur exotisme, leur étrangeté, leur sens inaccessible nous renvoyaient dans la confusion. Elles étaient incompréhensibles.

Néanmoins, leur pertinence, inaudible pour nous à cette époque, nous a à la fois, propulsés et guidés. Elles ont été une sorte d’aiguillon qui nous a incités à persévérer sur un chemin que nous n'avions pas choisi, et dont nous ignorions la direction et le but. Cette voie, dans notre esprit, ne pouvait être qu'en rapport avec la méditation. Ce sage y vouait sa vie, et le réveil devait concerner cette démarche. Telle était notre représentation de la situation.

C'est de ce chemin que nous voulons témoigner, maintenant, parce qu'il commence à apparaître et à prendre sens.

- Le choc de vie, l'événement bouleversant, transforment l'intérieur en chaos. Tout ce qui y faisait évidence, intérêt, attachement, rejet, valeurs, devient soudainement sans intérêt. La vie elle-même est non désirable.

Peut-on se dire réveillé lorsqu'on est dans cet état de démantèlement?

La situation nous enseignait quelque chose d'essentiel nous concernant, que nous ne pouvions ni entendre, et encore moins comprendre : que nous sommes dépendants d'une organisation interne qui peut transformer soudainement toute la vie intérieure, sans aucun contrôle possible. Cela signifie que nos états internes sont versatiles et incontrôlables. Nous sommes des êtres aliénés à notre intériorité.

Ce qui fait aliénation, c'est l'ignorance qui nous sépare de la connaissance de cette intériorité.

Le sage nous indiquait que nous avions là, dans la souffrance et le désarroi, l'opportunité d'en saisir quelque chose d'essentiel pour l'être; par son engagement et sa présence lumineuse, il attestait de la pertinence et de la puissance de la démarche méditative pour réaliser cette opportunité, celle de prendre conscience de notre ignorance concernant notre intériorité.

Méconnue, cette dernière agit dans l'inconscience en toute-puissance. Nous lui sommes aliénés, parce que nous ne lui sommes pas présents. Ainsi, nous serions coupés d'une part importante qui nous constitue.

Bien davantage, nous en serions dissociés. En définitive, nous vivrions dans la dualité, que nous projetterions sur le monde que nous créons à notre image.

S'agissant d'une expérience intérieure, il est malaisé de la traduire en simples mots ou concepts.

C'est pour cela que ce témoignage prend la forme d'une voix off qui pointe des jalons, des repères, concernant ce processus intérieur. »

Jean Bastide revient à Vijayânanda dans un des derniers chapitres de son livre, en exprimant un beau témoignage sur lui :

« Chapitre 16- DU REVEIL A L'EVEIL.

C'est en entreprenant la rédaction de ce dernier paragraphe que nous apprenons que VIJAYÂNANDA est décédé.

Il était l'auteur de ces trois mots : « vous voilà réveillés ».

Nous n'avons jamais su quelle ponctuation convenait à son expression.

Le mot réveil ne signifiait pas grand-chose pour nous, à cette époque difficile.

Le sens de ce qu'il nous a dit n'est apparu, en partie, que peu à peu.

Néanmoins, il y avait une telle puissance derrière ces trois mots énigmatiques, qu'ils nous ont propulsés dans un cheminement dont nous ne connaissions ni la direction, ni l'itinéraire, et ni le but. Ils ne représentaient pas un choix conscient. Nous nous sommes simplement retrouvés sur cette voie.

L'auteur de ces trois mots était un sage qui avait consacré sa vie adulte à ce cheminement. Sans qu'il nous l'ait réellement et directement indiqué, c'est en direction de la méditation que nous sommes allés. Cela nous apparaissait comme une évidence.

C'est de ce cheminement, de cette expérience de vie, que nous voulons témoigner.

- Jacques Vigne dit des sages qu'ils sont des nomades, qu'ils vivent dans le monde, mais ne sont pas de ce monde.

Lorsqu'on a la chance de rencontrer un tel être, on est partagé entre une réaction culturelle de défense, et une sensation intérieure inouïe. Notre culture laïque crie à l'exotisme, mais tout notre être se met à vibrer étrangement, dépassant les préjugés les plus caustiques.

C'est une rencontre hors du commun des mortels.

Il émanait de cet être une telle félicitée, une telle disponibilité, une telle présence qu'on ne cesse de se demander comment ce vieillard vacillant, démuni de tout, pouvait irradier une telle aura.

Il représente probablement le symbole du devenir de l'homme. Il atteste que l'homme a la capacité de devenir humain.

L'ascèse de cet homme peut paraître surhumaine par les renoncements qu'elle suppose. Il est difficile d'envisager l'humanité s'engageant sur un tel parcours.

La difficulté vient peut-être de l'isolement et du petit nombre de ces chercheurs à contre-courant de notre culture. Moins ils sont nombreux, et plus ils doivent travailler pour remonter ce courant. Ils sont en fait seuls dans un travail qui nécessite le retrait en solitude. Spinoza pratiquait cette forme de retrait.

-La puissance lumineuse ressentie chez ces êtres, semble indiquer qu'elle provient du fait qu'ils sont délivrés de l'asservissement aux conditionnements physiologiques et psychologiques. Ils ne sont plus en apparence, soumis aux lois qui nous soumettent, nous les êtres ordinaires. Et de fait, ils apparaissent libres, et disponibles à eux-mêmes et aux autres. Ils connaissent la loi de

L’impermanence qui régit la vie sur cette terre. Ils peuvent ainsi sortir de l'illusion générée par l'attachement à tout ce qui n'est pas permanent, à commencer par leur corps et leur psychisme.

Ils sont, semble-t-il, délivrés de la peur et des réactions automatiques qu'elle organise inconsciemment.

Cela leur permet de s'établir dans la paix, l'harmonie, et dans la félicitée qui rayonne à partir d'eux. Ils n'ont plus peur, cela paraît évident.

- L'autre évidence, c'est qu'ils apparaissent libérés de leur propre ego. Ils ne sont plus asservis au fonctionnement autocentré du moi. Ainsi peuvent-ils être disponibles à eux mêmes et à l'autre.

Ils ont réduit la dissociation interne, et ils ne sont plus partagés. Ils sont unis, non seulement intérieurement, mais également avec ce qui les entoure, y compris l'univers. Ils ne sont pas entourés, mais avec, dans l'union.

De se dégager ainsi des asservissements communs aux hommes, a probablement libéré en eux un vaste espace de conscience. La tradition de cette pratique dit qu'ils accèdent à l'infini, bien au-delà des capacités conceptuelles. Ainsi, notre monde leur apparaît comme étant relatif.

- Leur puissance semble également émaner de leur foi. L'étymologie de ce terme oriente vers la croyance, mais également vers la confiance. La foi de ces êtres n'est pas uniquement issue de savoirs en rapport avec une tradition spirituelle. Elle est le fruit d'une expérience personnelle. Leur travail ascétique les a conduits, dans cette exploration, à la confiance en ce qui se passe en eux. De toute évidence, ils paraissent profondément confiants, hors du doute. Cela ne les empêche pas de rester vigilants vis-à-vis de eux mêmes.

- L'amour est peu ou pas évoqué.

Jacques Vigne parle du bonheur sans objet dont jouissent ces sages.

Peut-être sont-ils également dans un amour sans objet car sans attachement.

Ce serait un état d'amour au-delà de l'amour romantique. Dans ce dernier, l'attachement, l'affectivité, l'émotion, le désir l'engendrent au conditionnel. C'est un amour qui passe par le moi, et qui est difficilement désintéressé.

Cet état pourrait être celui de ‘l'amour/compassion’. La compassion, c'est aussi souffrir avec. Ils reconnaissent dans l'autre, asservi à sa dissociation, la souffrance qu'elle engendre. Ils sont eux-mêmes détachés de ce mécanisme, mais ils restent en empathie avec les souffrants.

- On dit de ces êtres qu'ils sont sur le chemin de l'éveil, et pour certains, qu'ils l'ont atteint

Ils se sont réalisés en se libérant de leurs conditionnements. Cela peut expliquer leur aura, et l'extraordinaire puissance qui émane d'eux.

Ces trois mots nous ont poursuivis, poussés et guidés, tout en restant incompréhensibles. Il faut croire que ce que Jung appelle le subliminal, qui les a accompagnés, a compensé fortement l'improbable investissement conscient que nous étions incapables d'assumer.

- Le réveil, pourrait s'entendre non pas comme la sortie d'un état de sommeil, mais comme l'opportunité de simplement saisir que l'on dort. On n'est pas vraiment endormis, mais aliénés inconsciemment aux automatismes générés par notre condition d'êtres incarnés. Dans un choc de vie, il y a à la fois le risque de ne pas pouvoir en survivre, mais également l'opportunité de transformer la vie en une vie différente, autre. Cela nécessite de pouvoir faire le deuil, de renoncer à ce qui n'est plus, à jamais. Il s'agit d'arriver à se libérer de l'asservissement à la fonction homéostasique, qui tente de rétablir l'équilibre interne à partir du même, à partir de ce qui était avant, mais qui n'est plus là. C'est se confronter aux forces puissantes de l'attachement, et de l'illusion attendue de la permanence.

Nous pouvons témoigner que vraisemblablement, VIJAYANANDA nous a puissamment et inconsciemment aidés à essayer d'emprunter ce chemin d'évolution.

- La vie de ce sage paraît s'inscrire dans le surhumain. Elle semble nécessiter, pour nous, les êtres ordinaires, de tels sacrifices qu'elle se situe dans l'impossible.

Si la vie de moine représente l'irréalisable, la méditation, y compris la simple méditation « utilitaire » opère néanmoins en nous des transformations sensibles.

Il est difficile de savoir si on est sur son chemin, ou même si on y a effectué la moindre progression. C'est un processus dans lequel les repères manquent.

On peut toutefois noter des changements dans notre comportement. Ils indiquent que quelque chose évolue.

Cela peut se situer au niveau des fréquentations : on se sent de moins en moins à sa place dans un entourage peu ou pas sensibilisé à cette démarche, ni intéressé par la pratique. On peut ressentir à ce moment là, un sentiment de solitude.

La difficulté semble résider dans l'agitation. C'est un peu comme si l'ego du pratiquant reprenait de la vigueur et du pouvoir dans ces milieux où c'est lui qui, dans l'inconscient, dirige les personnes. La stabilité encore mal assurée envoie des signaux d'alerte sous forme d'excitation inhabituelle, de montées émotionnelles, ou, plus simplement, à travers l'ennui ressenti.

Cela peut être également de la tristesse qui est ressentie, lorsque l'on constate que le  « monde ordinaire » ne représente plus le même intérêt. Celui qui est découvert à travers la méditation induit un sentiment de manque, lié à la dispersion, lorsqu'il s'absente pour cause de trop grande agitation. Avec cette dernière, c'est l'émiettement intérieur qui devient rapidement lassant : il est synonyme de vide, d'absence de sens nourrissant. C'est avoir le sentiment de retourner, d'une certaine manière, en prison.

C'est en définitive une démarche d'hygiène de vie, personnelle, de base. Pour l'instant, notre culture s'en écarte. Elle ne se donne pas ce moyen simple, humainement basique mais essentiel, qui permettrait d'anticiper sur le virage comportemental que l'humanité devra négocier prochainement, par nécessité et peut être dans l'urgence.

- Cette expérience nous a permis de constater que notre suffisance et notre superficialité, et surtout une certaine forme de laïcité ignorante inculquée à l'école, nous amputaient d'une part intérieure conséquente. Dans l'étroitesse de notre ego, il y a peu de place pour la foi, quelle que soit sa forme. Ce manque peut être à l'origine de la souffrance, celle du tragique et du désespoir.

L'important semble être d'ouvrir la cage intérieure, pour s'ouvrir à l'inconnu en soi. C'est un travail sur l'esprit, sur la spiritualité.

Ouvrir son oeil intérieur, c'est y révéler des espaces illimités.

Reconnaître nos limites, nos permet d'accéder à l'illimité dans lequel il y a tous les possibles, y compris les inimaginables. Il y a de quoi être confiant, et avoir la foi en soi. Il ne s'agit pas de le croire, mais de l'expérimenter.

L'humilité devrait apparaître comme aidant dans ce processus. Elle reste néanmoins aléatoire, compte tenu de la grande estime que nous avons pour notre culture du rationalisant et du contrôle. L'attachement aveugle au moi semble nous interdire toute humilité, à l'exclusion de celle dictée par la peur.

« Qu'est-ce donc que nous crie cette avidité et cette impuissance, sinon qu'il y a eu autrefois dans l'homme un véritable bonheur, dont il ne lui reste maintenant que la marque et la trace toute vide, et qu'il essaie inutilement de remplir de tout ce qui l' environne, recherchant des choses absentes le secours qu'il n'obtient pas des présentes, mais qui en sont toutes incapables, parce que ce gouffre infini ne peut être rempli que par un objet infini et immuable, c'est-à-dire que par Dieu lui-même ? » Pascal, pensées.

Jung n'évoque pas Dieu, mais cette puissance de vie qui fait de nous des êtres extraordinairement complexes.

- VIJAYÂNADA n'est plus.

Comme c'est traditionnel dans cette culture, Il ne parlait pas de lui, et restait à distance de l'éloge. Il n'évoquait ni son travail intérieur ni sa relation de disciple avec Mâ Anandamayî. Il écoutait, et donnait un avis sobre et référencié, en rapport avec la démarche spirituelle.

Il acceptait le «namasté », par lequel on salue chez l'individu sa part divine. Son regard semblait éclairer notre part divine, et nous inviter à nous saluer nous mêmes.

C'était en août 2000, à Kankhal, un soir de mousson.

« Vous voilà réveillés » nous dit-il.

Nous étions au bord de la vie. Nous venions de perdre nos deux seuls enfants, âgés de seize et vingt et un ans.

Merci, Vijayânanda, pour ton assertivité, ta justesse pertinente et lumineuse.

 

Le pèlerinage de Mâ au Mont Kailash

De Gurupriya DeviVolme V

Eté 1936 (suite du n° 101)

 

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Mardi 2 juillet

Au lever nous avons pris quelques boissons rafraîchissantes puis nous sommes partis vers dix heures pour nous rendre chez Parvati. Nous avons dû traverser une rivière. Il y avait des champs partout autour de nous. Toutes les cimes des montagnes étaient enneigées. Le chemin montait puis descendait pour remonter de nouveau. Nous étions à pied, seule Mâ était dans son dandi. Le trajet jusqu’à la maison de Parvati nous a littéralement épuisés. Une tente avait été dressée pour nous. Nous y sommes entrés et aussitôt nous nous sommes étendus après avoir pris quelques couvertures qui se trouvaient là, à notre disposition. La mère de Parvati est venue saluer Mâ et lui a porté du lait de sa propre vache ainsi que de la nourriture. Puis elle nous a fourni tout le nécessaire pour préparer de quoi manger pour toute la troupe. Nous avons fini notre repas alors que le jour commençait à laisser place à la nuit. Peu après il s’est mis à pleuvoir. La tente laissait pénétrer quelques gouttes de pluie, mais nous avons fini par nous endormir.

 

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Mercredi 3 juillet

Nous avons prévu de nous mettre en route après avoir mangé. Nous avons donc préparé le repas puis nous avons déjeuné. Après quoi nous avons tous rangé nos affaires. Nous avons vingt-et-un chevaux à notre disposition. Nous avons en outre un dandi pour Mâ. Notre guide se nomme Sandel Singh. Il nous a demandé quarante-cinq roupies pour le travail qu’il doit accomplir. Nous avons chargé nos bagages et nous nous sommes mis en route vers treize heures trente. Le parcours que nous avons effectué était des plus difficiles. Nous étions à cheval, mais nous avions constamment peur de faire une chute. Les chevaux heurtaient sans arrêt des pierres ou des rochers qui affleuraient, ils progressaient donc lentement. Après un certain temps, le chemin est devenu moins accidenté, il semblait plus plat et même surélevé. Cela dit, il était toujours jonché de pierres de toutes tailles et son tracé n’était pas bien défini. Il y avait de la neige et de la glace partout autour de nous et il régnait un silence absolu. Il n’y avait pas le moindre signe de vie humaine, aussi loin que portait notre regard. Les lieux étaient parfaitement tranquilles et sereins. Calés tant bien que mal sur nos chevaux, nous avancions  les uns derrière les autres, lentement. Le dandi de Mâ nous suivait à une certaine distance. Nous étions souvent contraints de descendre de cheval, lorsque le terrain se faisait plus accidenté. Nous avons même dû, à un certain moment, traverser le cours du Gange. De tous côtés, des torrents jaillissaient des flancs de la montagne et roulaient précipitamment vers la vallée. A plusieurs reprises, nous avons dû traverser des rapides et nous aventurer sur des blocs de glace aussi énormes que des montagnes. Nos corps étaient engourdis par le froid. Lorsque nous avons traversé Kali Ganga, nous avons laissé derrière nous le royaume du Raja du Népal et nous avons poursuivi notre chemin.

Quelque temps après, nous sommes arrivés dans un endroit qui porte le nom de Kalapani. Quatre tentes avaient été dressées pour que nous y passions la nuit. Nous étions trempés à la fin du trajet. Et la pluie n’a pas cessé de toute la nuit. La plupart d’entre nous n’ont rien mangé tant était grande notre fatigue. Dasu et Tunu, eux, ont mangé des khichdi. Puis Keshav Singh s’est joint à eux. Ils ont fini tant bien que mal leur repas et ils se sont affalés sur leurs couvertures. Le guide a déclaré : « Demain nous devrons parcourir au moins cinq miles avant de nous reposer. Le trajet sera très difficile, il faudra donc manger avant de partir. »

Autour de nous il n’y avait, pour nous tenir compagnie, qu’une rivière bruyante et bouillonnante et une montagne gigantesque. C’était la première nuit que nous passions dans un tel environnement. Le sol était très humide, alors nous avons utilisé les tapis de sol que nous avions dans nos bagages. Il me revient à l’esprit que lorsque nous étions sur nos montures, endossant nos imperméables, nos capuchons et nos vêtements comme les Punjabi, tout semblait calme et tranquille autour de nous. Un parcours inoubliable. Notre tenue était nouvelle, la scène environnante était nouvelle et nos pensées aussi étaient nouvelles !

 

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Jeudi 4 juillet

Nous avons passé la matinée à cuisiner et à manger. Nous n’avions que cinq miles à parcourir, mais les chemins étaient tellement mauvais qu’il valait mieux partir de bonne heure. Vers onze heures nous avions terminé, mais il s’est mis à pleuvoir. Que fallait-il faire ? Eh bien il fallait se mettre en route de toutes façons. Il n’y avait pas d’autres solutions. Nous avons revêtu nos cirés de circonstance, nous avons enfourché nos montures et nous sommes partis sous la pluie. Matâjî était dans son dandi. En temps normal, le chemin était difficile, mais avec la pluie il l’était davantage encore. Souvent nous avons dû avoir recours à l’aide des coolies. Bref, aucun tronçon du parcours n’était meilleur que celui qui précédait ou celui qui suivait ! On nous a raconté que dans de tels endroits les gens libéraient leurs chèvres et qu’ensuite ils les suivaient, car elles les guidaient à travers les montagnes. Et nous, nous en étions à ce niveau de difficultés ! Parfois, un homme des collines nous indiquait la route à suivre, ou s’efforçait de le faire. Nous avons dû aussi traverser plusieurs cours d’eau torrentiels. Il nous est arrivé de rencontrer, ici et là, dans ces lieux on ne peut plus accueillants, des marchands de bétail. Hommes et animaux étaient à l’abri sous des tentes. La pluie avait redoublé d’intensité. Les habitants de la région nous ont affirmé qu’ils n’avaient jamais vu cela auparavant. Cela dit, nous avons  remarqué que lorsque Mâ entreprend un voyage ou un déplacement quelconque, la pluie, les averses, la tempête, sont toujours de la partie. Ainsi, outre le froid glacial, nous avons dû affronter une pluie qui nous trempait jusqu’aux os. Nos corps étaient engourdis, quant à nos pieds nous ne les sentions pratiquement plus. Nous nous sommes efforcés de résister aux assauts de la pluie mais nous nous sentions comme des blocs de bois rigidifiés. Il est difficile de décrire l’état dans lequel nous étions. Seuls ceux qui ont vécu ce genre d’expériences sont en mesure de nous comprendre.

Il était treize heures trente lorsque nous sommes arrivés dans un endroit qui se trouvait sur les avant-monts de certains sommets élevés. Tous nos bagages étaient complètement trempés. Le guide a fait en sorte que ses hommes dressent trois ou quatre tentes pour nous. Parvati Devi, qui nous avait accompagnés, est parvenue, avec l’aide d’un jeune garçon, à allumer un feu en se servant du bois que nous avions apporté avec nous. Notre abri était une petite étable à chèvres, dans un état délabré. Elle consistait en un entassement grossier de pierres, de galets et d’éclats de rochers. Plusieurs d’entre nous se sont empressés d’aller s’asseoir autour de ces flammes ‘revivifiantes’. En peu de temps, leur air presque béat, semblait indiquer qu’ils renaissaient littéralement à une nouvelle vie. Nous ne nous sommes même pas souciés de savoir sur quoi nous étions assis. Ce n’est qu’après un certain temps que nous avons réalisé que nous nous étions affalés sur une sorte de tapis de sol naturel, fait d’un mélange de crottes de chèvres et de moutons ! La porte d’entrée de cette étable était une petite ouverture à travers laquelle il fallait se faufiler, tête baissée, pour entrer ou sortir. Dans d’autres lieux et d’autres circonstances, nous n’aurions pas pu rester dans ce genre de local, mais dehors le froid était tel et la chaleur de notre feu nous semblait si réconfortante, que nous y sommes restés jusqu’au soir. La pluie n’a pas cessé un seul instant. Nous avons transporté des braises dans la tente afin d’y allumer un autre feu. Il fallait faire sécher les vêtements que portaient Matâjî, Bholanath, Jyotish Dada et Swamiji. Mais nous n’avions que peu de bois et il était très difficile d’entretenir un feu dans ce lieu où dominaient l’eau et la glace. Sans compter que la pluie gouttait dans le feu que nous venions d’allumer. Nous avons préparé quelque nourriture que nous avons mangée sans attendre, puis nous nous sommes étendus après nous être emmitouflés dans nos couvertures. Mais nos corps avaient du mal à se réchauffer. Notre expédition – car ce n’était plus un voyage – était pour le moins inhabituelle. En début de soirée, nous avons dû faire bouillir du riz pour Jyotish Dada et son père qui souffraient de troubles de l’estomac. Ainsi, nous avons passé une autre nuit dans la montagne. Cet endroit porte le nom de Dobra.

 

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Samedi 6 juillet 

Lorsque nous avons débouché de l’autre côté de la colline, le paysage qui s’est offert à nos yeux était tellement extraordinaire qu’un sentiment de profonde béatitude nous a envahi, au point d’en oublier les conditions dans lesquelles nous nous trouvions. Dasu Babu semblait en extase. Il a simplement crié : « Mâ ! Mâ ! » Puis il a éclaté en sanglots. Bholanath n’a rien voulu manger. Il a simplement dit qu’il ne mangerait qu’après avoir atteint Takalkot. Il marchait avec un plaisir évident. Swamiji était resté légèrement en arrière. Regardant Jyotish et moi-même, Mâ nous  dit : « Surveillez Swamiji, vous et Jyotish » puis Elle est retournée vers lui et lui a dit : « Je pense qu’il est inutile de s’inquiéter pour qui que ce soit. Je viens de dire ‘JaiTarini’ et je n’ai aucune inquiétude. J’ai pleinement confiance dans le monde. » De fait, lorsque nous sommes descendus, Elle m’a tapoté joyeusement sur l’épaule et j’ai vu des larmes dans ses yeux quand elle a dit : « Je comprends que Tara Mâ veille sur nous tous. » C’est cette joie qui avait embué ses yeux de larmes.

C’est par la grâce de Mâ et de Bholanath que nous accomplissions dans la joie ce parcours difficile et risqué. Après avoir marché pendant un mile environ, nous avons pris quelque nourriture puis nous nous sommes remis en selle, tandis que Mâ remontait dans son dandi. Peu après, nous avons finalement abordé une vaste étendue plate qu’il nous fallait traverser. Nous avons vu les montagnes à la teinte laiteuse. Elles étaient couvertes d’arbres et de plantes de toutes sortes. Nous progressions avec difficulté, mais nous avons tout de même pu contempler le décor magnifique qui nous entourait. La vue était vraiment extraordinaire. Nous sommes arrivés à Takalkot en début de soirée. Notre guide était parti en avant-garde pour dresser nos tentes avant notre arrivée. Quand nous sommes entrés dans cette localité, quelques habitants des lieux se sont approchés et nous ont regardé d’une telle façon que nous nous sommes inquiétés. Nous avons appris, peu après, que ces gens avaient l’habitude de dévaliser les voyageurs et on nous a recommandé de bien être sur nos gardes dorénavant. Durant notre progression, nous avons aperçu de nombreuses grottes sur les flancs de la montagne. Nous avons appris que ces grottes étaient autrefois habitées par des sadhu.

 

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Dimanche 7 juillet

Nous avons fini notre repas vers onze heures du matin, après quoi nous sommes partis pour Rangung qui se trouve à une dizaine de miles d’ici. Depuis le moment où nous sommes arrivés à Takalkot jusqu’au moment où nous avons quitté l’endroit, j’ai pu assister à un spectacle très intéressant. Les habitants de Takalkot venaient de tous côtés pour voir Mâ qui était constamment entourée par les habitants de l’endroit. Ils ne comprenaient pas un mot de ce qu’Elle disait, mais ils venaient de plus en plus nombreux. Au moment de notre départ, une foule imposante d’hommes et de femmes s’était réunie, petit à petit, tout autour du dandi de Mâ. Plusieurs d’entre eux ont commencé à toucher les pieds de Mâ qui, Elle, saisissait leurs doigts, ce qui les faisait sourire de bonheur. Ces gens travaillaient les pelages d’animaux et ils avaient apporté toutes sortes d’articles  et d’objets fabriqués par eux, pour nous les faire voir.

Nous sommes arrivés à Rangung en fin d’après-midi, il devait être six heures. Nous avons vu de nombreux temples, tout au long du parcours. Il y avait des inscriptions gravées sur les pierres utilisées pour leur construction et les hommes qui s’occupaient des chevaux appelaient cela des Omkar. Les pinacles de ces temples étaient tous ornés de cornes de chèvres et de moutons également sculptées. Le trajet que nous avons fait n’était pas trop difficile. Par contre la présence d’éventuels dacoit (brigands de grand chemin)  nous préoccupait grandement et c’est pour cela que nous sommes restés bien regroupés durant tout le parcours. Par chance, la voie est restée libre et tranquille tout au long de notre passage. De temps à autre nous apercevions un troupeau de yacks, de chèvres ou de moutons. Nous avons passé des montagnes à n’en plus finir ! Nous avions l’impression que le trajet était interminable et les montagnes innombrables ! Nous n’avions aucune idée du lieu où nous nous trouvions. Il n’y avait pas d’arbres, pas même un arbrisseau sur notre route, par contre il y avait des champs à n’en plus finir. Les gens de l’endroit, eux, savaient très bien s’y orienter. En fin de compte nous nous retrouvions en train d’aller de l’avant, dans une vallée immense, sans aucune indication d’aucun chemin, dans aucune direction. C’est tout juste s’il y avait quelques arbres et quelques maigres plantes du côté de la montagne. On aurait dit cependant, qu’une main avait décoré le paysage montagneux avec une variété sans nombre de couleurs. La neige recouvrait pics et sommets, rehaussant la beauté du relief qui les environnait. En foulant la terre de ce chemin que nous ne distinguions pas, nous avions le sentiment d’être partis pour un long, un interminable voyage. Un voyage vers l’infini, peut-être. Lorsque nous nous sommes arrêtés, le guide, lui, savait d’instinct la distance que nous avions parcourue. A la tombée de la nuit, il avait terminé de dresser les tentes. Nous nous  sommes alors occupés de récupérer nos affaires personnelles, avant de nous installer pour prendre quelque repos. Puis nous aurions à nouveau démonter nos demeures – nos tentes en l’occurrence – et repris la route une nouvelle fois. Nous étions devenus des nomades ! Baba souffrait de troubles respiratoires, aujourd’hui. Mâ a donc décidé de lui céder le dandi, pour le trajet de demain, trajet qu’Elle-même effectuera à dos de cheval. Nous avons pris notre repas aussi rapidement que possible puis nous nous sommes étendus pour la nuit.

 

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Mardi 9 juillet

Nous avons bu quelques tasses de thé chaud puis nous sommes partis. Plusieurs  personnes nous accompagnaient. Nous avons parcouru une distance de dix miles pour atteindre Manasarovar. Cette fois encore le guide nous avait  mis en garde contre les dacoit qui, selon ses dires, séviraient aussi sur cette partie du trajet. Mâ monte le cheval de Swamiji qui souffre à nouveau de difficultés respiratoires et qu’Elle a incité à emprunter le dandi. Moi-même, j’ai eu quelques problèmes de respiration au cours de la nuit dernière. Vers trois heures du matin j’avais beaucoup de mal à respirer. Le froid était insupportable en dépit du fait que nous étions emmitouflés dans d’innombrables vêtements chauds. Au matin, vers huit heures trente, nous nous sommes tout de même mis en route. Auparavant, nous avions déjà rencontré des dacoit sur ce chemin mais, par la grâce de Mâ, rien de fâcheux ne s’était produit. Nos hommes portaient des fusils et autres armes. Sur le trajet, nous avons rencontré deux hommes armés. Ils se sont mis à marcher à nos côtés, la manche droite de leur manteau retroussée, ce qui était censé signifier qu’ils étaient prêts à faire usage de leurs armes. Plus loin, en haut d’une colline, il y avait deux hommes. Ils étaient immobiles et semblaient attendre quelque chose. Ceux qui marchaient à nos côtés leur ont fait signe. Ils sont descendu jusqu’au pied de la colline et se sont assis sur le bord du chemin, comme pour attendre notre passage. Notre guide était lourdement armé. Il est parti soudain au galop dans leur direction. Il s’est arrêté à leur niveau, puis il est descendu de cheval, s’est assis avec eux et a commencé à  leur parler. Notre groupe, qui continuait à avancer, a dépassé les hommes qui étaient en pourparlers et s’est éloigné.  Après quelques minutes, j’ai vu, en me retournant, que notre guide s’était remis en selle et qu’il était en train de nous rattraper au galop. Il était tout souriant. A l’évidence, il avait obtenu des dacoit qu’ils nous épargnent.

Le dandi se déplaçait lentement. Nous nous arrêtions régulièrement pour qu’il nous rejoigne. Le guide avançait avec une certaine méfiance. Un peu plus loin, nous avons aperçu deux hommes qui attendaient le long du chemin, au milieu de cette étendue totalement désolée. Il n’y avait pas un arbre, pas une plante pour rompre la vaste désolation qui nous entourait. Que des montagnes ! Aussi loin que pût porter le regard, il n’y avait que des montagnes, uniquement des montagnes, rien d’autre que des montagnes ! Puis nous avons aperçu devant nous, non loin du chemin, un groupe de personnes devant une grande tente. Une nouvelle fois notre guide s’est lancé au galop. Il est allé dans leur direction. Tout comme nous l’avions fait auparavant, nous avons passé notre chemin. Notre guide nous a rattrapé quelques instants plus tard. Il nous a expliqué que cette tente n’était autre que le repaire des dacoit, en même temps que le refuge de leurs chèvres et de leurs moutons.

Nous avons poursuivi notre progression dans la peur constante de rencontrer une autre bande de dacoits (brigands). Mais tout à coup nous avons aperçu, dans le lointain, le lac Manasarovar. Toutes nos peurs se sont alors volatilisées, comme par enchantement. Quelle vue extraordinaire ! Un lac gigantesque qui s’étendait jusqu’à l’horizon et dont les eaux reflétaient fidèlement les teintes merveilleuses d’un ciel qui semblait être la copie de l’original qu’il était.

Nous avons parcouru un bon bout de chemin tout en jouissant du spectacle du lac Manasarovar. Puis la configuration du terrain s’est modifiée et nous avons eu des montées particulièrement raides, suivies de descentes tout aussi raides. La vue de Mâtajî montant un cheval, nous était devenue insupportable mais Elle refusa fermement de reprendre le dandi. Le terrain était très mauvais et nos ennuis semblaient ne pas devoir prendre fin de sitôt. Mâ avançait en tête, toute souriante. Nous nous étions rapprochés de la tête du groupe, laissant derrière nous le dandi et son occupant. Tout à coup Mâtajî a immobilisé son cheval et a mis pied à terre. Bholanath, Jyotish Dada et moi-même étions près d’Elle. Elle nous a dit : « Vous trois vous allez continuer et vous vous arrêterez quand vous arriverez à l’endroit où seront dressées nos tentes. Moi je vais attendre le dandi. » Tunu et Dasu Dada étaient restés en arrière eux aussi.

Nous étions totalement contraires à l’idée de laisser Mâ toute seule dans cet endroit désert, mais Elle a répété d’un ton décidé : « Faites ce que je vous dis, continuez. » Bholanath a tenté plusieurs fois de protester puis il s’est résolu à aller de l’avant avec Bhaiji, toujours en direction du lac Manasarovar. Je les ai finalement rejoints et nous avons atteints ensemble les berges du grand lac où Parvati Devi et le guide étaient occupés à monter les tentes. Il était environ deux heures de l’après-midi lorsque nous avons mis pied à terre. Ainsi nous étions divisés en trois groupes. Nous nous sommes assis sur les rives du Manasarovar et nous avons attendu l’arrivée de Mâ et des autres.

Des cygnes aux couleurs différentes nageaient sur les eaux du lac. J’avais un peu de temps libre devant moi. J’ai donc décidé de me rendre dans l’une des tentes pour me mettre à écrire. Quel endroit exceptionnel ! Je crois qu’il est aussi exceptionnel  qu’il est dangereux. De tous côtés, des montagnes, des montagnes  à n’en plus finir, dont les couleurs semblent avoir été étalées par quelque main savante. A nos pieds, là devant nous, les eaux incomparables du Manasarovar. Le vent souffle par petites rafales. Il fait si froid, que nous sentons à peine la chaleur des rayons d’un soleil qui a enfin consenti à se faire voir. Non loin de moi, le guide déclare : « Nous sommes arrivés sains et saufs, par la grâce de Mâ. Dans ces régions, il arrive parfois que le vent souffle tellement fort qu’il est impossible de rester debout. »

Nous ne sommes plus qu’à trois jours du Kailash. Le pic du Mont Kailash est illuminé par la présence d’une structure naturelle en glace qui a vaguement l’aspect d’un temple et qui scintille sous le soleil, comme de l’argent. En apercevant au loin le pic, les gens qui étaient avec nous commencent à lancer à voix haute : « Kailash Pati ki jai » (victoire au Seigneur Kailash). Maintenant que nous sommes là, au milieu de ce décor extraordinaire, nous nous prenons à rêver et notre coeur s’emplit d’une joie indescriptible.

Après avoir réglé les petits problèmes du moment, nous allons pouvoir commencer à cuisiner. Durant les jours précédents nous n’avons pas pu ramasser de bois pour le feu. Mais sur le flanc des montagnes il y a des buissons et des arbustes épineux que nous pourrons utiliser. Par ailleurs, les garçons du groupe ont ramassé des bouses de yacks desséchées avec lesquelles nous avons allumé un feu pour préparer le repas. Il n’y rien d’autre comme combustible. Les plantes ne sont pas utilisables car elles ne sont pas suffisamment sèches. Avec ce vent qui souffle il est impossible d’allumer un de nos petits fourneaux.

Outre cela, il y a aussi quelques problèmes de santé dans le groupe. Nous avons tous des difficultés à respirer et nous sommes contraints d’inhaler du camphre pour surmonter ces difficultés.

Lorsque nous étions à Almora, Mâtajî nous avait conseillé de prendre des  pantalons de laine, ce que nous avions fait. Elle avait également commandé des kurta de laine. Je me rends compte maintenant que si nous n’avions pas disposé des habits chauds que Mâtajî nous avait conseillé de prendre, outre ceux que nous avions apportés de Calcutta, il est probable que nous n’aurions pas survécu au froid qui sévit dans ces régions. Je réalise également à quel point étaient importantes les autres choses que Mâ nous avait dit de prendre avec nous, comme le camphre par exemple. Ce n’est qu’en arrivant ici, d’ailleurs, que j’ai appris que le camphre pouvait résoudre ces problèmes d’ordre respiratoire. Il est indubitable que Mâ est un être parfait et tout-puissant. Mais que puis-je percevoir de sa grandeur quand il s’agit de problèmes aussi dérisoires que ceux que je viens d’énumérer. Toutefois je suis heureux d’en parler et c’est pour cela que je le fais.

 

                                                                                                                                                                  Traduit de l’anglais par Jean E. Louis

 

 

En Association avec Anandamayî

par Amulya Kumar Datta Gupta

(suite)

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Il n’y a pas d’autre voie que celle-ci.

Le 20 décembre 1939.

Lorsque je rendis visite à Mâ, ce matin-là, je constatai que Sri Navataru Haldar était déjà sur les lieux. Il était accompagné d’un ami à lui, un médecin. Il présenta  ce dernier à Mâ et après les formules habituelles il ajouta : « Il y a quelques jours de cela, son fils est mort à la suite de graves brûlures. »

Mâ : « Chaque fait qui se produit dans notre vie est inscrit dans notre destin. Il faut comprendre que ces évènements sont inévitables. C’est notre destinée qui s’accomplit. Il y en a qui meurent le corps brûlé par les flammes, d’autres qui meurent l’esprit dévoré par le feu.

Docteur : « Il devrait y avoir une limite à la souffrance. Nous devrions avoir la force suffisante pour supporter la douleur. »

Matajî : « En vérité, c’est Lui qui nous donne cette force. Chacun, ici bas, doit endurer la souffrance qui lui est destinée. Peu importe que l’on considère cela comme une faute du Tout-Puissant ou comme un des aspects de Sa Grandeur, ce qui compte, c’est qu’il appartient à chacun de vivre ce qui lui est destiné. »

Docteur : « Puisque notre sort est de souffrir qu’on le veuille ou non et puisque ce qui arrive, doit de toutes façons arriver, le but de cette vie ne devrait-il pas être de ne rien faire du tout, de rester assis et d’attendre tranquillement que le temps passe ?

Matajî : « Comment peut-il être possible d’éviter l’action ? C’est Lui qui vous pousse dans le tourbillon de la vie et du travail. Les gens travaillent, ils travaillent encore et encore. A la longue ils sont tellement épuisés qu’ils sont contraints de renoncer à toute forme d’action. Mais il ne peut en être ainsi que lorsque l’heure est venue qu’il en soit ainsi. L’homme doit travailler et supporter les conséquences des actions passées, aussi longtemps que son karma n’est pas accompli. C’est la lilâ (le jeu) du Divin. »

Docteur : « Cela équivaut à bastonner une personne après l’avoir ligotée. Une belle situation, il n’y a pas à dire ! Non seulement je dois accomplir mon travail avec les mains ligotées, mais en plus je dois supporter les conséquences de cette situation ! C’est peut-être le jeu du Divin, mais là Il joue à nos dépens !

Matajî (Elle sourit) : « Qui est-ce qui se réjouit ? Qui est-ce qui souffre ? Qui reçoit les coups ? C’est Lui qui frappe et c’est Lui qui reçoit les coups et endure les souffrances. Personne n’existe, si ce n’est l’Unique. »

Docteur : « Si vous voyez les choses sous ce jour-là alors plus rien n’a d’importance. En fait c’est Lui qui fabrique l’abcès et qui, ensuite, devient le médecin et... »

Matajî (Elle l’interrompt) : « Il ne fabrique pas l’abcès. Il devient Lui-même l’abcès. (Dans la salle tout le monde rit). Ecoutez, sur cette terre où vivent les hommes, le malheur et les souffrances sont inévitables. Au début vous étiez un, puis vous êtes devenu deux, puis trois, puis une multitude. C’est pour cela que vous devez souffrir. Mais il y a une chose que vous pouvez faire : prendre des médicaments. Consultez un bon médecin, il vous prescrira un traitement. Ainsi vous pourrez soigner votre maladie. Il n’y a pas d’autre façon de parvenir à la paix. »

Docteur : « Mais où puis-je trouver un bon médecin ? C’est précisément pour cette raison que je souhaitais vous rencontrer. »

Matajî : « La grande difficulté c’est de le trouver le bon médecin. Quoiqu’il en soit, faites vous prescrire, par un médecin que vous considérerez comme étant compétent, les médicaments appropriés. La meilleure des solutions serait de vous faire hospitaliser, parce que à l’hôpital vous seriez contraint de prendre les médicaments prescrits aux heures indiquées. Sans compter que l’ambiance du lieu vous serait bénéfique. Mais vous n’aurez peut-être pas la possibilité de vous faire hospitaliser. Dans ce cas, prenez vos médicaments chez vous, de façon régulière. Mais là, hélas, il est probable que vous ferez des erreurs dans les doses et les horaires prescrits ou qu’un régime alimentaire inadéquat contrariera l’effet des médicaments. De nombreuses personnes affirment qu’elles disent et redisent régulièrement le nom du Divin, mais qu’elles n’en tirent aucun profit. Comment peut-on espérer tirer profit d’un médicament bénéfique si par ailleurs on adopte un régime alimentaire totalement pernicieux ? Et c’est ce qui risque de se passer chez vous aussi. Quoiqu’il en soit, efforcez-vous d’avaler vos médicaments à heures régulières et adoptez, aussi souvent que vous le pouvez, un régime sain et bénéfique. En vous joignant, par exemple, à des sadhu (pratiquants spirituels). » 

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Le rire de Matajî.

était assise dans la véranda située côté est de l’ashram. Nous nous étions regroupés autour d’Elle. Le Professeur Shyama Charan Babu, du collège Agra, se trouvait parmi nous. Il regarda dans la direction de Mâ et lui demanda pour quelle raison, la veille, Elle s’était mise à rire aux éclats.

Matajî : « Il en va toujours ainsi, avec ce corps, pour ce qui est du rire et des larmes. Vous m’avez vue en train de rire uniquement durant la séance de lecture. Dans la soirée aussi je me suis mise à rire ! De tout coeur ! C’était les gargouillis d’un robinet qui se trouve dans la cour de l’ashram qui me faisaient rire. Vous avez certainement remarqué que lorsqu’un robinet est ouvert, il en sort parfois un filet d’air qui produit une sorte de chuintement. Eh bien, hier soir, le robinet de la cour de l’ashram faisait entendre ce drôle de sifflement chuintant. Et je n’ai pas pu m’empêcher de rire aux éclats ! C’est sans doute parce que quelque chose ne tourne pas rond dans cette tête ! Et ce n’est pas tout. Le même soir, lorsque Swamiji était en train de faire la lecture, à un certain moment, d’un geste involontaire de la main, il a renversé le pupitre sur lequel était posé son livre. Et cela aussi m’a fait partir d’un grand éclat de rire. Et pourtant l’incident en lui-même n’avait rien de particulièrement risible. Cela prouve que ce corps peut se prendre à rire, apparemment sans aucune raison valable. N’importe quel fait peut déclencher en lui un éclat de rire. Et toute tentative pour contenir ou pour réprimer ce rire ne fait que mettre de l’huile sur le feu !

Un jour, à l’ashram de Dacca, une séance de kirtan était en cours. Le kirtaniya mettait toute son âme dans les paroles qu’il chantait. Les larmes roulaient sur ses joues et les personnes présentes étaient visiblement très émues. Mais bien que le chanteur mît beaucoup d’émotion dans ses paroles, ses connaissances sur le plan littéraire ne semblaient guère meilleures que celles de ce corps. Tandis qu’il chantait avec ferveur, il estropia tout à coup un mot. Bien que l’étourderie ne fût pas très grave et qu’elle n’affectât en rien l’émotion du chanteur et de l’assistance, je partis là aussi d’un bel éclat de rire. Khukuni fit tout ce qu’elle put pour me calmer. Elle me murmura à l’oreille que mon rire pouvait blesser ou offenser le kirtaniya ou des personnes de l’assistance. Mais en vain. Elle fut contrainte de me conduire dans un autre endroit...où je me mis à rire de plus belle. Je vous raconte cela pour vous donner une idée de ce qu’est mon rire. 

Cela dit, ce corps ne rit pas uniquement lorsqu’il se passe quelque chose de comique. Il peut rire pour un rien ou même pour rien du tout. Par ailleurs, il est arrivé plus d’une fois, que ce corps éclate de rire au spectacle de la souffrance de gens malheureux. Ceux qui ne sont pas au courant de l’étrange comportement de ce corps pourraient se sentir blessés. Ils pourraient croire que je ris d’eux, de ce qu’ils font ou de ce qu’ils sont, alors que c’est loin, très loin de la vérité.

Il arrive souvent que l’incident qui semble déclencher le rire dans ce corps, ne soit pas du tout la véritable raison de cette manifestation. Par contre, certains incidents du passé ou du futur qui flottent dans mon esprit, peuvent être la cause d’un éclat de rire. »

                                                                                                                                                                               Traduit de l’anglais par Jean E. Louis

 

Panuda a rejoint Mâ

 

      Bhramachari Panuda a quitté son corps dans la nuit du 29 au 30 octobre 2011 à Bénarès. Le décès a été assez rapide à la suite d’une attaque cérébrale, il était sinon en bonne santé et normalement actif. Il avait plus de 80 ans, était vice-président de la Sangha de Mâ, et Swami Vijayananda le décrivait régulièrement comme le meilleur karma-yogui de tout le mouvement de Mâ. Il a été, depuis l’époque de l’arrivée de Vijayananda à Bénarès (c’est-à-dire  environ en 1951) secrétaire de l’ashram de dans la ville sainte et la personne « pivotale » pour le fonctionnement de l’hôpital juste à côté, qui voit passer environ 30000 patients externes par an et a à peu près 2000 hospitalisations.

     Il était régulièrement à la Samyam Sapta de Kankhal pour recevoir les inscriptions sur une petite table près du bureau, et l’âge n’était pas une excuse à ses yeux pour s’arrêter de rendre service aux fidèles de Mâ et à la société en général. Une de ses actions discrètes était de recueillir au moins un exemplaire de tous les livres publiés sur Mâ, quelle que soit la langue. Vigyananand lui en a apporté ainsi un certain nombre en Français, qui sont maintenant épuisés mais qu’on peut photocopier grâce à la bibliothèque de Bénarès. Il s’occupait aussi avec une équipe efficace de la publication des versions de l’Amrita-Varta en différents langages. Les petits bénéfices que nous avons avec le ‘Jay Ma’ sont consacrés au soutien de ces éditions sur papier, plus coûteuses si l’on inclus en plus, bien sûr, les frais de poste à chaque fois.

    Panuda était disponible tous les jours dans son petit bureau qui donnait sur la cour de l’ashram de Badhaini. Il était entouré d’une équipe d’assistants de longue date avec lesquels il avait l’habitude de travailler. Il était un bon organisateur, cela se voyait par exemple au fait que les programmes qu’il organisait commençaient à l‘heure dite, c’est un fait assez rare en Inde, le Dalaï-lama est cependant connu pour cette qualité de ponctualité. Sa fidélité à Mâ était inspirée par une image toute simple de Gurupriya Didi qu’elle lui avait donnée il y a plus d’un demi-siècle, et qu’il m’avait mentionnée lors d’un de nos derniers entretiens lorsque j’étais de passage à Bénarès : « Le vrai disciple a l’humilité du chien, même si son maître paraît le repousser, il revient toujours à sa porte ».

        Il faisait ce qu’il pouvait pour essayer de maintenir la Sangha ensemble.

    Une anecdote qui montre que la communication dans l’ashram de Bénarès n’était pas dépourvue d’imprévus. Un jour, Arthur Koestler, un écrivain à succès dans les années cinquante et soixante, était venu voir Vijayananda. Il écrivait un livre sur l’Inde, Le lotus et le robot. Malgré ses critiques générales sur l’hindouisme, il avait apprécié sa rencontre avec celui qu’il surnommait dans son texte « Frère Vijayananda ». Il décrit en particulier sa simplicité de vie et mentionne le fait qu’il n’avait même pas de lit dans sa cellule et couchait sur une paillasse à même le sol. Il a fallu que le livre soit publié à Londres, que Panuda le reçoive de là-bas et le lise, pour s’apercevoir de ce fait dont il n’était pas au courant. Il a immédiatement convoqué frère Vijayananda et lui a demandé, on peut supposer que cela a été sur un ton sévère : « Pourquoi ne me l’avais-tu pas dit? » Et il lui fit installer aussitôt un lit…

 

                                                                                                                                                                                                       Vigyânanand

 

Pushparaj n’est pas un écrivain, mais il a quand même écrit ce petit mot sur Panuda avec lequel il collaborait   :

    « Notre cher Panuda appartenait à une famille de haut niveau et de bonne réputation en Inde. Il était très éduqué et a rejoint l’ashram à un âge jeune, juste après avoir réussi sa Maîtrise.  Nous pouvons voir dans sa vie un exemple de tyaga, de renoncement, et d’abandon à Ma. Le soin même avec lequel il suivait la tradition de Sri Sri Mâ l’a rendu très proche d’elle. »

    Pushparaj rapporte qu’à  propos des avis divergents pour la gestion de la Sangha, il était d’avis de donner des responsabilités pour ceux qui avaient des idées sur ce qui devait être fait, et de les laisser expérimenter en quelques sorte par eux-mêmes la difficulté de l’épreuve de réalité. Il n’aimait pas, par contre, les grands discours de ceux qui ne voulaient ensuite pas mettre la main à la pâte.

 

    Marie-France Martin qui vit à Kankhal a recueilli quelques éléments sur Panuda, bien qu’elle le voyait assez peu puisqu’il résidait principalement à Bénarès : «  Quand Panuda était enfant son oncle vivait dans un ashram de Mâ, et il allait régulièrement le voir, mais il n’avait rencontré Mâ qu’une fois. A la fin de ses études, il fut immédiatement recruté comme professeur quelque part. Juste avant de prendre son poste, il voulut aller saluer son oncle à Calcutta, et Mâ elle-même si elle était présente là-bas. En fait, elle l’était. Elle lui a dit : « Je pars à Bénarès ce soir, viens avec moi ! » Il a eu deux heures pour préparer ses affaires, il a pris le train pour Bénarès…et il n’a plus jamais quitté la communauté de Mâ.

    En essayant de me renseigner à son sujet, je me rends compte que tout le monde me fait le même portrait : celui d’un homme extrêmement discipliné, qui attendait la même discipline de tous ceux qu’il rencontrait, celui d’un organisateur intègre et efficace, d’un travailleur acharné, de quelqu’un qui renvoyait de son ashram une personne très utile si elle faisait quelque chose de répréhensible. Mais pas d’autres anecdotes à son sujet.

    Il était toujours là, en sa présence le travail était efficace, et c’est ainsi qu’entré dans la communauté comme professeur, il a fini sa vie secrétaire général, mais ce n’était jamais lui qui était important. »

    Il a quitté son corps dans la nuit du 29 au 30 octobre 2011. »

 

     Dans le prochain numéro  nous traduirons de l’Amrita Varta des témoignages sur Panuda.

 

Un nouveau livre

 Voyage intérieur aux sources de la joie’

(Souvenirs de l’Inde)

De Geneviève Koevoets (Mahâjyoti)

 

Mahajyoti s’occupe depuis longtemps, bénévolement, à partir de Nice, de la distribution par voie électronique du ‘Jay Ma’, elle est venue plusieurs fois en Inde avec Vigyânanand, et a fait retraite à Kankhal et Dhaulchina. Elle a écrit un petit livre à propos de ses années d’expériences en lien avec l’Inde et avec Mâ. Il va sortir pour Noël, aux Editions du Petit Véhicule à Nantes. Nous en donnons la présentation :

 

Ce livre, empreint de spiritualité et où l’humour flirte avec la joie d’être, se présente comme une bouffée de réconfort. L’auteur a simplement voulu transmettre, sans aucune prétention, une expérience spirituelle, une aventure au plus profond du Soi, un ‘voyage intérieur’.

Comme l’écrit dans sa préface le Dr Jacques Vigne (psychiatre, ermite en Himalaya et auteur connu en spiritualité) Geneviève (Mahâjyoti) a mis ses compétences en communication dans trois langages au service de l’Enseignement de l’Inde.

Ses récits relatent une tranche de vie qui a ouvert des chakras et des portes vers une profonde dimension intérieure. Ce livre contient ses témoignages, reportages épiques de voyages vécus en Himalaya, poèmes, photos et portraits, créés en remerciement à Jacques Vigne et en hommage à une grande ‘Sage’ comme Mâ Anandamayî et à un Swami comme Vijayânanda. Ses premiers écrits datent de 2003 à sa découverte de l’Inde dans tout ce qu’elle représente comme choc émotionnel ! Et va jusqu’à maintenant, à travers une progression qui se sent, au fil du texte, et qui est davantage palpable dans la profondeur des derniers poèmes, par rapport à l’apparente légèreté de l’humour contenu dans les reportages du début, vécus…et souvent soufferts !

Que ce très beau nom de ‘Mahâjyoti’ (de ‘Mahâ’ grand et ‘Jyoti’ lumière, reçu de Swami Vijayânanda) puisse éclairer ce petit recueil en touchant le cœur de ses lecteurs.

 

 

Une boucle s’est bouclée

 

La dernière intervention d’Arnaud Desjardins en dehors d’Hauteville a été pour

Témoignage de Marie-Agnès Bergeon

 

"Je voudrais partager succinctement le dernier contact que j'ai eu avec Arnaud. Je l'avais invité à venir un jour à notre première retraite de Ma en mai 2011 en Ardèche (retraite intense selon le schéma que Ma proposait lors des retraites 'sanyam'). Il a accepté immédiatement. Sa dernière intervention publique -en dehors de son ashram, a donc été en fait  pour cette retraite de Ma. Son intervention à propos de Ma et de sa relation avec Elle a été longue, profonde, très forte, rendant Ma extrêmement présente parmi nous. Magnifique cadeau pour nous tous.

    Il a donc aussi, de cette façon, rencontré Swami Nirgunananda qui était là. Il nous a parlé également de Swami Bhaskarananda qu'il connaissait et aimait beaucoup.  Swami B. avait servi de traducteur pour lui auprès de Ma. Swami Nirgunananda a pu l'entourer à la fin d'une écharpe qui venait de Swami Bhashkarananda. Autre beau moment émouvant pour Arnaud, et nous tous. Un swami de la mission Ramakrishna était présent aussi ce jour-là.
Arnaud était très heureux d'être là. Il est resté encore un bon moment à discuter informellement,  et m'a dit en partant : "Merci, c'est vraiment bon de pouvoir parler de Ma avec des gens qui peuvent comprendre".

    Nous avons pu mettre une partie de son intervention avec son accord sur 'You tube'. Vous pouvez la trouver sur "You tube  Arnaud Desjardins, retraite st Privat,  ou Arnaud speaks about his experiences with Ma".

      Cette année, une nouvelle retraite aura lieu en Ardèche près d'Aubenas, du 27 avril au soir au 4 mai après-midi. L'anniversaire solaire de Ma est inclus dans cette période. Swami Nirgunananda sera là, ainsi que 3 ou 4 autres swamis d'autres lignées qui viendront donner des enseignements sur la vie spirituelle, s'appuyant sur les Upanishads, la Gita et les Puranas. La retraite comporte aussi une ascèse par rapport à la nourriture et une intensité dans les pratiques et l'horaire quotidien. Son déroulement est au plus près des instructions données par Ma pour cela.

Swami Nirgunananda restera  en Ardèche jusqu'au 9 mai pour la  célébration de l'anniversaire lunaire de Ma : Tithi puja.

   Pour toute info plus détaillée, s'adresser à marie-agnes.bergeon@numeo.fr

 

 

Nouvelles

 

-  Panuda est décédé d’une attaque cérébrale en novembre. Le lecteur a sans doute déjà lu l’article in memoriam  ci-dessus.

- En plus du programme de l’anniversaire de Mâ pour 2012 en Ardèche chez Marie-Agnès Bergeon que nous venons de mentionner, voici quelques autres nouvelles :

- Une Bhagavat-sapta avec, pendant une semaine, la lecture du récit de la vie de Krishna, s’est déroulée début septembre à l’ashram de Kankhal. On fait ce genre d’activité souvent en mémoire des défunts d’une famille. Ici, elle a été organisée par l’ashram en mémoire des Swamis qui ont quitté leur corps depuis 2010, non seulement Swami Bhaskrananda et Vijayânanda, mais aussi Shivananda qui s’occupait de Vrindavan, Chetanyanananda qui vivait à l’ashram de Delhi et Swamini Purnananda qui est décédée dans sa maison de famille à Delhi. Quelques Occidentaux étaient présents à un certain nombre des programmes, dont Marie-France Martin, Sandrine Oubrier et Vigyânanand. Il y avait aussi Marcy, une américaine qui vit depuis deux ans le plus souvent dans la maison de la Rani en face du samadhi de , ainsi que Haripriya (Heide de Mannaheim qui a traduit Matri Vani en allemand) et son mari Kantibhai..

- Elisabeth, une dame américaine qui vit souvent à Kankhal et connaissait Mâ, vient de recevoir le Naishtik Brahmacharya de Swami Nirvanananand. Nous lui souhaitons une belle sadhana inspirée par le feu de la Connaissance, le sens principal de la couleur orange selon Vijayânanda.

- L’anniversaire de Vijayânanda a été célébré au Père Lachaise avec un groupe important de fidèles. Pushparaj et Padma étaient présents grâce à l’invitation d’Izou pour effectuer la puja à cette occasion. A Kankhal, une dizaine d’Occidentaux étaient présents ce soir-là, et nous avons médité et échangé avec, en particulier, Rajat Narain qui connaissait Swamiji depuis 1971. Il l’avait rencontré pour la première fois à Dhaulchina même.

- Nous avons la joie d’annoncer la parution du premier livre de Mahajyoti, pour Noël. Il s’agit du recueil : "Voyage Intérieur aux Sources de la Joie (Souvenirs de l'Inde)" aux Editions du Petit Véhicule à Nantes. On se reportera à l’article de présentation ci-dessus.

- Vigyânanand (Jacques Vigne) repart de Delhi pour l’Occident le 26 mars : au programme, Italie, Etats-Unis, Canada, France, Suisse, La Réunion, Belgique, Allemagne et finalement…Egypte et Liban, avant de retourner à Delhi début février 2013, pour accompagner un groupe à la grande Kumbha-méla d’Allahabad. Programme détaillé sur www.jacquesvigne.fr.st  Son livre sur Anorexie et connaissance de soi doit paraître en 2012 aux Editons du Relié, après avoir été déjà publié en avril 2010 en italien à Milan. Il y parle des jeûnes en Inde, et en particulier de ceux peu ordinaires qu’a effectués Mâ Anandamayî entre 20 et 30 ans environ. Il sera suivi par un nouveau livre sur la méditation Méditation, émotions et corps subtil qui sera une synthèse de 400 ou 500 pages sur le sujet, toujours aux éditions du Relié.

- Il y aura en particulier dans ce programme une retraite du 15 au 21 août en un lieu dédié à Mâ Anandamayî, la maison de Jean-Jacques Enjalbert à Cordes-sur-Ciel. Il s’agit d’une bâtisse historique sur la place médiévale du village et elle est devenue une sorte d’exposition permanente sur . Curieusement, environ un quart de tous les livres de Mâ vendus par Albin-Michel le sont en fait aux visiteurs de ce lieu. Jean-Jacques est en train de compléter une quarantaine de jours de retraite à Kankhal. Vijayânanda, observant le lien spécial qu’il avait avec Mâ, suggérait qu’il avait été avec elle dans une vie antérieure.

- Un nouveau livre de Marc-Alain Descamps est sorti en novembre ‘Histoire du Hatha-Yoga en France, passé et présent’ aux Editions Almora. Il retrace toute l’aventure du yoga en France depuis les trois pionniers au début du XX° siècle : Maryse Choisy, Constant Kerneïz, Cajzoran Ali, jusqu’à nos jours. Il montre aussi les liens entre l’Orient et l’Occident en remontant jusqu’aux maîtres indiens. Qu’est-ce que le yoga ? Une pratique sportive ? Un moment de détente ? Un apprentissage de postures complexes ? Un moyen d’atteindre l’éveil ? C’est le yoga du corps qui s’est diffusé sous le nom de hatha-yoga, avec un tel succès qu’on en est venu à oublier la méditation, qui est le cœur de la pratique.

 

 

 

Renouvellement des abonnements en cours

Pour le ‘JAY MA’  2011-2013

 

 

Merci à tous ceux (nombreux) qui ont déjà  renouvelé l’expérience du ‘JAY MA’ et qui se sont inscrits de nouveau auprès de José Sanchez Gonzalez  pour la partie administrative : 10 rue Tibère – 84110 Vaison-La-Romaine – nagajo3@yahoo.fr – 0634988222 et ensuite auprès de Geneviève (Mahâjyoti) qui en gère bénévolement  l’édition, pour qu’elle puisse procéder aux envois en vous remettant sur ses nouvelles listes : koevoetsg@wanadoo.fr .

La brochure est toujours au prix de 1 Euro par exemplaire trimestriel, envoyé par email, à renouveler pour deux ans, de mars 2011 à mars 2013. Les numéros arriérés seront envoyés automatiquement à tous ceux qui s’inscriront en cours de route.

Le dernier numéro a été le 102ème de cette brochure qui fut créée il y a désormais 25 ans. Lien d’amour avec l’Inde, avec , avec les Swamis, les lectures, les voyages, à travers la composition qu’en fait Jacques Vigne.

 

 

Table des matières

 

Paroles de (extraites de ‘Les Enseignements de

Anandamayî’’)

Nous voilà réveillés par Jean Bastide

Le pèlerinage de au Mont Kailash

De Gurupriya Devi - Volume V

En Association avec Anandamayî

Par Amulya Kumar Datta Gupta

Panuda a rejoint  par Vigyânanand

Un nouveau livre ‘Voyage intérieur aux sources de

La joie’ (Souvenirs de l’Inde) de G.Koevoets (Mahâjyoti)

Une boucle s’est bouclée-La dernière intervention d’Arnaud

Desjardins-Témoignage de Marie-Agnès Bergeon

Nouvelles

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